La blockchain est morte, longue vie au Web3 !

Blockchain ou Web3 peuvent refléter deux faces de la même pièce, mais c'est sans compter sans les évolutions sémantiques et de cas d'usage connues par le secteur.

Las, la blockchain, ce mot-valise regroupant les applications privées, permissionnées et publiques, est morte. Force est de constater que l’abandon du projet TradeLens par Maersk et IBM est un aveu d' échec des solutions dites de consortium (privées, permissionnées), et que seules restent les applications liées aux crypto-monnaies, et autres valeurs tokenisées (NFTs…). Ainsi, ne restent que les solutions basées sur des blockchains publiques, qui se dénomment désormais « Web3 », en opposition au « Web2 » des plateformes, dans un objectif de décentralisation du web. Mais comment en est-on arrivé là ? Quelles ont été les erreurs ayant menées à la déshérence du terme ? Comment le Web3 est-il né des cendres de la « blockchain » et quels sont les cas d’usage pertinents ?

Blockchain : une histoire sémantique

Le whitepaper de Bitcoin ne fait jamais mention du terme « blockchain ». On y trouve le terme de « block », le terme de « chaîne », mais à aucun moment les deux mots n’ont été juxtaposés dans le document rédigé par Satoshi Nakamoto. Le terme blockchain est apparu plus tard, avec notamment l’émergence des solutions « permissionnées » ou « privées » telles que Hyperledger. C’est ce terme qui a permis de différencier les crypto-monnaies comme Bitcoin, alors à l’image sulfureuse, que l’on disait lié aux activités criminelles, des autres applications vendues par de nombreux cabinets de conseil à des clients en quête d’innovation. Un consultant confiait à l’époque que pour un euro investi par son cabinet dans les technologies blockchain, il arrivait à vendre pour 100€ de technologies cloud. Une partie de la communauté d’experts décriait les promesses des blockchain permissionnées, qui étaient tout aussi réalisables avec des technologies digitales classiques, mais la puissance marketing de leurs initiateurs couvrait les protestations auprès des clients. Ainsi, de nombreux investissements furent réalisés à l’époque, avec des applications dans le secteur de la logistique, de la traçabilité alimentaire (on se souvient du fameux « poulet carrefour »), mais dont la valeur ajoutée reste à démontrer.

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Sémantiquement, le terme de « technologies blockchain » englobe les solutions privées, permissionnées et publiques. Dans ces dernières, on retrouve donc les crypto-monnaies, les smart contracts et leurs applications dérivées (NFTs, finance décentralisée, gouvernance…). Or, les blockchains privées et permissionnées ont vu leurs applications se réduire, comme l’a montrée la fin en grande pompe du projet TradeLens, emblématique des cas d’usage dans la logistique. Ainsi, le terme « blockchain » fait désormais uniquement référence aux applications publiques.

Web3: new kid on the block

Voilà quelques mois qu’un nouveau terme a commencé à apparaître : celui de Web3.0. En opposition au Web 2.0 qui est celui des plateformes et des réseaux sociaux, où l’internaute est contributeur et créateur de contenu, le Web 3.0 promet les mêmes possibilités en désintermédiant les plateformes du Web 2.0, grâce aux possibilités de modélisation et de transfert de valeur offertes par les crypto-monnaies et protocoles de smart contract (soit les « Blockchains publiques »). Ainsi, le périmètre sémantique du Web 3.0 couvre le périmètre du terme « blockchain publique », en y ajoutant une notion de cas d’usage et d’opportunités qui sont celles de la désintermédiation des plateformes. C’est donc assez naturellement que le terme s’est imposé dans les discussions.

Les cas d’usage : la question centrale 

Le terme Blockchain, qui ne porte en son sein aucune notion de cas d’usage, et dont les perspectives permissionnées / privées ont démontré leur inutilité a donc cédé sa place au terme de Web3, qui porte au-delà du périmètre technologique quelques opportunités de développement.

Dans les sujets d’innovation, la place du cas d’usage est centrale : il ne faut pas chercher à innover pour faire de l’innovation, mais bien à résoudre une problématique, qu’il s’agisse d’un nouveau modèle économique, d’une amélioration de processus existant, ou d’un usage totalement nouveau. On vous vendra parfois l’innovation pour l’expérimentation, l’acculturation ou la communication, qui sont des enjeux totalement valables ; cependant, innover c’est fondamentalement développer les cas d’usage, en utilisant les bonnes technologies. Apporter une transparence sur la chaîne de production d’un poulet est un cas d’usage réel, et sérieux. Cependant, les technologies de blockchain permissionnée n’étaient pas la bonne implémentation pour adresser ces enjeux.

Ainsi, pour réaliser un projet pérenne adressez ces questions dans cet ordre : quel cas d’usage souhaité-je adresser ? Comment vais-je mesurer la valeur apportée par le projet ? Quelle est la bonne technologie pour réaliser le cas d’usage ?

Vos projets pourront ainsi dépasser l’effet de mode, et s’inscrire dans le temps long.