Le marketing mix modeling revient sur le devant de la scène

Le marketing mix modeling revient sur le devant de la scène Le marketing mix modeling est peut-être le meilleur moyen de connaître l'impact des campagnes publicitaires dans un monde cookieless. Mais la méthode n'est pas à la portée de tous les annonceurs…

Le marketing mix modeling (MMM) revient en force. Preuve de cet engouement, le nombre de leads MMM entrants a été multiplié par deux cette année chez Ekimetrics, pure player data qui accompagne des marques telles que L'Oréal, Accor, Shell et Danone. Mais de quoi parle-t-on ? Il ne s'agit pas, contrairement aux solutions d'attribution classique, d'analyser dans le détail le parcours de chaque internaute exposé à la campagne publicitaire. Mais plutôt d'adopter une approche statistique qui se base sur d'importants volumes de données qui ne dépendent ni des cookies, ni des navigateurs et encore moins du consentement des internautes, comme nous allons le voir.

"Avec des taux de consentement qui varient entre 60 et 70% et les limites déjà imposées par Apple et Mozilla, les solutions d'attribution collectent déjà de moins en moins de données"

De quoi en faire une option sérieuse pour venir compléter, voire remplacer des modèles d'attribution traditionnels dont les limites sont exposées par la disparition des cookies tiers. "Il est clair que les solutions d'attribution devront se réinventer d'ici 2023", prédit Guilhem Bodin, partner média et CRM chez Converteo. Et pas uniquement parce que Google a annoncé la disparition des cookies tiers de Chrome d'ici cette échéance. "Avec des taux de consentement qui varient entre 60 et 70% et les limites déjà imposées par Apple et Mozilla, les solutions d'attribution collectent déjà de moins en moins de données, ce qui augmente évidement le risque que ces dernières fournissent des analyses biaisées."

Akim Bellour, directeur des revenus d'Eulerian, le spécialiste français du multitouch attribution, observe déjà, au quotidien, cette complémentarité. "Nos données déterministes viennent nourrir les études de modélisation du marketing mix que nos annonceurs, comme la Française des Jeux et SFR, conduisent dans une logique de convergence entre online et offline." Pour mesurer l'impact des campagnes, le MMM s'intéresse d'abord à la variation des ventes ainsi qu'à toutes les données ayant pu avoir un impact sur ces résultats. On retrouve, dans le lot, les données macroéconomiques et sectorielles, comme l'état de l'économie, les pics de marché, la météo ou les effets de saisonnalité, le lancement de nouveaux produits par la concurrence ou le positionnement de la marque. Viennent ensuite les 4P –  la publicité (dont les investissements médias et les indicateurs de performance de chaque canal), les promotions, le placement (l'état de la distribution) et le prix.

Dernier carburant de ces algorithmes, les données CRM des marques sont de plus en plus souvent explorées. "Pour les annonceurs matures, disposant de bases de données CRM bien consolidées et mises à jour, le MMM peut expliquer les ventes par typologie de clients, qui seront plus ou moins réactifs à tel message ou canal média", explique Thibault Labarre, partner chez Ekimetrics. Les recommandations sur les stratégies à adopter pour améliorer ses ventes vont dans ce cas donner une vision globale par canal mais également par segment de clients prioritaires.

"Le plan média ne fait pas tout, plusieurs facteurs peuvent avoir un impact sur les ventes, comme les différences de prix, de gamme ou le lancement de nouvelles promotions"

C'est seulement après ce premier audit plus exhaustif que de nouvelles études peuvent se faire au fil de l'eau. L'importance de cette première étape tient à la nature du MMM. Même si le but est d'analyser l'impact des campagnes médias sur les ventes, on regarde tout ce qui peut en même temps influer sur ces résultats. "Le plan média ne fait pas tout, plusieurs facteurs peuvent avoir un impact sur les ventes, comme les différences de prix, de gamme ou le lancement de nouvelles promotions", prévient Thibault Labarre. C'est tout l'intérêt du MMM, "s'assurer qu'un facteur externe ne biaise pas les résultats, au risque d'avoir surestimé le rôle des médias".

La méthode a aussi ses limites. "Ce procédé étant probabiliste, il ne faut pas le prendre pour argent comptant mais tester ses recommandations et renouveler l'analyse dans une logique itérative", préconise Guilhem Bodin. De plus, pour que la modélisation statistique marche, deux éléments sont clés : le volume et la variété des données. L'annonceur doit disposer de beaucoup de données sur de longues périodes, entre deux et trois ans, du moins pour démarrer la première étude. Il est d'ailleurs encore fréquent que les acteurs du MMM accompagnent leurs clients dans la mise en place de procédés et technologies permettant la collecte et le traitement de toutes ces informations. Ensuite, pour que l'étude en vaille la peine, le mix marketing doit être varié. Cela explique pourquoi les annonceurs habitués à employer des stratégies d'achat média variées, intégrant online et offline, font davantage appel au MMM.

Mais contrairement à il y a une dizaine d'années, le MMM peut désormais fournir ses analyses et recommandations d'optimisation au fil de l'eau. "La puissance de calcul des modèles statistiques a beaucoup évolué pour répondre à des problématiques de plus en plus granulaires à condition que les données soient facilement disponibles et normalisées", ajoute Guilhem Bodin. Dans les cas des annonceurs disposant de bonnes bases de données, il faut compter trois mois pour recevoir les premiers résultats. Ensuite les modèles s'adaptent aux calendriers de prise de décision. "Dans l'automobile, on peut être amené à faire des mises à jours tous les mois", illustre Thibault Labarre.

Cet article est également publié dans Adtech News, supplément papier du magazine CB News réalisé par le JDN, dédié à l'adtech et au martech. Dans l'édition de novembre, un dossier sur la  blackbox de Google et Facebook, une interview du patron du média d'Essity France, une réflexion sur le marketing mix modeling, un focus sur Storyzy et le baromètre du programmatique