La clé d'une industrie agroalimentaire et des boissons résiliente

Cette année, l'industrie de l'agroalimentaire et des boissons a dû faire face à une évolution de la demande et à l'émergence de nouveaux modes de consommation. En adoptant des nouvelles technologies, les fabricants peuvent être mieux placés pour rebondir après la crise et minimiser l'impact des changements futurs au niveau des comportements des consommateurs.

La pandémie de Covid-19 aura certainement des conséquences majeures et durables. Cette année, l’industrie de l’agroalimentaire et des boissons a dû faire face à une évolution de la demande et à l’émergence de nouveaux modes de consommation. Certaines entreprises ont même dû réduire leurs gammes de produits alimentaires pour répondre à la forte hausse de la demande du commerce de détail.[1] Alors que la plupart des fabricants de ce secteur ont pu maintenir leur activité, ils se rendent également compte que les modèles d’approvisionnement, les méthodes et les pratiques de travail sont susceptibles d’être bouleversés de façon permanente. L'industrie va connaître de profondes transformations à moyen et long terme et les entreprises qui ne pourront pas s'adapter assez rapidement à la "nouvelle norme" risqueront d'être laissées pour compte.

Il n'est donc pas étonnant que les entreprises qui avaient automatisé et numérisé leurs unités de production aient été les mieux placées pour réagir aux demandes changeantes du marché avec une flexibilité optimale lorsque la crise a frappé. Celles disposant d'unités de production automatisées et numérisées ont été moins touchées par les pénuries de main-d’œuvre résultant du confinement,[2] par exemple, ce qui les a rendues plus résistantes. Pour relever ces nouveaux défis, beaucoup d’entreprises ont dû faire preuve d'agilité sur tous les fronts, et celles qui n'étaient pas suffisamment équipées pour faire face à une baisse de la demande ont été confrontées à un manque d'entrepôts frigorifiques pour denrées périssables[3], par exemple. À l'inverse, les fabricants équipés de jumeaux numériques ont pu simuler des scénarios d'impact du coronavirus et réagir rapidement et efficacement face à la volatilité du marché.[4]

Les défis qui freinent l'investissement sont toutefois considérables. Notre dernier rapport "Relever le nouveau défi : rôle de la smart finance dans l’adoption de la « nouvelle norme » économique" estime que la transformation numérique de l’industrie mondiale de l’agroalimentaire et des boissons nécessitera à elle seule 567 milliards de dollars d’investissements au cours de la période de cinq ans allant de 2020 à 2024.[5] Néanmoins, l'augmentation progressive des revenus annuels que les fabricants peuvent espérer tirer de la numérisation de leurs activités est significative. Une précédente recherche menée par Siemens Financial Services (SFS) avait montré que les fabricants pourraient espérer gagner 6,3 à 9,8 % supplémentaires de leurs revenus annuels en numérisant leurs opérations.[6]

Même si la crise se résorbe, les entreprises du secteur de l'agroalimentaire et des boissons devront intégrer l'agilité commerciale dans leurs activités si elles veulent pouvoir faire face à l'incertitude actuelle et à la volatilité des marchés. Pour assurer la compétitivité et la résilience futures, la technologie des capteurs et l’apprentissage machine sont déjà utilisés par les brasseries pour prédire le moment où la bière passe de la phase de fermentation basse à celle de fermentation spontanée.[7] La technologie "apprend" littéralement le savoir-faire des brasseurs pour établir ses prédictions. De même, l'intelligence artificielle (IA) a été utilisée pour identifier les dangers dans le lait ou détecter les défauts des machines avant qu'ils ne se produisent.[8] Toutes ces applications contribuent à minimiser les temps d'arrêt, à prévenir l'altération des lots et à accroître l'efficacité opérationnelle de la chaîne de production.

Conscientes de l'agilité et de l'efficacité opérationnelles accrues qu'offre la numérisation, 74% des PME du secteur ont déjà pris des mesures pour améliorer les processus de production grâce aux technologies numériques.[9] En temps de crise, cependant, l'appétit d'investissement a tendance à se réduire car les entreprises ressentent le besoin de se concentrer sur des rendements à court terme et sur la nécessité de rester à flot plutôt que de chercher à moderniser les équipements existants par des investissements à plus long terme. Cela étant dit, certains analystes[10] suggèrent que les entreprises qui continuent à investir même dans des situations économiques difficiles émergent généralement avant leurs concurrents, obtenant ainsi sur le long terme un avantage concurrentiel difficilement égalable par leurs rivales. Cela signifie que la pandémie et ses conséquences économiques ont en fait rendu plus important - et non moins important - l'investissement dans les nouvelles technologies.

