Carole Walter (Come&Stay) "L'e-mail marketing reste le support de référence des messages transactionnels"

La fondatrice et présidente de Come&Stay défend la vigueur de l'e-mail, face à l'essor des réseaux sociaux et du mobile, souvent accusés de tuer le courrier électronique.

JDN. L'emailing va-t-il succomber aux réseaux sociaux et aux smartphones ?

Carole Walter. On a souvent annoncé à tort la mort de l'e-mailing, d'abord face à l'émergence des blogs, puis des réseaux sociaux ou du mobile. Nous assistons de manière cyclique à un désintérêt de certaines marques vis-à-vis de l'e-mail marketing. La réalité est que ces faire-part de décès permanents poussent les acteurs du secteur à innover constamment pour renouveler l'intérêt des annonceurs pour ce levier marketing. L'e-mail est le phénix du marketing direct, il renaît de ses cendres à chaque fois qu'il est donné pour mort.

Les réseaux sociaux occupent une part de plus en plus importante dans la façon dont les gens communiquent en ligne, notamment au détriment de l'usage du mail...

L'e-mail ne s'oppose pas aux réseaux sociaux, pas plus qu'au mobile. Il est d'ailleurs intéressant de noter le parallélisme d'usage qu'il existe entre ces trois outils. On compte en France 40 millions d'adresses e-mails. 68% des internautes consultent quotidiennement le ou leurs comptes. Facebook rassemble 25 millions de membres en France dont les deux tiers se connectent également quotidiennement au réseau social. Une grande part d'entre eux utilise le mail pour gérer leur correspondance sur Facebook. La France compte enfin 40 % de possesseurs de smartphones et près de 30% disposent de lecteurs de mails sur mobile. L'association e-mail-réseaux-sociaux et mobile est plutôt logique.

Les réseaux sociaux n'ont pas impacté la façon dont les annonceurs communiquent par e-mail ?

L'émergence des réseaux sociaux a accentué une tendance déjà forte, celle de l'usage de l'e-mail marketing comme un outil destiné à véhiculer des messages plus transactionnels qu'éditoriaux. Les réseaux sociaux constituent un bon environnement pour une communication plus émotionnelle, davantage dans l'instant. L'e-mail est davantage le média de la transaction, celui via lequel vous recevez des offres ou des confirmations de commandes. C'est également par mail que la correspondance "sérieuse" s'effectue, pas sur les réseaux sociaux. Nous ne constatons par ailleurs pas de transferts de budgets e-mailing vers Facebook.

Comme beaucoup d'autres acteurs de l'e-mailing, vous avez pourtant mis un pied dans le social en rachetant une agence spécialisée, Social Mix Media...

Nous pensons qu'e-mail et social ne s'opposent pas mais se complètent. Comme l'e-mail, le social est l'un des seuls supports digitaux vraiment relationnel. Facebook donne non seulement de la chair à une communication par e-mail mais peut également être une source d'alimentation. Environ 30% des membres du réseau social qui s'inscrivent à un jeu ou à un événement Facebook acceptent de continuer une relation avec l'annonceur par e-mail. L'e-mail marketing est plus rentable couplé au social.

Cette acquisition vise-t-elle à diversifier vos sources de recrutement de contacts e-mails ?

Notre premier objectif est d'élargir les moyens à notre disposition pour maintenir un lien avec les internautes. Nous ne mettons pas un pied dans le social pour collecter de l'e-mail, ce ne serait pas rentable. Cependant, il nous arrive occasionnellement de le faire.

En quoi l'e-mailing se renouvelle-t-il ?

D'une manière générale, les capacités de ciblage ont été largement améliorées afin de contacter les consommateurs à bon escient. Le ciblage repose désormais davantage sur un mix de données déclaratives et comportementales. Face à un média submergé, il faut savoir être pertinent. Le retargeting par e-mail se développe également fortement, notamment car il offre des taux de clics vingt fois plus élevés qu'une offre en ciblage traditionnel.

Comment l'essor de l'Internet mobile impacte l'e-mail marketing ?

Le mobile est surtout utilisé pour une consultation rapide et un tri des e-mails que l'on souhaite lire plus tard sur ordinateur. Il est en revanche encore peu utilisé par les internautes comme levier d'action après la réception d'une campagne e-mail. Cette situation est notamment due à la rareté des landing pages adaptées au mobile. Il y a un réel travail à mener sur ce point, que ce soit par les agences ou les marques elles-mêmes. Il n'est par ailleurs pas encore possible de renvoyer les mobinautes d'un e-mail directement vers une application mobile. Cette absence de fluidité n'a de sens ni pour les marques, ni pour les consommateurs. Je pense cependant que les acteurs du mobile adopteront progressivement des solutions favorisant une navigation sans coutures.

Diplômée HEC 91, Carole Walter a commencé sa carrière dans la grande distribution en prenant à 24 ans la direction d'un supermarché du groupe Casino. Elle rejoint ensuite Catalina Marketing France pour gérer le développement en France de Retail Direct. Elle fonde Come&Stay en 2000 dont elle est la PDG. Depuis juillet 2011, elle est également membre du conseil d?administration de l?Acsel.