Marc Lolivier (Fevad) "Il faut un Grenelle de la transition numérique du commerce"

Le délégué général de la Fevad analyse avec prudence la situation du e-commerce français, soumis à l'évolution du contexte sanitaire.

JDN. Comment se porte l'e-commerce français en cet été 2020 ?

Marc Lolivier, délégué général de la Fédération du e-commerce et de la vente à distance. © Fevad

Marc Lolivier. Les mois de mars et avril ont été compliqués mais la situation s'est rétablie en mai et la dynamique s'est poursuivie en juin, ce qui est plutôt positif. Globalement, l'accélération des ventes sur Internet a perduré au-delà du déconfinement. Je pense que le e-commerce a permis d'éviter un naufrage collectif et les entreprises, notamment celles qui étaient fermées, ont accéléré leur transformation digitale ce qui leur a permis de survivre à cette crise sans précédent. 

A quoi peuvent ressembler les perspectives pour le second semestre ?

Il y a une grande incertitude sur la rentrée compte tenu de la situation sanitaire mais ce qui est sûr, c'est que les ventes restent dynamiques drainées, par de nouvelles habitudes de consommation. Après la sidération et le choc de consommation au début du confinement, les ventes ont progressé, avec un pic de commandes les deux dernières semaines du confinement, puis la réouverture des magasins a été marquée par un fléchissement de la croissance. Mais les ventes de produits sont restées à un niveau élevé car l'expérience en magasin reste encore très contraignante. On s'aperçoit donc qu'Internet continue de jouer un rôle important. Mais si les choses se dégradent, l'impact psychologique et le moral des ménages pèseront sur la consommation.

La mode, le textile et le tourisme ont souffert pendant la crise. Comment peut évoluer la situation de ces secteurs dans les mois à venir ?

Il est vrai que ceux qui ont très bien performé, ce sont les magasins alimentaires qui ont réussi à transformer une grande partie de leurs ventes sur Internet et qui ont très largement contribué à la croissance. Mais nous savons que la situation varie en fonction des secteurs. Certains continueront à être impactés durablement comme le tourisme. A l'inverse, la mode, le textile et la décoration ont repris à partir des mois d'avril et mai là où le tourisme a continué à être touché. Si la situation sanitaire se dégrade, les catégories non essentielles risquent de souffrir autant que durant la crise au printemps. Et si la situation sanitaire est maîtrisée, Internet restera une option intéressante pour les consommateurs qui ne souhaitent pas prendre de risque en magasin. 

Que vous inspire les aides aux entreprises apportées par l'Etat ?

Je pense qu'il faut maintenir ces aides surtout pour les entreprises les plus fragilisées, quel que soit le secteur, car nous ne sommes pas sortis de cette situation. Mais je pense que l'Etat doit accompagner la transition numérique des PME françaises. Des mesures sont prévues dans le cadre du plan de relance en faveur du commerce de proximité, de l'artisanat et des indépendants, mais nous pensons qu'il faudrait envisager un Grenelle de la transition numérique du commerce. Il faut que ce chantier soit placé en haut de la pile car il en va de la capacité pour les PME et les commerces de proximité de résister à ce type de crise. Le digital est un levier de développement pour les entreprises et une assurance vie si jamais la crise sanitaire doit prendre une dimension catastrophique. 

Avant de devenir délégué général de la Fevad en 2002, Marc Lolivier a occupé le poste de directeur des affaires juridiques Europe au sein de Reader's Digest Association, un magazine mensuel familial et généraliste, entre 1995 et 2002.