MongoDB Atlas, la base de données cloud qui fait même de l'ombre à AWS

MongoDB Atlas, la base de données cloud qui fait même de l'ombre à AWS La plateforme enregistre un chiffre d'affaires annuel en hausse de 185%. Fort de 14 200 organisations clientes, elle enregistre un revenu annuel récurrent de 175 millions de dollars.

S'il y a un service cloud de base de données qui cartonne, c'est bien MongoDB Atlas. Basé sur le serveur NoSQL open source MongoDB, il est commercialisé par la société américaine éponyme depuis mi-2016.  Sa montée en puissance est fulgurante. A l'issue de son troisième trimestre fiscal 2020, clos au 31 octobre dernier, MongoDB Inc (cotée au Nasdaq depuis octobre 2017) annonce 14 200 organisations ayant souscrit à ce service, contre 6 200 un an auparavant.

Comme attendue, MongoDB Atlas automatise l'infrastructure IT sous-jacente : orchestration des ressources informatiques, réplication entre data centers, gestion de la tolérance aux pannes... Disponible, au choix, sur le cloud d'Amazon (AWS), de Microsoft (Azure) ou de Google (GCP), Atlas s'érige sous la forme d'une offre freemium. Face à un forfait gratuit conçu pour tester quelques clusters, deux abonnements payants ouvrent accès à des fonctions essentielles au déploiement telles la gestion de l'isolation réseau ou la gestion multirégions.

En termes de chiffres d'affaires, la courbe de croissance d'Atlas suit celle des clients. Sur août, septembre et octobre 2019, MongoDB Inc. enregistre 43,8 millions de dollars tirés de cette offre, en hausse de 67% en un an. Atlas représente désormais 40% du CA trimestriel de la société, qui s'élève à 109,4 millions de dollars sur la même période. Au 31 octobre 2019, MongoDB Atlas enregistre une croissance globale de 185% d'une année sur l'autre. Quant à son revenu annuel récurrent, c'est-à-dire son chiffre d'affaires tenant compte des souscriptions contractualisées, il s'élève à 175 millions de dollars.

Pourquoi un tel engouement ? Il s'explique d'abord par le modèle orienté documents de la base MongoDB. Une matrice qui évite de pré-structurer les données. Ce qui permet du même coup de développer ou redévelopper des applications plus rapidement. On passe outre la complexité des bases relationnelles traditionnelles. Autre avantage : l'architecture distribuée de MongoDB, en mode "maître-esclave", est idéale pour encaisser les forts pics de trafic.

Applications web, mobiles, gestion de contenu, de catalogue, intelligence artificielle... MongoDB est finalement reconnue comme une base générique. En cinquième position de l'indice DB-Engines des serveurs de données les plus populaires, derrière Oracle Database, MySQL, SQL Server et PostgreSQL, elle répond à la quasi-totalité des besoins couverts par ces bases SQL, en particulier depuis sa version 4.0 sortie en juillet 2018, qui prend en charge les transactions ACID multidocuments.

Un hébergement sur AWS, Azure et GCP

Au total, MongoDB Atlas est présent sur 17 régions cloud à travers le monde, tous providers confondus. "C'est une autre raison de son succès", reconnait Mat Keep, directeur senior de la stratégie de plateforme de MongoDB Inc. En Europe, le service est proposé sur AWS à Dublin et Francfort, sur Microsoft Azure à Dublin mais également à Amsterdam et, enfin, sur Google Cloud Platform en Belgique.  "Vous pouvez choisir parmi ces fournisseurs celui qui vous convient le mieux, puis sélectionner chez lui une ou plusieurs régions d'hébergement en fonction des besoins. Sachant que vous aurez toujours la possibilité de migrer d'un cloud à l'autre, l'infrastructure d'Atlas étant 100% standard à la différence des services des clouds propriétaires", argue Mat Keep.