Les défis urgents de la pandémie et ses effets à long terme pourraient même accélérer le rythme d’investissement. Une précédente étude de Siemens Financial Services (SFS) avait montré que la fenêtre d’action permettant de prendre de l’avance sur la concurrence connaîtra un "point de basculement" d’ici cinq à sept ans.[11] Après ce délai, les fabricants qui n'auront pas investi pourraient avoir du mal à rattraper leur retard. Il est probable que cette estimation doive même être revue à la baisse pour tenir compte de l'impact de la crise.

L'acquisition de nouvelles technologies nécessite souvent un investissement considérable que de nombreuses entreprises auront du mal à réaliser sans aide extérieure. Afin d'offrir aux fabricants de produits alimentaires et de boissons - grands et petits - une voie financièrement viable dans le climat actuel, des modèles de financement intelligents sont en train d'émerger. Le financement intelligent, intégré dans la proposition de valeur globale, sera un élément clé pour les fournisseurs de solutions tout au long de la chaîne d'approvisionnement en technologies et en machines. Le financement intelligent de la transformation numérique est généralement proposé par des bailleurs de fonds spécialisés, à même de comprendre la technologie, le secteur, les applications et les pressions opérationnelles.

Grâce à ces connaissances, le financier peut concevoir des structures de financement sur mesure, en s’appuyant sur des technologies, des services et des conseils adaptés, pour atteindre des résultats commerciaux clairement définis. L'alignement des paiements sur les résultats commerciaux est particulièrement important pendant une période économique où toutes les dépenses doivent présenter un lien exceptionnellement clair et tangible avec les avantages commerciaux. Le financement intelligent lève les obstacles à l’investissement, rendant plus viable financièrement la transformation numérique pour les producteurs du secteur.

Les analystes et experts mondiaux recommandent de maintenir la dynamique des investissements dans les nouvelles technologies, même en période d’incertitude. Les avantages sont évidents : une plus grande souplesse, une meilleure productivité, une réduction de la consommation d'énergie et des coûts de stockage réduits. En adoptant ces nouvelles technologies, les fabricants peuvent être mieux placés pour rebondir après la crise et minimiser l'impact des changements futurs au niveau des comportements des consommateurs. Les entreprises prudentes du secteur de l'agroalimentaire et des boissons peuvent envisager de reporter leurs investissements en vue des perspectives économiques actuelles, mais ce serait une erreur. Alors que la fenêtre de l'avantage concurrentiel continue à rétrécir, les fabricants se tournent de plus en plus vers des options de financement intégrées pour accélérer leur virage numérique.

[1] Financial Times, UK food suppliers battle to fill the empty shelves. 19 Mar 2020

[2] Economic Times of India, Labour shortage may break supply chain in Coronavirus lockdown extension, 10 Apr 2020

[3] Food Management Today, CCF details impact of coronavirus on cold chain businesses, 8 Apr 2020

[4] Asia Pacific Food Industry, Unlocking the benefits of digitisation in the food and beverage industry, 8 Oct 2018

[5] Siemens Financial Services, Relever le nouveau défi: Rôle de la Smart Finance dans l’adoption de la « nouvelle norme » économique, 2020

[6] Siemens Financial Services, La prime de productivité de la numérisation en France , Quelle valeur la numérisation offre-t-elle aux fabricants agroalimentaires?, 2017

[7] Osisoft, ‘Deschutes: Better Data for Better Beer’, 2017 and Fortune, ‘Big data meets the beer industry’, 29 Jan 2019

[8] Prescouter, ‘How Food and Beverage Companies Are Implementing AI for Supply Chain Management’, July 2017

[9] Food Drink Europe, Data & Trends 2019

[10] The Economist, The business of survival, 11 Apr 2020

[11] Siemens Financial Services, dans Countdown to the Tipping Point for Industry 4.0, avril 2019, estime que le "point de basculement" des investissements interviendra au moment où 50% du secteur mondial de la production se sera substantiellement convertie aux plateformes de l’industrie 4.0