Pourquoi les fabricants de téléviseurs détiennent les clés de la croissance de la CTV française

Au cours de l'année écoulée, les fabricants de téléviseurs ont progressivement pris conscience de leur avantage à "posséder l'écran", non seulement pour gérer la distribution et l'accès au contenu, mais aussi pour agréger des données d'audience uniques. Et 2021 semble suivre la même tendance.

Alors que les fabricants de TV connectées tels que Roku se sont lancés dans la création d’activités conséquentes avec des services de streaming financés par la publicité, il semblerait que les fabricants de téléviseurs eux-mêmes aient décidé de suivre leur exemple.

Samsung et Vizio ont jusqu'à présent ouvert la voie. Cependant, LG, deuxième plus grand fabricant de téléviseurs au monde, est entré dans la course suite à sa récente prise de participation majoritaire au sein de la société Alphonso, spécialisée dans la mesure d’audience médias et TV, et le lancement de LG Ads.

Cette nouvelle tendance semble gagner du terrain sur un marché de la CTV particulièrement fragmenté en France, avec des acteurs établis et entrant rivalisant pour offrir au public un accès facile à la CTV. Dans ce contexte, comment éditeurs et annonceurs peuvent-ils tirer le meilleur parti de cette montée en puissance des fabricants de Smart TV ?

Les nouveaux acteurs de la CTV sur le marché français

Grâce à son offre de programmes gratuits d'actualités et de divertissement, LG  a enregistré une croissance de plus de 300 % en heures de streaming sur LG Channels au cours de l’année 2020. Un récent partenariat dans la région EMEA permet à présent à LG de commercialiser cet inventaire et d’offrir aux acheteurs médias un accès privilégié aux audiences très engagées de ses Smart TV premium.

Grâce à ses activités de vente au détail et ses services vidéo, Amazon est en mesure d’identifier avec précision et de manière unique les produits que ses utilisateurs consomment et le contenu vidéo qu'ils regardent. Amazon Fire Stick est devenu une mine d'or que les annonceurs ciblent déjà, en particulier les marques de biens de consommation courante (Fast Moving Consumer Goods), les marques d'électronique et les marques de vente directe au consommateur. Ceci explique notamment la forte croissance en 2019 des transactions programmatiques en OTT et CTV identifiée par Pixalate : +330% (x4,3) en un an, avec une multiplication par 3 de l'offre en seulement 18 mois.

Roku, de son côté, a surpris l'écosystème en publiant des résultats financiers meilleurs que prévu en 2020. Bien que son résultat net soit négatif, son chiffre d'affaires annuel a bondi de 58% pour atteindre 1,7 milliard de dollars, et l'entreprise a enregistré un bénéfice net de 65 millions de dollars entre octobre et décembre. Roku commercialise des TV connectées sous sa propre marque dont la part de marché s'élève à 38 % aux États-Unis - devant les TV connectées de Samsung et de LG.

En 2020, Samsung TV Plus a lancé son service vidéo financé par la publicité sur sept marchés européens, avec une solide offre programmatique. Les informations recueillies par la marque grâce aux plus de 30 millions de Smart TV Samsung vendues en Europe lui permet d'offrir aux annonceurs une vue holistique sur les comportements des téléspectateurs. Au Royaume-Uni, le service permettra aux annonceurs d'accéder à plus de 47 chaînes, avec la volonté d'étendre la gamme à plus de 70 chaînes d'ici fin 2020. En France, Samsung a élargi son offre avec un total de 26 chaînes dédiées à l'information, au sport et au divertissement. Smart TV Plus propose également les 4 chaînes gratuites de Rakuten TV dédiées au cinéma.

