Les bornes de recharge de véhicules, trois opportunités d'usage pour l'IoT

Les bornes de recharge de véhicules, trois opportunités d'usage pour l'IoT Les enjeux autour de l'installation des bornes de recharge pour véhicules électriques permettent à la technologie IoT de prouver son utilité en matière de robotique, de smart grids et de maintenance.

Le marché des bornes de recharge pour les véhicules électriques est en pleine croissance : au 31 décembre 2021, la France comptait 53 667 points de recharge ouverts au public, un nombre en hausse de 64% par rapport à 2020, selon l'association professionnelle française Avere France, mais encore loin de l'objectif de 100 000 bornes fixé par le gouvernement. L'essor est similaire en Europe, notamment en Allemagne où 44 486 stations de recharge classique et près 8 000 bornes de charge rapide étaient installées au 1er janvier 2022. Répondre aux enjeux de ce marché n'est pas un sujet qu'en mobilité, mais aussi en IoT, pour lequel les bornes de recharge ouvrent la voie à de nouvelles opportunités.

En premier lieu en réponse aux problématiques d'installation. "Le manque de bornes de recharge est un frein aujourd'hui pour les acheteurs. Ainsi quand nous parlons de mobilité du futur et de bornes de recharges, cela concerne l'IoT et plus précisément la robotisation des bornes pour proposer des robots mobiles autonomes", témoigne Manon Lavergne, fondatrice de la marque française de scooter électrique Viluso. Et de citer en exemple pour les parkings Charles, le robot de recharge de la start-up lyonnaise Mob-energy, ou Mochi, le robot de l'entreprise Envision. C'est également le choix fait par Akeoplus, société française d'ingénierie spécialisée en services et solutions 4.0 pour l'industrie, acquise par l'équipementier automobile français EFI Automotive. "Nous développons notre savoir-faire dans l'IoT pour concevoir un prototype de robot chargeur pour véhicule électrique sans déperdition d'énergie. Les capteurs lui permettront de se repérer et d'optimiser ses trajectoires", explique Sébastien Verchère, directeur général d'Akeoplus.

Un moyen également d'optimiser les places de stationnement. "D'autant qu'avec la loi d'orientation des mobilités (LOM), le nombre de voitures et de places de parking sont limités dans les centres villes", rappelle Jad Tabet, country manager France chez Targa Telematics, fournisseur de technologies dans le secteur automobile.

L'IoT au cœur de la charge intelligente

Deuxième intérêt majeur des bornes de recharge pour le secteur de l'IoT : la charge intelligente. Il s'agit alors de récolter toutes les données de consommations d'énergie et celles sur les usages (heure d'arrivée et de départ des collaborateurs, capacités, etc.) afin d'éviter les pics de consommation. Pour Hanno Klausmeier, directeur du SAP Labs convaincu dès 2014 que l'électrique était le futur de sa flotte de véhicules, c'est dans cet usage que l'IoT prend toute sa valeur. "Nous voulions installer sur notre site de Mougins 54 bornes de recharge pour nos 280 véhicules électriques. Cela nous faisait multiplier par trois la capacité d'énergie contracté avec EDF, il nous fallait donc effectuer une charge intelligente couplée à la production de nos panneaux solaires et à la consommation des bâtiments, d'environ 80 kilowatt par jour. Sans IoT, ce ne serait pas possible." Les charges sont contrôlées de manière dynamique par logiciel. Si le projet a coûté au total 100 000 euros à SAP Labs, Hanno Klausmeier affirme que l'électrique est moins cher dans le temps, avec une baisse des coûts de maintenance.

L'IoT cellulaire contribue par ailleurs à transformer les véhicules en fournisseur d'énergie. Dans ce cadre, l'éditeur et intégrateur de plateforme IoT Synox collabore avec EDF en Occitanie pour rendre les bornes de recharge réversibles. "Les flux de données IoT sur les niveaux de charge serviront à la gestion du parc automobile et donc à anticiper les rotations", explique Emmanuel Mouton, CEO de Synox. Avec sa solution digitale, la start-up Wise Building entend pour sa part faire communiquer le bâtiment et la borne. L'objectif : que l'utilisateur puisse réserver une borne de recharge à son arrivée au travail, et, après la réception d'une notification quand son véhicule est rechargé, réserver une place de parking pour libérer la borne. Codéveloppée avec le constructeur ABB, la solution sera testée en POC à la fin du premier semestre.

Dans la même optique de faire communiquer les bornes chez les particuliers pour profiter des meilleurs tarifs entre les heures creuses et pleines, la filiale IoT de Bouygues Telecom Objenious s'est associée à l'opérateur français de bornes de recharge intelligentes Qovoltis. L'entreprise allemande tado°, qui conçoit des thermostats intelligents et des services liés à l'énergie domestique, a de son côté fait l'acquisition en janvier 2022 de l'entreprise aWATTar, qui fournit un transfert de charge électrique par le biais de tarifs énergétiques basés sur le temps d'utilisation. "Une bonne orchestration permet d'économiser dans les coûts d'énergie mais il est nécessaire d'avoir des compteurs communiquant et de connecter les systèmes de chauffage et de climatisation", prévient Toon Bouten, CEO de tado°.

La charge intelligente demande une interopérabilité entre plusieurs systèmes. © IoThinks Solutions

Autre domaine de développement pour l'IoT : la maintenance prédictive. "Les clients veulent être sûrs que leurs bornes fonctionnent correctement, à tout moment, et ils veulent pouvoir les monitorer à distance", rappelle Julien Dalmasso, CEO de l'éditeur IoT français IoThink Solutions qui a fourni la solution de monitoring énergétique permettant le smart charging sur le site de SAP Labs, qui peut ainsi gérer ses consommations énergétiques grâce à l'energy management system (EMS).

L'enjeu à venir pour les acteurs de l'IoT reste l'interopérabilité. "Est-ce que les acteurs de l'IoT vont réussir à s'entendre avec les fournisseurs des voitures électriques pour avoir des standards de rechargement universels ? Il existe trop de types de prises, de systèmes d'alimentation électrique, de logiciels, etc.", souligne Manon Lavergne. Un avis partagé par Julien Dalmasso, chez IoThink Solutions. A titre d'exemple, parmi ses 54 bornes installées sur site et 90 au domicile d'un tiers des salariés, le SAP Labs compte 25 marques différentes de bornes. "Nous avons veillé à ce qu'elles communiquent toutes avec le protocole OCPP", indique toutefois Hanno Klausmeier. Les acteurs anticipent cette prochaine étape. Synox a déjà commencé à travailler avec des constructeurs comme Stellantis et Daimler sur l'interopérabilité des données liées à l'écosystème.