Pourquoi les hôpitaux doivent considérer la cybersécurité comme une urgence vitale
La cybersécurité est devenue une ligne de défense essentielle pour la sécurité des patients, la confiance médicale et la résilience même de notre système de santé.
Lorsque les systèmes informatiques d’un hôpital s’effondrent sous l’effet d’une cyberattaque, les conséquences sont immédiates, concrètes et profondément humaines. Les services d’urgence doivent rediriger les patients, des traitements vitaux sont retardés et des données médicales sensibles risquent d’être exposées au plus offrant. L’Europe a déjà vu comment des ransomwares peuvent paralyser des établissements entiers, et pourtant, trop d’institutions de santé continuent de sous-estimer l’ampleur de la menace. La cybersécurité est devenue une ligne de défense essentielle pour la sécurité des patients, la confiance médicale et la résilience même de notre système de santé.
Les cyberattaques se multiplient et gagnent en sophistication
Les attaques informatiques ciblant les hôpitaux se multiplient en France et à travers l’Europe, révélant la fragilité du secteur face à des vecteurs de plus en plus sophistiqués. L’incident récent survenu à l’hôpital de Saint-Étienne durant l’été 2025, illustre parfaitement ces risques.
Entre janvier 2021 et mars 2023, plus de la moitié des incidents recensés par l’ENISA ont touché directement des prestataires de soins, avec près d’un hôpital sur deux étant ciblé. Les ransomwares constituent une menace prédominante ; ils bloquent l’accès aux systèmes et peuvent entraîner le vol ou la divulgation de données. Selon le rapport ENISA, 42 % des incidents enregistrés ont touché les hôpitaux européens, suivis des autorités sanitaires et agences (14 %) et de l’industrie pharmaceutique (9 %). Les attaques combinent souvent phishing et ransomwares, illustrant le potentiel de monétisation via l’extorsion.
Quand les attaques mettent en péril les soins
Les cyberattaques perturbent l’ensemble du fonctionnement hospitalier, bien au-delà de la simple perte de données. Transferts de patients, reports d’interventions et surcharge du personnel deviennent rapidement le quotidien des établissements touchés. En juin 2024, au Royaume-Uni, une attaque par rançongiciel visant un prestataire chargé des analyses de sang et des transfusions pour de nombreux hôpitaux publics a ainsi entraîné de graves retards dans la prise en charge et contribué au décès d’un patient – une première mondiale officiellement reconnue.
Au-delà de l’impact humain, les conséquences financières sont également importantes. Selon l’ENISA, le coût moyen d’un incident majeur pour un hôpital européen dépasse 2 millions d’euros, incluant la restauration des systèmes, la gestion de crise et la perte de productivité. La capacité des établissements à évaluer leurs risques reste néanmoins, limitée. Selon le NIS Cooperation Group, 95 % des organisations de santé rencontrent des difficultés pour identifier et prioriser les menaces, et 46 % n’ont jamais réalisé d’analyse approfondie. Cette vulnérabilité structurelle complique la prévention et accroît l’exposition aux attaques.
Perdre la confiance, c’est perdre des patients
Les incidents cyber dans la santé ne se limitent pas à des perturbations opérationnelles, ils érodent la confiance des patients. Quand ces derniers doutent que leurs données soient protégées, c’est tout le système de santé qui en pâtit. Or, cette confiance est indispensable pour que la prévention et les soins soient efficaces ; sans elle, la participation aux programmes essentiels, tels que ceux de prévention ou de dépistage à grande échelle, peut chuter.
La fuite récente dans un laboratoire néerlandais en est un exemple concret. Les données sensibles de près d’un demi-million de femmes ont été exposées, et oncologues comme autorités sanitaires ont souligné l’impact potentiel sur les programmes de dépistage. Cela rappelle que la cybersécurité protège non seulement les systèmes, mais aussi le lien vital entre patients et institutions de santé.
Des réponses nationales et européennes pour inverser la tendance
Pour faire face à ces enjeux, plusieurs initiatives ont été mises en place à l’échelle nationale et européenne. En France, le gouvernement a lancé le programme CaRE (Cyberaccélération et résilience des établissements) pour la période 2023-2027. Ce plan vise à intégrer la cybersécurité dans la gouvernance des hôpitaux, renforcer les moyens humains et financiers, développer la sensibilisation des équipes et déployer des mesures opérationnelles de protection et de surveillance.
Toutefois, la Cour des comptes a souligné plusieurs limites préoccupantes ; sur les 750 millions d’euros prévus sur cinq ans, seuls 223 millions ont réellement été mobilisés, et le financement n’est assuré que jusqu’à fin 2024, ce qui fragilise la pérennité du programme. L’institution appelle donc à garantir son achèvement, à assurer un budget durable et à renforcer la mutualisation ainsi que la gouvernance pour améliorer l’efficacité des actions.
De plus, au niveau européen, la mise en place de la directive NIS2 impose des obligations strictes, incluant audits réguliers et plans de continuité. L’ANSSI fournit des recommandations détaillées pour sécuriser les systèmes et préparer la réponse aux incidents. En parallèle, des initiatives collaboratives, comme le réseau Hôpital Numérique, encouragent le partage de bonnes pratiques et la mutualisation des ressources.
L’humain, maillon décisif de la cybersécurité
Chaque cyberattaque impacte directement patients et personnel. La nécessité d’improviser avec des dossiers papier, le stress généré et la surcharge de travail augmentent le risque d’erreurs médicales. Cultiver une culture de cybersécurité, former les équipes et organiser des exercices réguliers sont essentiels pour limiter ces risques.
Investir dans la prévention et dans des technologies avancées reste indispensable pour protéger les systèmes, garantir la sécurité des patients et préserver la confiance du public. La cybersécurité s’impose ainsi comme un pilier central de la mission de soin.
Parmi les mesures technologiques clés, les solutions EPP (Endpoint Protection Platform) et EDR (Endpoint Detection & Response) constituent aujourd’hui des piliers essentiels. L’EPP assure une première ligne de défense en bloquant de manière proactive les menaces les plus courantes, telles que les malwares, le phishing ou l’exploitation de vulnérabilités. L’EDR vient compléter cette protection en offrant des capacités avancées de détection et de réponse face aux attaques plus sophistiquées. Pour être pleinement efficaces dans un environnement hospitalier, ces solutions doivent couvrir l’ensemble des systèmes d’exploitation, identifier aussi bien les menaces connues qu’inconnues, préserver les performances des systèmes, garantir une interopérabilité optimale et permettre la personnalisation des règles de détection.