Le droit de réponse en ligne est enfin réglementé

Depuis le 24 octobre 2007, un décret d'application confirme l’existence d’un droit de réponse "en ligne" et précise la procédure à suivre pour exercer ce droit. Pourtant, une série de points semblent d’ores et déjà poser problème.

Coupant court aux controverses qui faisaient rage en la matière, la loi du 21 juin 2004 (LCEN) avait introduit le principe d'un droit de réponse pour les contenus diffusés sur le Web. Désormais, le droit de réponse sur l'Internet bénéficiait d'un régime juridique spécifique, côtoyant ceux qui existaient déjà en matière de presse écrite et de communication audiovisuelle.

Après avoir affirmé le principe d'un droit de réponse pour les contenus diffusés en ligne, et après lui avoir attribué un régime juridique spécifique, le législateur s'en remettait ensuite à l'adoption future d'un décret, destiné à préciser les modalités de mise en oeuvre de ce droit de réponse.

C'est désormais chose faite depuis que le décret "relatif au droit de réponse applicable aux services de communication au public en ligne", a été adopté le 24 octobre 2007. Pris en application du point IV de l'article 6 de la LCEN, ce décret confirme l'existence d'un droit de réponse "en ligne", et précise la procédure à suivre pour exercer ce droit.

Droit de réponse en ligne : régime et conditions

Pour rappel, le régime juridique propre au droit de réponse en ligne s'articule autour des points suivants :

- Le droit de réponse en ligne  est reconnu "à toute personne nommée ou désignée dans un service de communication au public en ligne". Se trouvent visées par la loi, tant les personnes physiques que les personnes morales mises en cause dans un contenu diffusé sur Internet ;

- Par ailleurs, la personne désirant exercer ce droit de réponse ne doit justifier de rien sauf de sa volonté d'exercer ce droit de réponse. Nul besoin de démontrer l'existence d'un préjudice quelconque, ou de contenus à caractère injurieux ou diffamatoire. Il en va, du droit de réponse en ligne, comme d'un véritable droit à la liberté d'expression, plus qu'un droit de défense ; 

- Il faut encore noter que l'exercice de son droit de réponse par une personne physique ou morale n'a pas pour effet de lui retirer son droit à demander la suppression du contenu litigieux, ou sa correction ;

- Le droit de réponse sur l'Internet s'exerce à titre gratuit ;

- Concernant le délai dans lequel le droit de réponse peut s'exercer, celui-ci est court, puisque le législateur prévoit un délai de trois mois à dater de la mise à disposition du public du contenu litigieux ;

- Enfin, l'article 6.IV de la LCEN renvoie à l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881, précisant ainsi que l'insertion de la réponse doit se faire à la même place et dans les mêmes caractères que le message critiqué ;


La procédure mise en place par décret du 24 octobre 2007

Si le décret du 24 octobre 2007 précise enfin la procédure à suivre afin d'exercer un droit de réponse, une série de points semblent d'ores et déjà, poser problème en pratique.

Entre autres, le décret prévoit, en son article 1er, que le droit de réponse en ligne ne peut s'exercer lorsque "les utilisateurs sont en mesure, du fait de la nature du service de communication au public en ligne, de formuler directement les observations qu'appelle de leur part un message qui les met en cause".

Cette précision a de quoi étonner.

En effet, on peut se poser la question de savoir dans quels cas exactement, on peut considérer que l'utilisateur concerné est en mesure de formuler directement ses observations. En effet, le simple fait de pouvoir ajouter un commentaire au bas d'un article est-il suffisant pour remplir cette condition ? A l'évidence, les forums de discussion ou les blogs non modérés excluent l'exercice d'un droit de réponse au sens de l'article 6 IV de la LCEN.

Par ailleurs, et au-delà de cette première question, il est évident qu'un commentaire ajouté au bas d'un article par la personne concernée elle-même, ou la réponse à un message lancé sur un forum de discussion, n'a certainement pas le même impact dans l'esprit des internautes, qu'une réponse insérée par l'éditeur lui-même, et affichée comme l'exercice d'un droit de réponse légal...

Si la jurisprudence future venait à interpréter ce premier article du décret de manière trop large, le risque existe , finalement, de vider le droit de réponse en ligne de sa substance, dès lors que tout éditeur sera tenté d'insérer la possibilité de commentaires, sur son site Internet et d'éviter ainsi d'avoir à mettre en oeuvre la procédure prévue par le décret...

Autre point problématique, le décret stipule que la réponse devra "prendre la forme d'un écrit quelle que soit la nature du message auquel elle se rapporte".


Pour le reste, le décret met en place une procédure relativement classique et qui ne semble, a priori, pas poser problème.

Entre autres, il prévoit que la réponse sera mise à la disposition du public par le directeur de publication et ce, dans des conditions similaires à celle du message en cause et présentée comme résultant de l'exercice du droit de réponse.

Par ailleurs, il est prévu que la réponse demeurera accessible durant la même période que celle pendant laquelle l'article ou le message qui la fonde est mis à disposition du public par l'éditeur du service de communication au public en ligne.

Quant à savoir si, globalement, la procédure instaurée produira les effets escomptés, à savoir permettre à tout un chacun de réagir (de manière visible) aux contenus diffusés en ligne le concernant... la suite est à venir...