Marques, comment faire travailler les influenceurs pour vous
Comment repérer ceux qui correspondent à vos besoins ? Quel dispositif leur proposer et combien débourser ? Les réponses pour vous allier à ceux qui savent parler aux nouvelles générations.
Capter l'attention du consommateur sur le web via un message publicitaire est une tâche ardue pour les marques, confrontée aux adblockers, mais également désormais aux influenceurs, devenus de sérieux concurrents. Pour qui en douterait, cette double statistique : 100 créateurs ont dépassé le million d'abonnés en France sur Youtube, seules deux chaînes de marques y sont parvenues, Disney et Ubisoft. Même constat sur Instagram et Snapchat où ces personnalités éclipsent tout autant les marques, côté audiences.
Ces dernières doivent donc changer leur fusil d'épaule. "On passe de l'ère du marketing pur et dur à celle du marketing d'influence", estime la fondatrice de l'agence We Are Social, Sandrine Plasseraud, pour qui "le meilleur moyen de toucher un individu exposé à pas moins de 15 000 stimulis commerciaux par jour est de s'allier à ces influenceurs qui manient à merveille les codes de communication des nouvelles générations".
Comment les repérer ?
Première étape clé : l'identification des influenceurs les plus pertinents dans votre secteur. Les bloggeurs les plus visibles seront facilement identifiables avec une recherche Google sur les mots clés qui vous intéressent. Pour les influenceurs qui n'ont pas leur propre site, le passage obligé est Instagram.
Plusieurs méthodes sont à votre disposition pour les dénicher. D'abord l'option "artisanale" qui consiste à rechercher les instagrammeurs les plus populaires de votre secteur en voyant ceux qui émergent sur les # qui vous intéressent. "Un annonceur food ira regarder du côté du #cuisine, #recette ou #foodporn", illustre Justine Hervé, responsable influence au sein de la plateforme Effinity. De fil en aiguille, en regardant les profils auxquels ces instagrammeurs sont eux même abonnés ou les suggestions de profils qui leur sont similaires, vous constituerez un noyau dur.
"La qualification humaine et la rencontre de visu restent clé"
Autre possibilité, passer par une tiers qui a fait du sourcing d'influenceurs son métier. "Nous allons piocher dans notre réseau de 4 000 influenceurs ceux qui sont le plus adaptés à la demande d'un client", précise Justine Hervé. We Are Social utilise des outils comme Lauchmetrics ou Peg pour Youtube, permettant de filtrer les profils par localisation et influence.
"La qualification humaine reste toutefois clé pour valider que les profils qui ressortent ont une réelle affinité avec l'univers de la marque", ajoute Marine Montironi, consultante chez We Are Social. Une vérité que ne dément pas la cofondatrice de Revolvr, bureau créatif spécialisé dans l'influence, Emmanuelle Pelloux. "C'est un métier très relationnel et les rencontres physiques restent importantes. Cela permet, entre autres, de s'assurer que l'on n'a pas affaire à un profil factice."
Comment les sélectionner ?
"Sur Instagram, il est très facile d'acheter des fans. Ne vous cantonnez donc pas au seul indicateur d'audience. Regardez le taux d'engagement, le nombre de like et de commentaires obtenus, conseille Justine Hervé. Un profil qui a 50 000 abonnés et 'à peine' 400 like par photo est suspect." Qu'est-ce qu'un bon taux d'engagement ? Nos interlocuteurs ont du mal à donner un pourcentage. "Tout dépend des secteurs", pointe Emmanuelle Pelloux.
"Nous évitons les influenceurs stars qui deviennent des sapins de Noël en disant oui à tout, à des tarifs assez élevés"
Une certitude, il y a plusieurs spectres d'influence. "A 1 500 abonnés, on est généralement qualifié de micro-influenceur, note Marine Montironi. A partir de 150 000, on commence à être très visible dans l'Hexagone." Justine Hervé note que de plus en plus de campagnes vont vers la longue traîne des influenceurs, ceux qui moins de 50 000 abonnés. "Nous évitons les influenceurs stars qui peuvent rapidement devenir des sapins de Noël en disant oui à tout, à des tarifs assez élevés", explique-t-elle. Quelle crédibilité donner à une influenceur beauté qui fait la promotion d'une marque de cosmétique un jour et celle de son concurrent le lendemain ?
