Vers une adtech plus durable sans greenwashing ?

Une campagne publicitaire type qui délivre 20 millions d'impressions émet environ 5,4 tonnes de carbone mais comment un secteur à forte intensité de données peut-il avoir un impact significatif ?

La vieille maxime affirmant que "les données sont le nouvel or noir" est devenue réelle à plus d'un titre. En effet, si, à l'instar du pétrole, les données sont une véritable source de richesse, leur impact sur l’environnement ne fait pas l'unanimité. Selon certaines estimations, l’Internet dans son ensemble représente 4 % du total des émissions mondiales, un chiffre supérieur à celui de l'industrie aérienne et qui devrait doubler d'ici 2025. Le statu quo ne sera plus accepté, car les annonceurs et les éditeurs commencent à reconnaître la nécessité d'une action concrète.

Le coût environnemental d'une campagne publicitaire n'est pas un secret. Une puissance de calcul considérable est nécessaire pour alimenter en temps réel les milliards d’enchères de l'écosystème programmatique. Selon le simulateur de carbone en ligne de Good-Loop, une campagne publicitaire type qui délivre 20 millions d'impressions émet environ 5,4 tonnes de carbone, soit plus de la moitié de ce qu'un consommateur français produit chaque année, et près d'un tiers des émissions du consommateur américain moyen.

Face à l'ampleur de ces chiffres, il y a un désir grandissant de changer les choses , à la fois chez les consommateurs et au sein des entreprises. La génération Z s'intéresse aux achats durables et aux processus respectueux de l'environnement plus que toute autre génération qui l'a précédée, mais la sensibilisation à l'environnement ne se limite pas aux jeunes. Selon une récente étude menée en Angleterre, il y a également un intérêt croissant pour une approche durable de la publicité. L'étude a révélé que l'écrasante majorité des consommateurs britanniques (94 %) pensent que les marques doivent activement défendre des causes environnementales.

Les conséquences désastreuses du changement climatique sont de plus en plus évidentes. Les inondations au Pakistan, les incendies en Californie et la sécheresse en Éthiopie ont tous été imputés au changement climatique. Avec de telles images dans les journaux télévisés et la prise de conscience de l'impact environnemental des publicités digitales, ces derniers ne peuvent plus se soustraire à la question du climat. Les Nations Unies ont publié leur dernier rapport sur le climat, qui indique clairement que les dirigeants mondiaux sont loin d'en faire assez. Dans le contexte de la COP27 et du bruit croissant des consommateurs, il existe plus que jamais de solides arguments commerciaux et éthiques en faveur d'un changement substantiel.

Mais comment un secteur à forte intensité de données peut-il avoir un impact significatif ?

Plus que des mots

Je dois admettre que la protestation des consommateurs est en train d'attirer l'attention du secteur, et c'est un bon début. Lors de la conférence Dmexco qui s'est tenue en septembre à Cologne, en Allemagne, la durabilité a fait l'objet d'une attention croissante. Les sujets ESG occupent une place de choix dans une présentation sur l'écologie de l'attention et dans un exposé sur la durabilité dans la publicité, présenté par Andrew Hayward-Wright, d’IAB Europe.

Cependant, bien que les entreprises engagent un discours positif en public, il est à craindre que les expressions d'inquiétude ne reflètent pas un désir réel pour des actes concrets. Des exemples très médiatisés de greenwashing ont alimenté ces inquiétudes. Le directeur des enquêtes et des réclamations de l'Advertising Standards Authority (ASA), Miles Lockwood, a affirmé l'intention de l'organisme de réglementation “de veiller à ce que les allégations environnementales ne soient pas des promesses en l'air". 

En effet, plutôt que d'améliorer les références de l'entreprise en matière de durabilité, l'étiquetage du greenwashing peut avoir l'effet inverse, en attirant l'attention des consommateurs sur le préjudice écologique associé à une marque.

Comme l'a souligné Anthony Lamy, vice-président des ventes EMEA chez Vidmob, lors d'un entretien avec The Drum à Dmexco, "c'est bien que les entreprises parlent de durabilité à la conférence, mais d'un autre côté, je ne suis pas sûr qu'il s'agisse d'une véritable conversation au sein des entreprises". Les paroles ne font pas le changement, et les grandes déclarations d'intention peuvent masquer une inaction continue. Cependant, il existe plusieurs leviers que les entreprises peuvent actionner pour provoquer des changements tangibles, notamment dans la manière dont elles font de la publicité.

