Taxis vs VTC : pour une réglementation en faveur des passagers

Le conflit taxis-VTC constitue une nouvelle illustration des difficultés auxquelles le gouvernement est confronté pour intégrer de manière équitable les innovations de services proposées par les plateforme Internet. Une solution équilibrée, prenant en compte les besoins des passagers et une meilleure mobilité urbaine, est souhaitable et probablement inéluctable.

Pour la première fois depuis des années, grâce au succès des plateformes numériques, il est possible de se déplacer facilement en transport à la demande. Séduits par leur simplicité et la qualité du service, des millions d’utilisateurs plébiscitent les applications VTC tant à Paris que dans les Régions.

Bien entendu cet essor dynamise le secteur du transport de personnes. Bien entendu l’émergence des plateformes VTC a un impact positif en terme d’emplois et de créations d’entreprises. Selon une enquête diffusée par France 2, plus d’un quart des chauffeurs VTC étaient chômeurs avant de devenir conducteurs, dont 40% de longue durée.

Plus fondamentalement, le développement des plateformes VTC permet d’envisager sérieusement des centres urbains sans voitures individuelles. Ce nouveau type de service préfigure en partie la mobilité urbaine de demain.

 Pourtant, face à la violence des taxis et à l’influence de la société G7 soucieuse de préserver son emprise sur ce marché, la réponse du Gouvernement est aujourd’hui répressive : interpellations de VTC, procédures pour « exercice illégal de la profession de taxi », multiplications des contrôles et des sanctions.

Que s’est-il passé ?

Les nouvelles applications VTC se sont développées dans un cadre réglementaire inadapté, conçu principalement pour les sociétés de taxis et permettant à ces dernières d’entretenir à leur bénéfice une pénurie de l’offre. A l’instar d’autres secteurs réglementés, le cadre n’a pas été repensé pour prendre en compte les nouveaux entrants et la réalité du marché. A cet égard, la loi Thévenoud adoptée fin 2014 n’a pas permis de mettre en place un cadre cohérent.

Toutefois, en pratique, plusieurs régimes ont coexisté ces dernières années : taxis, VTC et capacitaires dits « LOTI », ces derniers constituant un contingent important de chauffeurs sur les plateformes VTC.

Le Gouvernement a annoncé sa volonté de prohiber toute affiliation des chauffeurs LOTI  aux plateformes VTC, considérant, qu’en vertu du décret du 31 décembre 2014, ces derniers n’étaient habilités à transporter que des groupes de 2 à 9 passagers.

En réalité, de nombreuses sociétés de transport collectif n’ont jamais totalement respecté l’obligation faite aux LOTI d’avoir au moins 2 passagers. Par ailleurs, les taxis-capacitaires, lorsqu’ils travaillent pour les collectivités dans le cadre de transports médicaux ou scolaires, ne respectent également pas toujours cette obligation.

Largement incohérent, le traitement du dossier taxi-VTC ne semble pas s’inscrire dans le cadre d’une véritable stratégie pour le transport de personne français. Il traduit un certain malaise pour régler un conflit assez symptomatique de la manière dont certaines professions règlementées (pas toutes fort heureusement !) réagissent face à l’émergence de solutions numériques.

Plus de 10.000 chauffeurs LOTI sont aujourd’hui amenés à cesser toute activité (selon les plateformes), avec pour le moment une impossibilité de basculement vers le statut VTC.  Par ailleurs, faute de solutions, la position du Gouvernement entrainera une chute immédiate de l’offre de service de transport à la demande, avec une augmentation corrélative soit du temps d’attente, soit des tarifs, dans les deux cas au détriment des passagers.

Sans ignorer les interrogations légitimes que suscite l’émergence des plateformes d’intermédiation VTC (statut social des chauffeurs, déséquilibres entre les différents régimes, indemnisation des artisans-taxis, etc.), l’idée d’un retour au statu quo antérieur paraît aujourd’hui non seulement inopportune, mais surtout peu réaliste pour l’ensemble des acteurs du marché, y compris les taxis. Quelle alternative crédible pour des centres villes décongestionnés, plus mobilité et moins de pollution ?

Enfin, si la priorité du Gouvernement est la création d’emplois, cette prise de position est pour le moins surprenante. En tout état de cause, seule une solution pérenne en faveur des passagers et d’une mobilité urbaine respectueuse de l’environnement a véritablement du sens. Cela passera nécessairement non seulement par l’acceptation, mais plus encore le soutien à l’innovation numérique.