"C'est aussi gratifiant pour une marque de dénicher des jeunes talents et de leur donner un peu de la visibilité", ajoute Marine Montironi. Emmanuelle Pelloux conseille "un juste panachage entre influenceurs très visibles et des profils plus confidentiels mais prescripteurs sur votre niche." Elle ajoute : "N'hésitez pas non plus à renouveler vos partenaires, cela vous permettra d'apporter un peu de fraîcheur à votre stratégie d'influence."
Quel dispositif leur proposer ?
Le dispositif mis en place dépendra de votre budget et de la nature du message que vous voulez faire passer (vendre un produit, communiquer sur un lieu ou faire du branding sur votre marque ?). La collaboration la plus populaire sur Instagram est sans doute l'envoi du produit à l'influenceur qui se charge de le mettre en scène dans un cliché et d'en faire un billet de blog s'il en a un.
Pour des dispositifs plus événementiels, il est d'usage d'inviter un pool d'influenceurs à une soirée où leur seule préoccupation doit être de s'amuser… sans payer. "A l'occasion de la Saint-Valentin, nous avons mis sur pied une Jagerchapelle où les gens invités venaient célébrer des faux mariages grâce à un sosie d'Elvis", illustre Emmanuelle Pelloux. Un prétexte pour leur faire redécouvrir une marque trop souvent associée à un cocktail très basique, la Jagerbomb. "C'était l'occasion de premiumiser la marque en faisant découvrir les associations possibles avec d'autres liqueurs et jus pour des cocktails plus subtils."
Le must ? L'Instagram Takeover par un influenceur
"Le must, c'est la co-création entre une marque et l'influenceur", assure Marine Montironi. La marque donne alors les "clés" à l'influenceur qui peut prendre en main son compte Instagram le temps d'un "Instagram Takeover" ou poser sa patte sur une conception de produit. À l'occasion de la soirée Fabulous Fund Fair en faveur de son association Naked Heart Foundation, Natalia Vodianova avait ainsi pris le contrôle du compte Instagram de Vogue Paris. Une soirée à suivre dans l'œil du mannequin russe.
Dans tous les cas, la marque ne doit pas imposer un style et respecter l'ADN de la personne qu'il a sollicitée, sans quoi la collaboration sera contre-productive.
"La rencontre de visu permet de s'assurer que les deux parties sont sur la même longueur d'onde", conseille Emmanuelle Pelloux. C'est indispensable pour ce type de partenariat aussi exigeant qu'il peut s'avérer efficace.
Pour quel budget ?
"Bonne nouvelle, il n'y a pas de ticket d'entrée sur Instagram où vous pourrez développer une stratégie d'influence moyennant des dotations produit auprès des micro-influenceurs", note Marine Montironi. Instagram où une collaboration peut se traduire par le post d'une photo reste bien moins coûteux que Youtube où le produit fini prend la forme d'une vidéo. "C'est beaucoup plus lourd à mettre en place. Pour un résultat souvent décevant", tranche Marine Montironi.
Il vous faudra en revanche piocher dans votre portefeuille pour travailler avec des instagrammeurs qui ont des dizaines de milliers d'abonnés. "On parle d'une rémunération qui oscille entre 200 et 300 euros par collaboration pour un profil avec 50 000 abonnés." Comptez 10 fois plus pour les instagrammeurs qui dépassent le million.
Effinity a également décidé de reproduire sur Instagram le modèle de l'affiliation qui a fait les beaux jours de nombreux blogs. "Notre plateforme Brandyoulike a introduit un modèle de rémunération à la performance où l'influenceur touche 12% du chiffre d'affaires généré en plus pour le compte de l'e-commerçant", précise Marine Montironi.
Dans tous les cas une règle informelle que vous serez bien avisé de suivre : être transparent sur le caractère commercial du message posté par l'influenceur. "Il est d'usage d'accoler un hastag #ad à un post sponsorisé", confirme Sandrine Plasseraud.