Les ministres des télécoms de l'UE enterrent l'amendement 138


Ce texte, gênant pour le projet de loi français de lutte contre le piratage, a été retiré à la demande de Paris.

La France a finalement obtenu le retrait de l'amendement 138 du "paquet télécoms", lors de la réunion du Conseil des ministres des Télécoms, jeudi 27 novembre. Sur proposition de  Paris, les ministres des 27 Etats membres ont opté à l'unanimité pour la suppression de ce texte, dont l'adoption représentait un obstacle à la mise en œuvre de la loi "Création et Internet", qui doit être examinée début 2009 à l'Assemblée nationale.

Rédigé par les eurodéputés Guy Bono et Daniel Cohn-Bendit, l'amendement 138 prévoit "qu'aucune restriction aux droits et libertés fondamentales des utilisateurs finaux ne doit être prise sans décision préalable de l'autorité judiciaire". Il aurait donc interdit à la France de couper les connexions des internautes récalcitrants sur simple décision administrative de l'Hadopi, l'obligeant à passer par un juge.

Depuis l'adoption de l'amendement, Paris a tenté à plusieurs reprises d'obtenir sa suppression. En vain (lire Piratage : Bruxelles adopte l'amendement anti-riposte graduée, du 23/10/2008). Depuis plusieurs mois, la ministre de la Culture, Christine Albanel s'employait en parallèle à en minimiser la portée. Selon elle, cet amendement ne s'oppose pas à la riposte graduée, puisque il interdit toute restriction aux "libertés fondamentales" sans passer au préalable par un juge. Or disposer d'une connexion à Internet à domicile ne constitue pas à ses yeux une "liberté fondamentale".

Une rhétorique que vient pourtant de contredire la Commission européenne : la suspension de connexion, affirme Bruxelles dans un courrier adressé à la France, n'est pas compatible avec la directive européenne dite de "service universel", qui garanti justement un ensemble minimal de services essentiels, parmi lesquels figure l'accès à Internet (lire Bruxelles pointe les failles de la loi antipiratage, du 28/11/2008).

Reste que l'amendement anti-riposte graduée n'est pas encore complètement mort. Guy Bono indique qu'il compte redéposer son texte en deuxième lecture au Parlement européen. Le retrait de l'amendement par les ministres européens va en effet obliger les eurodéputés à se prononcer à nouveau sur le sujet.

Lors de son premier examen, en septembre, le texte avait été adopté à une large majorité du parlement européen. "Sa suppression par le Conseil constitue un déni de démocratie et vise à protéger les intérêts de quelques uns au détriment de l'intérêt général", estime le Guy Bono, interrogé par "Le Figaro". De son côté, Christine Albanel n'a pas manqué de saluer la "bonne nouvelle" que constitue le retrait de cet amendement.