Avis d'enquête favorable pour le projet de data center géant de CloudHQ
Il donnera naissance au plus gros centre de données de France. Une infrastructure qui comptera 48 salles informatiques s'étalant sur 66 000 m², pour une consommation totale de 148,8 MW.
[Mis à jour le lundi 29 novembre 2021 à 16h55] Les conclusions de l'enquête publique portant sur le projet de centre de données géant de CloudHQ dans l'Essonne viennent d'être publiées. Le commissaire chargé du dossier donne un avis favorable à la demande de permis de construire (voir le document ci-dessous que le JDN a pu se procurer). Idem pour la demande d'autorisation environnementale. Dans son rapport, le commissaire salue notamment l'indice d'efficacité énergétique ciblé, ou power usage effectiveness (PUE). Un indicateur de qualité qui s'est imposé comme une référence du secteur. Il correspond au rapport entre l'énergie annuelle totale consommée par le data center, en comprenant ses systèmes de refroidissement (historiquement très énergivores), et celle utilisée uniquement par ses équipements informatiques. Le groupe américain compte atteindre un PUE annualisé de 1,23. "Ce qui est nettement meilleur que le PUE moyen des centres de données en France qui est aujourd'hui de 1,80", souligne le commissaire. Suite à ces avis favorables, la ville des Lisses, commune où doit être installé le futur centre de données, pourrait donner son accord au permis de construire. Plus aucun obstacle administratif ne s'y oppose.
Conclusion du commissaire enquêteur sur la demande de permis de construire
Le projet donnera naissance au plus gros data center de France. Porté par le fournisseur américain de centres de données CloudHQ, il prévoit la construction dans l'Essonne de deux bâtiments équipés chacun de 24 salles informatiques, le tout totalisant 66 000 m². Une taille largement supérieure aux 40 000 m² du data center dont Interxion a lancé la construction à la Courneuve et censé être le plus grand de l'Hexagone. Le JDN a pu se procurer l'avis de la Mission régionale d'autorité environnementale d'Île-de-France (MRAe) sur ce gigantesque projet.
CloudHQ entend construire son infrastructure dans la commune des Lisses, à trente kilomètres au sud-est de Paris. Le site visé ? Le vaste parc d'activités Léonard de Vinci, comptant 32 hectares, situé dans la zone d'aménagement concertée (ZAC) Les Folies à l'ouest de la ville. En bordure de la commune de Vert-le-Grand, la parcelle ciblée par CloudHQ s'étend sur 13,7 hectares, dont 12 hectares sont actuellement composés de cultures agricoles. Les habitations les plus proches se dessinent à l'horizon à quelque 550 mètres au nord-est.
Sans surprise, CloudHQ projette deux lignes très haute tension (de 225 kilovolts). L'une étant conçue comme liaison principale, la seconde comme liaison de secours. Souterraines et connectées au même poste de RTE, elles seront raccordées à deux sous-stations électriques installées sur place, une par bâtiment, chacune composée de trois transformateurs (de 225 kV/33 kV). "La puissance maximale délivrée par RTE sur le site représente 240 mégawatts (MW), soit 120 MW par bâtiment", précise la Mission régionale d'autorité environnementale d'Île-de-France. Quant à la capacité informatique totale du site, elle est estimée à 148,8 MW. Une puissance, plus importante que les 105 MW revendiqués à date par Data4 sur son campus de Paris-Saclay (qui se dit le plus grand site européen).
114 groupes électrogènes
Le projet prévoit d'installer les deux sous-stations électriques sur une zone dédiée de plus d'un hectare (10 900 m²). Quant aux groupes électrogènes nécessaires pour éviter la panne en cas de coupure d'alimentation chez RTE, CloudHQ compte en installer 114, soit 57 par bâtiment. Un parc qui est conçu pour produire jusqu'à 232,5 MW. Réparties sur quatre zones du site, 36 cuves de fioul domestique de 70 m³ chacune sont envisagées pour les alimenter, représentant 2 520 m³ au total. Des onduleurs associés à des batteries seront là pour prendre le relais en cas de rupture de RTE, le temps que les groupes électrogènes démarrent.
Pour maintenir la température des serveurs, le refroidissement par air ambiant (ou free-cooling) est inscrit dans la roadmap. L'installation de 104 groupes froids sur les toits, soit 52 par bâtiment, est néanmoins planifiée.
La durée du chantier est estimée à 22 mois pour le premier bâtiment. Une tranche qui englobe la réalisation des infrastructures nécessaires à son fonctionnement : gros œuvre, raccordement électrique, déploiement des transformateurs, aménagement des espaces extérieurs. Quant à sa mise en service, elle sera progressive, par groupe de quatre salles informatiques. Le second bâtiment, lui, nécessitera entre 22 et 30 mois de travaux supplémentaires. La feuille de route évoque une exploitation complète du site au premier semestre 2031 avec une équipe de quelque 90 agents présents sur place en permanence.
La MRAe note qu'"après avoir dans un premier temps refusé son agrément au projet en raison de l'absence de récupération de la chaleur produite par les serveurs, le préfet de région a accordé cet agrément le 11 janvier 2021, en considérant que le territoire s'engage à récupérer la chaleur […] émise par le data center et prévoit notamment son raccordement au futur réseau de chaleur de Corbeil-Essonnes".
Qui se cache derrière CloudHQ ?
Basé à Washington, CloudHQ est un opérateur de data centers créé en 2016 par Hossein Fateh. Une figure du secteur : le CEO de CloudHQ est le cofondateur et ancien PDG de Pont Fabros Technology, un acteur historique de la colocation de centres de données. La société a été acquise en 2017 par son concurrent Digital Realty Trust pour 7,6 milliards de dollars.
Avec pour objectif de fournir des infrastructures d'hébergement aux hyperscalers, CloudHQ affiche une feuille de route pharaonique. Le groupe revendique des projets de data centers géants en Virginie (dans les faubourgs de la ville de Manassas), mais aussi dans les régions de Londres, de Frankfort, de Sao Paulo... L'entreprise lorgne également l'Asie-Pacifique. Son défi ? Atteindre une infrastructure de 1 800 MW dans le monde. Soit l'équivalent de la production moyenne de trois réacteurs nucléaires et de la consommation de 1,2 million de foyers environ. Le JDN a contacté la direction de CloudHQ qui n'a pas répondu à nos sollicitations.