Web3 marketing ou marketing dans le web3 ?

On en entend moins parler, pourtant le web3 avance, plus lentement qu'escompté, mais les "uses cases" sont là. Les marques devront bientôt déployer leur marketing dans le web3.

Je reprends ici quelques perspectives que j'énonce dans la conclusion de mon dernier livre, Métavers Marketing, (Avril 2023, Eyrolles). J’arrive au terme de cet ouvrage dans lequel je décrypte ce qui s’annonce certainement comme le nouvel Internet et la suite logique du marketing dit “digital”. Nous en sommes sans doute encore au stade des balbutiements, mais il me semble évident que se dessine une nouvelle ère pour le marketing digital.

Que les marketeurs soient rassurés, les fondamentaux ne changent pas mais appellent à un abandon des mécaniques de déploiement basées uniquement sur le marketing de masse. Mes échanges avec les quelques experts du Web et Web3 confirment que nous sommes très clairement face à un changement de modèle, une révolution disent même certains.

Nous sommes confrontés à une évolution de la publicité et du marketing qui s'éloigne des approches traditionnelles où la répétition et le matraquage publicitaire règnent sans partage.

Les motivations des acteurs du web3 (offrir une alternative aux plateformes numériques) et de leurs contributeurs sont très différentes : ils ne sont pas simplement des utilisateurs, mais des collaborateurs.

Les annonceurs doivent donc comprendre cette différence et éviter de reproduire les pratiques issues du marketing de masse ou du web traditionnel (diffusion massive de bandeaux publicitaires ou de contenus sponsorisés sur les sites et les réseaux sociaux).

En ce qui concerne le métavers, nous sommes également dans un contexte d'utilisation différent de ce que nous trouvons actuellement sur le web, avec des flux de micro-contenus consommés passivement (comme à la télévision) entrecoupés de publicités. Le métavers propose des expériences plus immersives, plus riches qui motivent les utilisateurs à devenir acteurs en créant un avatar et en explorant ou développant eux-mêmes des environnements virtuels. Il est donc capital de ne pas tomber dans le piège de reproduire ce qui existe déjà (installer des panneaux publicitaires) mais de réfléchir à des modèles d'engagement plus proches de la culture gaming.

Dans les deux cas, web3 et métavers, il y a un triple défi à relever :

  • technique (maîtriser la blockchain et la 3D)
  • économique (se passer des publicités et définir un modèle viable basé sur des jetons numériques), 
  • et éthique (favoriser l'engagement et la participation des utilisateurs plutôt que de seulement les considérer comme une source de profit).

Les annonceurs et les entreprises doivent donc s'adapter à ces nouveaux contextes et cultiver une relation de confiance avec leurs utilisateurs pour assurer la réussite de leurs projets web3 et métavers.

Il est évident que cela nécessite une réflexion approfondie sur les modèles économiques, les modèles de marketing et les stratégies de communication, mais cela peut également offrir de nouvelles opportunités pour les entreprises qui sont prêtes à innover et à penser différemment.

Pour autant, faut-il se résigner et jeter l’éponge ?

Non, bien au contraire. Les premiers cas d’école sont porteurs d’espoir pour que le marketing ne rate pas une fois encore son virage relationnel. 

L'exclusivité et la traçabilité qu’offrent les NFT et au sens large, la “tokénisation”, sont sans doute à ce jour la pierre angulaire d’un "nouveau marketing relationnel". Je dirais même que c’est sans doute la dernière chance pour le marketing de nouer des relations durables, équitables et partageurs de valeurs avec ses clients.

J’ai été il y a plus de 25 ans l’un des premiers à croire et à encourager le fameux CRM, mais les dérives de l’ensemble de la chaîne de valeur marketing-communication (annonceurs, médias et agences) ont tué la notion même de relation pérenne, équitable et “gagnant-gagnant”, au seul profit d’une rentabilité immédiate, le fameux ROI…

Le Web3 porte dans ses gênes une dynamique sociale totalement différente du web 2.0 et demeure, par essence, communautaire. Le ROI du Web3 ne peut donc se résumer au clic ou au taux de conversion. Il peut certes permettre aux marques de développer un revenu additionnel (via la vente de NFT) et parfois récurrent (via la seconde main par exemple), mais ne peut se résumer à un ROI court termiste.

Les recherches académiques récentes sur le sujet confirment que les NFT permettent de renforcer les liens entre passionnés et d’affirmer son appartenance à une communauté, notamment sur les réseaux sociaux, que cette appartenance soit émotionnelle, financière, ou autre. En plus de signifier l’appartenance, les NFT permettent aux communautés de se rassembler autour de passions. Nul doute donc qu’ils aient le potentiel de construire le capital marque tout au long du funnel, de la notoriété à la préférence relationnelle et comportementale. Je vous renvoie ici aux recherches récentes que j’ai largement commentées et qui démontrent leur impact à chacune des étapes du marketing funnel du pré-achat à la phase post-achat.

Que dire alors du potentiel des expériences immersives que peut proposer le métavers ? Il se situe dans le décuplement des sens. Pour autant, le métavers dans sa version idéale n’est pas pour aujourd’hui, puisque la technologie n’est pas encore au rendez-vous.

Pourtant, les métavers existent déjà et regroupent près de 550 millions d'individus, la plupart très jeunes.

Les marques qui s’y aventurent y voient la possibilité de toucher ce public peu enclin à être activé par les canaux marketing traditionnels, eux-mêmes de plus en plus saturés… Mais le salut de ses marques dans le métavers passe par un changement de modèle et d’approche, à l'opposé des flux de micro-contenus que l'on consomme passivement et qui sont entrecoupés de publicités. Pour rappel, le métavers propose des expériences riches et immersives qui motivent les utilisateurs à être acteurs (en créant un avatar) et en allant explorer des environnements virtuels. Là encore, il faut aller dépasser la tentation de répliquer l'existant (quadriller l’espace de publicités) et réfléchir à des modèles d'engagement plus proches de la culture gaming.

Conclusion & Perspectives

Le chemin est long mais il ne faut pas baisser les bras. Il s’agit d’entreprendre une démarche ouverte en mode test and learn telle que celle initiée des marques telles celles du groupe LVMH, ou Nike, Adidas, et bien d'autres, mais aussi Reeddit - Royal.io - ou encore Alo Yoga.

Dans cette perspective, j’invite les annonceurs et l’ensemble de l’écosystème du marketing communication Web3 à s’emparer de la feuille de route web3 marketing que j’ai proposée, en testant et en remodelant l’ensemble de la chaîne de valeur au fur et à mesure de leurs succès et échecs.

Donc oui marketing avant tout et toujours, mais en s'adaptant aux valeurs du Web3... Les marques ont réussi leur transformation digitale, le Web3 est une autre plateforme digitale, il n'y plus qu'à .... ! La marque sera web3 ou ne sera pas : la Marque Web3 !