280 projets sont sortis des incubateurs de l'Etat
Créé en 2015, l'incubateur de la Direction interministérielle du Numérique (Dinum) a donné naissance à plus de 280 services numériques. Parmi eux, 43 ont été lancés en version finale. Les sujets qu'ils adressent sont extrêmement variés. Ils vont de la cartographie de l'espace maritime jusqu'au référencement de toutes les API de l'Etat en passant par la plateforme data.gouv.fr conçue pour partager les données publiques en open data (l'un de ses services historiques). Certains ont été directement créés au sein de l'incubateur de la Dinum. D'autres sont portés par une vingtaine d'incubateurs mis sur pied au sein des ministères et autres administrations publiques, telles que l'Agence de la transition écologique ou encore France Travail.
L'incubateur des Territoires rattaché à l'agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), a par exemple lancé l'annuaire des collectivités qui permet aux petites communes de diffuser des informations sur le web. Autre exemple : le service EnvErgo, réalisé en lien avec le ministère de la Transition écologique, permet aux entreprises qui ont des projets d'aménagement de prendre connaissance en quelques clics des réglementations impactant leur chantier. "Grâce à cette brique, les aménageurs gagnent un temps précieux en étant immédiatement aiguillés au sein des codes de l'environnement et de l'urbanisme en fonction de leur problématique", commente Ishan Bhojwani, chef du département Incubateur de produits numériques de la Dinum.
Des intrapreneurs à la manœuvre
Au travers des différents incubateurs, chaque service est porté par un intrapreneur qui est systématiquement un agent de l'Etat. Il est assisté par une équipe recrutée via un marché public cadre. Elle se compose en général d'un coach (le plus souvent un ancien entrepreneur du numérique), de développeurs, de designers, de chargés de déploiement, de gestionnaires de produit... "C'est une équipe pluridisciplinaire qui fait également intervenir des experts métier qui seront notamment amenés à accompagner les utilisateurs dans le déploiement et la prise en main du service. Cette équipe est conçue sur-mesure en fonction du projet. Elle fonctionne en mode start-up en s'appuyant sur les méthodes agiles", commente Ishan Bhojwani.
Comment les intrapreneurs sont-ils détectés ? Certains ministères lancent des appels à projets auprès de leurs agents. Mais le cheminement des intrapreneurs peut être beaucoup moins formel. C'est le cas du parcours d'Ariane Rose qui travaillait initialement pour le programme France Très Haut Débit sur le déploiement de la fibre au sein de l'ANCT. "J'accompagnais les collectivités pour déployer la fibre sur des territoires où les opérateurs privés étaient absents. Ma mission était de lever les freins à ces déploiements. Or, l'un de ces freins résidait dans les adresses qui n'étaient pas toujours présentes dans les bases de données des opérateurs. Ce qui menait à des échecs de raccordement", détaille Ariane Rose. "Partant de là, au lieu de lancer un marché public classique pour développer une solution d'annuaire, nous avons décidé de créer une start-up d'Etat."
"Au total, l'incubateur de l'Agence nationale de la cohésion des territoires compte 21 services numériques"
Et Ishan Bhojwani, d'ajouter : "Côté Dinum, nous avions commencé à travailler sur des briques qui pouvaient intéresser Ariane, notamment la base d'adresses nationales qui existait déjà partiellement." Dans la foulée, cette base est complétée par une brique permettant aux communes de contribuer à son enrichissement. Par ce biais, elles peuvent y ajouter de nouveaux lotissements ou encore corriger les libellés de voie mal orthographiés dans le cadastre. "Auparavant, elles devaient aller renseigner des bases en silo détenues par la DGFIP (Direction générale des finances publiques, ndlr), La Poste, Google Maps, les SDIS (Services départementaux d'incendie et de secours, ndlr) ou encore par les opérateurs télécoms évidemment. Au total, elles devaient réaliser entre 20 et 30 signalements pour chaque nouvelle adresse. Ce qui se révélait infaisable à l'échelle des petites collectivités qui sont les plus nombreuses", commente Ariane Rose. "Avec notre nouvelle base d'adresses, elles n'ont plus qu'une déclaration à faire, sachant que nous nous engageons à transférer les données à tous les acteurs tiers." Résultat aujourd'hui : 23 500 communes mettent à jour la base de données Adresses Nationales. Ce qui correspond à une couverture d'environ 74% de la population.
Dans la foulée de ce premier projet, le périmètre d'Ariane Rose a évolué. Elle est désormais en charge de tous les chantiers de l'incubateur de l'ANCT portant sur la data en lien avec les collectivités. En plus de son projet initial, elle gère un projet d'accompagnement des communes dans la gestion du Plan Corps de Rue Simplifié qui vise à pallier l'endommagement des réseaux lors de travaux sur la voirie. Elle pilote également l'application l'uMap, une solution de cartographie à destination des collectivités locales. Enfin, elle a en charge le chantier Données et territoires qui a pour but d'accompagner les agents publics des collectivités et de l'Etat territorial dans l'utilisation des données. "C'est dans le cadre de cette initiative que nous avons découvert Grist, le tableur open source désormais intégré à la suite numérique de l'Etat", indique Ishan Bhojwani.
Les projets pilotés par Ariane Rose sont loin d'être isolés au sein de l'incubateur de l'ANCT. Au total, ce dernier a donné naissance à 21 services numériques. "Au-delà des projets que je porte, il met notamment en œuvre la suite territoriale, une adaptation de la suite bureautique de la Dinum qui cible les collectivités. L'incubateur travaille également avec l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information pour proposer aux petites collectivités une messagerie, un service de stockage en ligne et un nom de domaine sécurisés", détaille Ariane Rose. Autre axe de travail : la mise en œuvre d'un service d'accompagnement numérique sur-mesure pour accompagner les collectivités dans leur expression de besoins en solutions numériques. "Dans cette perspective, nous faisons le lien avec les opérateurs de services publics numériques qui, au niveau des départements, proposent des services IT mutualisés à destination des collectivités. Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec les associations d'élus et de collectivités", complète Ariane Rose.