Quel nouveau modèle bancaire pour 2020 ?

Externalisation de la gestion des ATMs, émergence du video-banking, open banking... Le secteur financier va encore vivre de grands bouleversements.

Il va sans dire que 2019 a été une année chargée pour le secteur bancaire. Des thématiques et préoccupations majeures ont émergé ou se sont confirmées : l'accessibilité au cash, la rentabilité des banques et de leurs agences, … Parallèlement à la consolidation d'un certain nombre de tendances technologiques importantes, 2020 sera marquée par l'émergence toujours plus prononcée de nouveaux modèles bancaires.

1.      L’externalisation de la gestion des ATMs va s’accélérer : différents modèles possibles

Dans un contexte de restructuration du réseau bancaire et de transformation des agences, la pérennisation du distributeur automatique est remise en question. En effet, les banques, toujours engagées dans une politique de réduction des coûts, doivent faire face aux enjeux suivants : accessibilité aux espèces et rentabilité du canal automate. Alors qu’une étude publiée en juillet 2019 par la Banque de France confirmait une très bonne accessibilité au cash par le biais du réseau d’automates, le Sénat s’est emparé du débat dans le but de maintenir cette "bonne accessibilité" dans les déserts bancaires et a conseillé aux banques de mutualiser leurs distributeurs. D’ailleurs, cette tendance de mutualisation va bientôt être adoptée chez nos voisins par les quatre plus importantes banques belges qui ont annoncé en tout début d’année mettre en place d’ici 2021 un réseau commun de distributeurs.

En France, l’annonce en juillet dernier du partenariat entre Brink’s France et BPCE signé "pour l’exploitation et la gestion dynamique des automates Banque Populaire et Caisse d’Epargne", s’inscrit dans cette tendance. Cette première en France risque d’être particulièrement scrutée par les autres banques avec le lancement d’un modèle d’externalisation du parc automates hybride. En faisant appel à un tiers externe comme un transporteur de fonds pour gérer son parc d’automates, BPCE devrait diminuer ses coûts de manière significative. En effet, au regard des différents coûts engagés, ceux du transporteur de fonds, responsable de la gestion du cash, sont les plus importants dans le cadre de l’exploitation d’un DAB.

Au-delà de ce partenariat et toujours avec l’objectif de palier à la disparition de distributeurs automatiques de billets, Brink’s a continué de secouer le monde bancaire avec le lancement de son initiative "Point Cash", un distributeur permettant avant tout de de délivrer des billets, précisément dans les secteurs où ces derniers se font rares. Le transporteur de fonds Loomis a également adopté cette initiative et vient d’annoncer avoir installé son deuxième DAB à la demande de la ville Millery située près de Lyon.

Dans cette même tendance, les agences bancaires partagées et en marque blanche pourraient également devenir une option de plus en plus attrayante pour les banques dans les années à venir. Au lieu d'avoir à fermer une agence, une banque pourrait en effet choisir de la garder ouverte tout en partageant son espace et sa technologie avec une ou plusieurs autres institutions financières.

Ces différents modèles d’externalisation et de gestion par un acteur tiers donnent aux banques la possibilité de réaliser d'importantes économies d’échelle tout en maintenant leur présence sur le territoire et de partager leurs ressources (que ce soit des automates ou des agences).

2.      Les projets d’AI vont (enfin) décoller

L’intelligence artificielle est un terme générique regroupant un vaste ensemble d'innovations possibles. D’autant que, jusqu’à présent, lorsque des projets d'IA sont évoqués, il s’agit bien souvent de projets de front office tels que les chatbots ou robots-advisors pour soutenir les opérations à la clientèle sur différents canaux… Si ces projets vont bien se concrétiser d’ici quelques années, ceux qui auraient le plus de chance de se réaliser à court terme seraient plutôt ceux affectant la partie back office notamment en matière de détection et de gestion des fraudes. Toutefois l’un des domaines où l’IA pourrait le plus révolutionner le secteur bancaire serait celui du monitoring des automates bancaires. En effet, cette technologie permettrait d’optimiser la gestion du parc d’ATM. Grâce au prédictif, il est en effet désormais possible de prévoir les pannes changeant ainsi la philosophie de la maintenance de ce canal. Ainsi, l’IA pourrait permettre une redistribution du parc d’ATMs mais aussi une amélioration de la disponibilité des machines de 97 à 98%. Les banques pourront optimiser les 2% restant et, de la sorte, garantir une meilleure accessibilité au service à la clientèle.

3.      L’open banking

Stimulées par l'augmentation de la concurrence et de la demande des clients pour un service exceptionnel, mais aussi par l'adoption de la directive sur les services de paiements (DSP2), sur l’open banking, il reste encore beaucoup de travail à accomplir par les banques. En ayant recours aux interfaces de programmation d'application (API), ces dernières seraient en mesure de réaliser des transactions et des retraits en circuit fermé (closed-loop), afin d’en faire diminuer le coût. Toutefois, cette technologie n’est pas encore mature et peu normée. Des expérimentations vont être réalisées au sein des banques en 2020 mais son accélération va sans doute avoir lieu avec l’arrivée de nouveaux entrants ou néobanques.

4.      L’émergence du video-banking

Afin de palier la fermeture des agences bancaires, les banques sont à l’étude de nouvelles solutions permettant de conserver la proximité avec le client. En 2020, les services bancaires par vidéo pourraient gagner en importance, à mesure que les services bancaires deviendront de plus en plus automatisés. L’ensemble des clients pourra alors avoir recours au vidéo-banking de chez eux ou en agence restreinte (agence bancaire dont l'ouverture est maintenue mais offrant un nombre limité de services à ses clients.) pour tout type de services financiers ou extra financiers dès lors qu’ils auront un "besoin d’assistance".

Enfin, en appliquant les nouvelles technologies au vidéo-banking, cette solution pourrait renforcer davantage l’expérience client. Toutefois, attention aux banques qui considéreraient la vidéoconférence comme un canal supplémentaire. Ce nouveau service doit s’intégrer à l’expérience multicanal dans sa globalité afin d’être rentable pour la banque.

5.      La cybersécurité devient une priorité

En 2020, les établissements financiers vont continuer à faire face à un nombre croissant de menaces, dont des activités cybercriminelles virtuelles, difficiles à détecter, allant des attaques de logiciels malveillants au vol d’identité. Dans un monde de plus en plus informatisé et où l’utilisation des espèces diminue, la cybersécurité est vitale. Heureusement, les banques disposent de différents outils pour se protéger, dont l'IA qui permet notamment d’améliorer la détection de la fraude et la gestion du risque en temps réel en analysant les données pour identifier toute activité suspecte.

Les défis auxquels les banques sont confrontées aujourd'hui sont nombreux. Toutefois, ils peuvent se résumer par la numérisation accrue des services, pour assurer une meilleure convivialité des services financiers, par l'adoption ou le renforcement des modèles d'innovation ouverte grâce au DSP2, par l'exploitation des données clients pour offrir des services personnalisés répondant à leurs besoins réels, et enfin par l'intégration des nouveaux moyens de réintégrer l’humain dans les relations avec les clients et les accompagner dans la transformation digitale en cours. En définitive, les 12 prochains mois promettent d’être riches en sujets passionnants et en défis à relever pour le secteur bancaire ; une année 2020 qui s’annonce placée sous les signes de la transformation des business models et l’amélioration de l’expérience client.