Ces start-up en route pour ubériser Dropbox grâce à la blockchain

Ces start-up en route pour ubériser Dropbox grâce à la blockchain De nouveaux acteurs construisent des plateformes à base de chaînes de blocs pour orchestrer le partage d'espaces disques inutilisés. Un concept qui devrait faire chuter les coûts.

En dépit de leurs performances sans cesse accrues, les offres cloud traditionnelles de partage de fichiers (Box, Dropbox, Google Drive, Microsoft OneDrive...) ou de stockage (Amazon S3, Azure Storage...) ont aussi leurs limites. Leurs utilisateurs sont dépendants de la bande passante et de la disponibilité du service. Recourir à ces solutions pose par ailleurs la question de la confidentialité des données à l'heure du RGPD.

Depuis quelques années, un nouveau concept de stockage de fichiers est apparu dans le sillage des blockchains. Des start-up comme Filecoin, Storj, Sia, et MaidSafe ont choisi de recourir à des chaînes de blocs pour proposer un mode d'hébergement décentralisé des documents. Ces offres s'adossent en général à des briques open source. Le concept rappelle celui des Torrents et des réseaux peer-to-peer qui ont connu leur heure de gloire dans les années 2000 pour le téléchargement (pas toujours légal) de films ou de musiques. Les fichiers sont cryptés, découpés en morceaux, puis dupliqués sur plusieurs disques durs pour assurer la résilience du système et limiter les risques de piratage. Le détenteur du document dispose d'une clé (privée) pour le recomposer. Théoriquement, il est ainsi le seul à pouvoir y accéder.

Ces applications décentralisées (ou Dapp, pour decentralized application) s'appuient ainsi sur les capacités de stockage inutilisées des clients. A ces derniers de décider du volume d'espace disque qu'ils souhaitent louer à la communauté sur leurs PC, serveurs ou périphériques d'archivage. Ils reçoivent en contrepartie des jetons qui leur permettent ensuite de payer tout ou partie des services cloud auxquels ils ont recours sur le réseau. 

Storj, le leader

Du fait de son ancienneté (qui remonte à 2014) et de sa base installée, Storj (prononcez "storage") fait figure de leader sur le créneau du stockage décentralisé. Storj Lab, la société derrière cette plateforme open source, revendique un réseau de plus de 150 000 machines réparties dans 200 pays. Parmi ses références clients, on relève le moteur de recherche décentralisé BitCave.

Storj a fait le choix d'une tarification simple de 0,015 dollar par Go et par mois pour le stockage, auquel s'ajoute 0,05 dollar par Go téléchargé pour la bande passante. La start-up a noué un partenariat avec le client FTP Filezilla (15 millions d'utilisateurs mensuels). Les adeptes de Storj peuvent ainsi utiliser ce logiciel pour gérer envoi et partage de fichiers. Storj s'est aussi rapproché de CapLinked, un éditeur spécialisé dans le partage d'informations confidentielles entre entreprises. Gage de crédibilité, Ben Golub, ancien PDG de Docker, a récemment rejoint Storj.

Sia, challenger économique

Sia est un concurrent sérieux de Storj. Proposée par la société américaine Nebulous, la plateforme a été lancée en 2015. Affichant une capacité de stockage de 4,5 Pb, Sia fait appel à sa propre blockchain et utilise des contrats intelligents (smart contracts) pour gérer les transactions entre loueurs et consommateurs d'espaces de stockage. La start-up a mis au point sa propre crypto-devise (SiaCoin) pour servir de monnaie d'échange entre les deux partis.

Avant d'être uploadé sur Storj, chaque fichier est divisé en 30 segments. Côté cryptage, la plateforme utilise l'algorithme open source Twofish. Elle recourt aussi à une technologie de hash, Merkle tree, comme preuve de stockage. Ciblant en priorité les entreprises, Sia affirme atteindre des débits supérieurs à 100 Mbit/s et être en mesure de gérer des dizaines de milliers de fichiers. 

Selon sa feuille de route technique, Sia compte s'étendre à la gestion de la récupération de données après sinistre. Objectif affiché : devenir un concurrent sérieux du service de stockage S3 d'Amazon d'ici 2020. Au niveau tarification, ses prix varient en fonction de l'offre et de la demande. Pour l'heure, Sia affiche un tarif global au To inférieur à 2 dollars par mois, contre 12,50 dollars pour 2 To pour la version standard de Dropbox Business et 24 dollars pour AWS S3 (sur la zone Paris). C'est également nettement moins cher que chez Storj.

Filecoin, le nouvel entrant

Filecoin a suscité un engouement médiatique l'été dernier en réalisant une des plus grosses ICO de l'histoire. La start-up a levé 257 millions de dollars en convertissant sa crypto-monnaie, le Filecoin, en billets verts. Cette levée de fonds a aussi associé des investisseurs traditionnels tels que Sequoia Capital, Andreessen Horowitz ou Union Square Ventures. Une manne qui laisse augurer de belles perspectives car, pour l'heure, Filecoin reste à l'état de projet.

La jeune pousse appartient à la société Protocol Labs, à l'origine du protocole IPFS (InterPlanetary File System). Fonctionnant sur le principe du peer-to-peer, IPFS se veut une alternative au fameux HTTP. La technologie servira de socle à la futur plateforme. Quant à la crypto-monnaie de la start-up, elle permettra de rétribuer les mineurs qui mettront à disposition leur espace de stockage.

MaidSafe, un écosystème ambitieux

Tout comme Filecoin, MaidSafe en est encore au stade du développement. MaidSafe qui veut dire "Massive Array of Internet Disks - Secure Access For Everyone" reprend un grand nombre d'éléments des plateformes concurrentes. Cette plateforme fait appel à un réseau autonome. Via des smart contracts, elle orchestre les relations entre ses membres sans intervention humaine.

MaidSafe s'appuie sur sa propre preuve de travail. Baptisée Proof of ressource, elle arbitre la répartition des fichiers en fonction notamment du niveau de CPU, de la bande passante et de l'espace disque des membres du réseau. MaidSafe voit les choses en grand. Avec pour objectif de s'entourer d'un écosystème de partenaires, la start-up propose son propre navigateur web (Safe Browser) aux côtés d'un gestionnaire d'hébergement web.

Enfin, MaidSafe promet les prix les plus bas possibles. Pas de tarifs fixés à l'avance, la plateforme se propose de les ajuster en permanence en fonction de la demande utilisateur et des ressources disponibles.