MongoDB Atlas est présent sur 17 régions cloud à travers le monde (tous providers confondus). Ici, les régions où Atlas est disponible sur AWS. © JDN / Capture

Accessible via une plateforme managée par MongoDB, Atlas est en parallèle commercialisé sur les places de marché d'AWS et de Microsoft Azure. Chez Google, le service n'est pas seulement disponible depuis la marketplace de GCP. Il est aussi intégré à sa console de pilotage et par conséquent à toutes les ressources GCP associées autour de la gestion des accès, du monitoring, des infrastructures Kubernetes, Tensorflow...

L'open source pour protéger la technologie

En vue de protéger Atlas d'attaques anticoncurrentielles, MongoDB a décidé fin 2018 de changer de licence. A l'AGPL (pour Affero General Public License), l'éditeur a préféré la SSPL (Server Side Public License). "Rien ne change pour les développeurs. Ils ont toujours la possibilité d'accéder au programme de la base, de le modifier, de le redistribuer", explique Mat Keep. Seule différence : Si un provider cloud souhaite commercialiser MongoDB sous forme de service managé, il devra redistribuer tout changement de code réalisé. Un moyen pour MongoDB de se prémunir contre d'éventuels compétiteurs qui seraient tentés de s'approprier sa technologie open source sans contribuer à son développement.

"La gestion du multicloud est
dans la feuille de route"

Bien conscient de la popularité de MongoDB, AWS a répliqué en janvier 2011 en lançant DocumentDB, sa propre offre cloud de base de données orientée documents. Cerise sur le gâteau, cette dernière est compatible avec MongoDB. "DocumentDB démontre que l'API et le data model de MongoDB sont devenus des standards industriels", se félicite Mat Keep, avant de pondérer : "DocumentDB s'inspire des interfaces de MongoDB 2.6 qui remonte à 2014, et échoue à 61% des tests de compatibilité de notre API." Résultat, il sera nécessaire de réécrire une application MongoDB en vue de la migrer vers DocumentDB.

Comme souvent dans un secteur IT habitué à la coopétition, Amazon et MongoDB sont parallèlement partenaires. "Amazon figure parmi les tous premiers distributeurs d'Atlas via sa marketplace", reconnait Mat Keep. "Nos équipes techniques travaillent en outre main dans la main pour optimiser le portage d'Atlas sur AWS."

Un PaaS orienté data jusqu'à l'edge

Au chapitre de ses dernières évolutions, Atlas a été équipé début décembre d'une brique de recherche. Baptisée Atlas Full-Text Search, elle s'adosse au moteur d'indexation open source Apache Lucene. Objectif de MongoDB : fournir aux utilisateurs d'Atlas un point d'accès universel à leurs sources de contenus qu'elles soient structurées ou non-structurées, basées sur Atlas ou sur un autre système, en mode cloud ou pas. Toujours début décembre, Atlas s'est vu enrichir d'une surcouche orientée lac de données. Baptisée MongoDB Atlas Data Lake, elle permet de recourir au MongoDB Query Language pour requêter des data stockées sur Amazon S3, quel qu'en soit le format (Avro, Bson, CSV, Json, Parquet, TSV). "Le portage d'Atlas Data Lake sur Microsoft Azure et Google Cloud Platform est prévu", précise Mat Keep.

Pour la suite, MongoDB entend doter Atlas d'une architecture cross-cloud. Pour l'instant, la gestion de bases Atlas miroirs n'est en effet possible qu'au sein d'un même cloud, Azure, AWS ou GCP. "La gestion multicloud est dans la feuille de route", confirme Mat Keep. L'éditeur planche aussi sur MongoDB 4.4 dont les premières bêtas devraient sortir prochainement. "Pour l'occasion, le cœur de la base de données va évoluer tout comme l'indexation et la gestion du dimensionnement", ajoute Mat Keep. Dès sa sortie, MongoDB 4.4 sera évidemment disponible sur Atlas. Autre chantier évoqué : l'intégration de la technologie issue du rachat de Realm, opération bouclée en avril dernier pour 39 millions de dollars. "Cette base de données mobile va devenir la couche edge d'Atlas. L'ambition est de tendre vers un PaaS orienté data sans couture couvrant l'intégralité du réseau, depuis le cloud jusqu'à l'IoT", conclut Mat Keep.