Valentin Stalf (N26) "N26 compte 1,5 million d'utilisateurs en Europe"

Le patron de la néobanque allemande revient sur la stratégie d'acquisition de l'entreprise et évoque les chantiers à venir.

Valentin Stalf, cofondateur et CEO de N26. © N26

JDN. Où en est l'adoption de N26 ?

Valentin Stalf. Nous avons désormais 1,5 million d'utilisateurs en Europe. C'est une belle progression car nous avons passé le million seulement en juin dernier. Chaque jour, plus de 5 000 nouveaux clients rejoignent N26. Nous sommes arrivés à un stade où notre produit est supérieur à la concurrence (les banques traditionnelles, ndlr), que ce soit en termes d'expérience utilisateur et de prix. Une fois qu'un utilisateur ouvre l'application N26, sa fréquence d'utilisation ne fait qu'augmenter au fil du temps.

Qu'en est-il de votre internationalisation ?

Nous nous lançons ce 4 octobre au Royaume-Uni et nous prévoyons de nous lancer aux Etats-Unis au premier trimestre 2019.

Les Etats-Unis est un pays où il n'existe pas vraiment de néobanques comme nous en avons en Europe. Comment comptez-vous conquérir les Américains ?

Nous avons déjà fait des tests utilisateurs. Nous avons même une liste d'attente avec plusieurs dizaines de milliers de futurs clients. Je pense que le marché est prêt mais nous verrons quand nous nous lancerons. Je pense qu'il y a même une plus grande ouverture d'esprit de la part des banques américaines qu'européennes. D'ailleurs, nous nous lançons avec l'aide d'un partenaire bancaire (le nom n'est pas encore communiqué, ndlr). Il existe aussi des petites néobanques aux Etats-Unis qui se sont récemment lancées et qui rencontrent du succès. Mais leurs fonctionnalités ne sont pas aussi poussées que celles que nous avons en Europe. Je pense donc que nous avons l'opportunité de croître très vite là-bas.

"Nous nous lançons ce 4 octobre au Royaume-Uni et aux Etats-Unis au premier trimestre 2019"

Votre stratégie est-elle la même aux Etats-Unis qu'en Europe ?

Nous avons une stratégie globale. Nous pensons que nous pouvons construire une marque globale pour la finance ou la banque similaire à Netflix ou Spotify. La seule banque qui est un peu globale aujourd'hui est HSBC, mais elle n'a pas de produit global. Le moment est donc venu d'apporter un produit bancaire qui soit disponible partout dans le monde. Je pense que les besoins sont les mêmes partout. Les Américains comme les Européens cherchent aujourd'hui une banque transparente et avec une bonne expérience utilisateur. Seuls quelques détails diffèrent. Par exemple, les Américains aiment les cartes de crédit alors que les Européens préfèrent les cartes de débit.

Quelle est votre stratégie d'acquisition client ?

Nous faisons beaucoup de branding car la notoriété de N26 est encore assez faible. Dans le monde de la tech, tout le monde nous connait mais si vous demandez aux gens dans les rues de Berlin ou Paris s'ils connaissant N26, peu de gens répondront oui. Actuellement nous testons des campagnes publicitaires en Europe. A Paris, nous faisons de la publicité dans le métro, en Autriche nous faisons de la publicité sur les taxis. Nous essayons d'être urbain, être là où notre cible se trouve.

"Nous avons prévu de sortir de nouvelles fonctionnalités liées aux dépenses quotidiennes dans les semaines et mois à venir"

Notre cible est les jeunes, ceux qui débutent leur carrière professionnelle et les étudiants. Mais le branding coûte cher. Il faut faire attention de ne pas dépenser trop d'argent et trouver le bon canal d'acquisition. Il est par exemple difficile de tracker les campagnes publicitaires papier et TV. En plus, de moins en moins de personnes lisent les journaux ou regardent la télévision aujourd'hui. Ils utilisent de plus en plus Netflix ou Amazon Prime. Nous faisons donc peu de campagnes dans les journaux et à la télé.

Quel est votre coût d'acquisition ?

Environ un dixième des banques traditionnelles, entre 10 et 20 euros. Comme plus de 50% de nos utilisateurs viennent grâce au bouche-à-oreille, cela baisse la moyenne du coût d'acquisition.

Pourquoi avoir opté pour un modèle de plateforme avec des partenariats pour commercialiser certains produits (Younited Credit en France pour le crédit à la consommation par exemple) plutôt que de faire tout en interne comme votre concurrent Revolut ?

Notre objectif est d'offrir le meilleur produit à nos clients, peu importe qu'il vienne de notre équipe ou d'une autre entreprise. Nous voyons N26 plutôt comme un centre des finances personnelles dans lequel l'utilisateur à accès aux meilleurs produits qui existent.

Avez-vous prévu de nouer d'autres partenariats dans les mois à venir ?

Nous avons prévu de sortir de nouvelles fonctionnalités dans les semaines et mois à venir mais elles concerneront les dépenses quotidiennes. Ces changements viendront donc de chez nous. Nous pensons que nous pouvons être encore meilleurs sur l'ergonomie de l'application et les fonctionnalités de dépenses quotidiennes : la façon dont on paie, comment partager des dépenses avec des amis… En revanche, nous ne prévoyons pas d'ajouter prochainement de nouveaux produits.

Que manque-t-il aujourd'hui aux néobanques pour devenir un compte principal et concurrencer les banques traditionnelles ?

Nous sommes partis du principe qu'au début de l'aventure nous devions nous concentrer sur une chose : les dépenses quotidiennes (effectuer des transactions, payer des amis, faire un virement…). Si ces produits sont très bons, alors l'adoption des produits financiers plus complexes comme le prêt immobilier suivront. Si nous lancions un produit de prêt immobilier maintenant, cela serait intéressant pour 3 à 5% de nos utilisateurs mais ça ne changerait pas l'ampleur de notre produit. Une fois qu'on sera prêt à le faire, qu'on aura une expérience client meilleure que la concurrence et un prix plus compétitif, on pourra se lancer. Je suis persuadé que ce n'est pas un produit dont nous avons besoin maintenant pour avoir du succès. 

Quels sont vos objectifs pour 2019 ?

Continuer à innover. Nous allons aussi procéder à une grosse amélioration de notre interface mobile. Le deuxième focus est l'internationalisation, avec le lancement aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. Et bien sûr, nous continuerons à renforcer la croissance dans nos marchés en Europe dont la France.