Défis et opportunités des partenariats CTV pour les fabricants

Le consentement de l'utilisateur a représenté ces dernières années l'un des plus grands défis de la publicité. La CTV ne fait pas exception alors qu'elle gagne en popularité auprès du public. Les appareils connectés ont suscité notamment quelques inquiétudes quant au partage des données avec des utilisateurs tiers, comme l'a montré une recherche de 2019 sur la relation entre les téléviseurs connectés et les données. Si les chercheurs ont conclu que le risque pour la vie privée devait être pris en compte, les téléviseurs ont des interfaces, des protocoles et des fonctionnalités qui diffèrent de ceux des autres appareils connectés. Et, bien sûr, il existe des différences entre les pays, principalement en raison des lois en vigueur. En France par exemple, la CNIL fournit aux utilisateurs des conseils précis de l'achat à la configuration de leur nouvel équipement de CTV.

L’aspect “co-visionnage” de la CTV en tant que média a également donné lieu à un débat intéressant sur le consentement. En effet, contrairement aux principes du RGPD qui fait référence aux préférences d'une seule personne quant à la manière dont ses données doivent être traitées, l'environnement familial tel qu'un salon rend pratiquement impossible la faculté de prendre en compte toutes les préférences de tous les téléspectateurs et d’offrir une opportunité publicitaire individuelle. Toutefois, des développements récents tels que la création de profils spécifiques au sein des applications, permettent de relever ce défi majeur.

Cela étant, il convient de noter que les utilisateurs de ces appareils et les propriétaires d'inventaires disposent d'une infrastructure existante et opérationnelle permettant de recueillir les préférences des utilisateurs en matière de consentement. Cela facilite grandement l'élaboration de structures de publicité ciblée de manière conforme, c'est-à-dire en offrant aux utilisateurs une possibilité claire de définir et de gérer leurs paramètres de confidentialité.

Ainsi, médias, fabricants de TV et responsables du traitement des données doivent travailler ensemble pour comprendre les lois sur le consentement en vigueur dans chaque pays, et s'assurer que les préférences du public soient respectées en temps réel.

Comment acheteurs et vendeurs peuvent tirer partie des partenariats en CTV

Les partenariats entre fabricants peuvent être utilisés pour atteindre une certaine portée sur des marchés fragmentés, comme le prouvent les approches de LG, Samsung et Amazon Fire Stick. Et comme nous le savons, chaque fois qu'une portée est atteinte dans notre industrie, l'attention se porte rapidement sur la façon de mesurer son succès. Pour les annonceurs français en particulier, la bonne solution de mesure pourrait être utilisée pour combler le fossé entre les problématiques actuelles de consentement des utilisateurs et l'accès à des données de qualité pour une meilleure segmentation.   

La bonne nouvelle est que plus le marché mûrit, plus les outils de mesures se perfectionnent. Ainsi, il existe désormais des solutions de mesure sophistiquées permettant de réellement démontrer la valeur ajoutée de la publicité en CTV. Ces solutions, par exemple, sont en mesure de déterminer les audiences qui ont été touchées exclusivement par les campagnes CTV d’une marque dans le cadre d’une campagne TV globale. Ces solutions permettent ainsi non seulement de déterminer les foyers supplémentaires touchés, mais également le taux de téléspectateurs exclusivement digitaux touchés qui n'auraient pas pu l’être si la campagne avait été en TV linéaire seule.

Conclusion 

Alors qu'il est crucial pour tous les acteurs de l'écosystème de la publicité vidéo de continuer à investir et à expérimenter tous les aspects de ce format - du contenu attrayant à la mesure de son efficacité, les fabricants d'appareils de télévision commencent à prouver leur valeur dans leur contribution à sa croissance dans la région EMEA. Un partenariat avec des entreprises telles que Samsung, LG, Roku ou même le Fire Stick d'Amazon, qui ont toutes pour vocation de diffuser des publicités pertinentes en fonction des préférences en matière de vie privée du public, pourrait être la clé de la croissance de la CTV française. Et surtout, cela pourrait contribuer à renforcer la confiance du public dans ce média très prometteur.