Comment les marques peuvent agir

Une campagne de marque durable doit réussir la tâche délicate de démontrer et de déclarer les valeurs d'une marque. Heureusement, Good-Loop a mis au point un mécanisme permettant d'y parvenir. Le Green Ad Tag de la plateforme publicitaire ciblée peut mesurer la totalité des émissions de carbone d'une campagne publicitaire digitale, en offrant une transparence et une précision suffisante pour que l'impact environnemental ne puisse être ignoré.

Cette évolution est importante puisqu'elle contribue directement à améliorer les efforts déployés par les annonceurs pour être plus durables. Le principal obstacle signalé par nos clients et notre secteur d'activité est la mesure et la possibilité d'intégrer des données dans la réflexion. Tout le monde veut opérer et gérer son entreprise de manière plus durable, mais ils ne disposent pas des données.

En se basant sur les données fiables fournies par Good-Loop, il est possible d'apporter des changements tangibles pour réduire les émissions et mesurer les efforts d'optimisation des campagnes publicitaires pour réduire les émissions de carbone. Good Loop propose également un format publicitaire "Watch-to-Donate" qui peut être déployé par les annonceurs pour avoir un impact direct sur de bonnes causes. Lorsqu'une wrapper tag (code qui collecte des informations en ligne) est ajoutée aux vidéos des annonceurs, un don gratuit - financé par l'annonceur - est généré chaque fois que quelqu'un regarde la vidéo. Cette stratégie permet aux annonceurs d'obtenir un engagement plus significatif vis-à-vis de la marque, tout en faisant appel à la bonne volonté des consommateurs en leur offrant un moyen gratuit de faire de la philanthropie. Il en résulte une mémorisation 4,5 fois plus élevée que la moyenne.

Un modèle durable pour la publicité digitale

La nature symbiotique de la publicité Watch-to-Don de Good-Loop reflète l'un des principaux avantages de l'adoption de la publicité durable par les annonceurs. En effet, réduire l'impact environnemental ne signifie pas nécessairement réduire l'impact de la publicité. L'augmentation de la transparence des campagnes publicitaires peut s'avérer bénéfique pour les marques, en les éloignant des informations négatives dont souffrent celles qui sont accusées de greenwashing. En octobre 2022, l'ASA a publié un rapport sur les allégations environnementales dans la publicité et a constaté que, parmi les personnes interrogées, beaucoup s'accordent sur la nécessité de transparence de la part des marques.

Au-delà de la confiance et de la fidélité entre les consommateurs et les marques facilitées par la transparence, celles capables de démontrer un réel engagement pour la durabilité bénéficieront d’une meilleure perception de la part des consommateurs. Une étude sur les attitudes des consommateurs sur la durabilité dans la publicité, a révélé que 76 % des consommateurs ont une opinion plus favorable des marques qui défendent des causes environnementales. Les bénéfices que les marques peuvent tirer d'une publicité durable, tout en évitant les perceptions de blanchiment écologique, sont immenses.

Les régulateurs, sont également de plus en plus sévères à l'égard du greenwashing, les annonceurs devraient examiner la manière dont leurs publicités sont diffusées afin de trouver une solution réaliste et efficace à long terme. A titre d’exemple, Good-Loop a présenté les changements que les annonceurs peuvent apporter. Un geste aussi simple que l'utilisation d'une police préchargée plutôt que personnalisée peut permettre d'économiser jusqu'à 2 % de l'empreinte carbone d'une publicité. En outre, le déploiement d'outils tels que le ciblage contextuel dans les campagnes et l'optimisation du parcours d'approvisionnement (SPO) peut réduire l'énergie et les intermédiaires inutiles dans le déploiement d'une campagne, réduisant ainsi l'empreinte carbone tout en améliorant le CPM. Pour préserver la planète et l'industrie de la publicité digitale sur le long terme, il est nécessaire d'instaurer rapidement un monde dans lequel ces pratiques sont la norme.

Pour permettre à notre secteur d'opérer des changements importants, une collaboration au sein de l'écosystème de la publicité digitale est indispensable. Le développement durable ne doit devenir "un standard", comme l'a déclaré Andrew Hayward-Wright de l'IAB lors de son intervention à Dmexco. En effet, au sein de l'IAB Europe, une initiative annoncée en septembre promet de "rassembler le secteur pour créer de nouvelles normes pour la diffusion de la publicité digitale", et créer le cadre d'un avenir véritablement durable. Cependant, au-delà de l'activité des organismes du secteur, le changement doit également être impulsé par les annonceurs eux-mêmes. Un changement tangible fondé sur la transparence est également bénéfique pour les marques. Et, si elle est bien menée, la durabilité sera bénéfique pour les annonceurs et pour la planète.