OpenSea veut permettre l'avènement du web des créateurs grâce aux NFT

OpenSea veut permettre l'avènement du web des créateurs grâce aux NFT Spécialisée dans l'échange de NFT, ou jetons non fongibles, la plateforme permet notamment aux artistes de diffuser et monétiser leurs œuvres auprès du public.

À peine quatre bougies et déjà plus de 13 milliards de dollars de valorisation : c'est ce qu'on appelle un succès fulgurant pour la jeune pousse OpenSea. Née dans la Silicon Valley, cette start-up de la blockchain a levé 300 millions de dollars auprès de divers investisseurs en capital-risque en janvier. La jeune pousse fonctionne comme une place de marché virtuelle qui permet d'acheter des NFT, ou jetons non fongibles, ces titres de propriété numérique basés sur la blockchain qui permettent d'authentifier et tracer la valeur d'un bien, notamment virtuel, sur Internet.

La folie des NFTs

S'il existe tous types de NFT, les plus populaires sont aujourd'hui des œuvres d'art numériques. Une plateforme comme OpenSea permet aux artistes de les mettre aux enchères et de les vendre ainsi à d'autres internautes contre une somme en cryptomonnaie, la plus utilisée étant l'éther, la monnaie virtuelle de la plateforme Ethereum.

Les transactions peuvent parfois atteindre des sommes faramineuses. Ainsi, les Bored Apes Yacht Club, une collection de 10 000 NFTs représentant des portraits de singes arborant toutes sortes de couvre-chefs, lunettes et autres accessoires, s'arrachent actuellement à 200 000 dollars le titre de propriété virtuel. Le footballeur Neymar, le rappeur Eminem et le basketteur Stephen Curry ont tous acquis le leur, certains aborrant ensuite fièrement leur singe en guise d'avatar sur les réseaux sociaux.

Mais les NFT peuvent également être des artefacts utilisables dans un jeu vidéo, des clips sportifs à l'intention des fans, ou encore des morceaux de musique : l'an passé, le groupe de rock américain Kings of Leon a mis en vente son dernier album sous forme de NFT, permettant aux fans d'acquérir une édition vinyle collector ou encore de s'assurer des places au premier rang pour les concerts à venir.

Des revenus qui explosent

La blockchain, les cryptomonnaies et les NFT connaissant une popularité croissante, les plateformes comme OpenSea rassemblent de plus en plus d'utilisateurs enthousiastes, ce qui ne manque pas d'attirer l'attention des investisseurs. Ainsi, en mars 2020, le total des transactions réalisées sur OpenSea s'élevait à 1,1 million de dollars, générant 28 000 dollars de revenus pour la plateforme (grâce à une commission de 2,5%). Mais en 2021, les choses se sont accélérées à toute vitesse. En juillet, la plateforme lève 100 millions de dollars auprès du célébrissime investisseur Andreessen Horowitz. On s'y échange alors pour 350 millions de dollars en NFT, un chiffre déjà fort respectable, multiplié par dix le mois suivant, générant 85 millions de dollars de revenus. En janvier, OpenSea comptait plus d'un million d'utilisateurs actifs.

Contrairement à nombre de ses rivaux, qui se spécialisent sur un usage particulier autour des NFT (art, jeux vidéo, musique, sport…), les fondateurs, Devin Finzer et Alex Atallah, ont fait le choix de construire une plateforme agnostique, laissant les utilisateurs décider eux-mêmes de l'usage qu'ils souhaitent privilégier. Une stratégie qui semble pour l'heure s'avérer payante.

Elle mise également sur des acquisitions ciblées susceptibles d'améliorer l'expérience utilisateur : en janvier, OpenSea a ainsi racheté Dharma Labs, un porte-monnaie virtuel basé sur la blockchain Ethereum, qui permet aux utilisateurs de transférer facilement des fonds entre leurs différents comptes.

Bugs à gogo

La plateforme rencontre toutefois des problèmes en matière de cybersécurité qui pourraient lui causer du tort auprès des utilisateurs. En décembre dernier, le propriétaire d'une galerie d'art virtuelle, Todd Kramer, s'est ainsi fait voler 16 images de Bored Apes en sa possession, pour plus de deux millions de dollars. Une paille par rapport aux 200 millions volatilisés de la plateforme le 20 février.

Deux cas loin d'être isolés, puisqu'au moins 13 cas de figure similaires ont été recensés par le medium Blockwork, spécialisé dans l'actualité de la blockchain et des cryptomonnaies. Au total, la plateforme a dû débourser des millions de dollars en guise de compensation aux utilisateurs qui ont été spoliés. 

Début février, OpenSea révélait en outre que 80% des NFTs créés sur sa plateforme étaient frauduleux, c'est-à-dire constituées d'œuvres plagiées ou inexistantes. La plateforme a récemment affirmé œuvrer à des solutions pour corriger les bugs techniques qui ont permis ces fraudes.

Préparer le web des créateurs

Mais il en faut davantage pour décourager les crypto-enthousiastes. La très vénérable maison de vente aux enchères britannique Sotheby's a récemment annoncé la création de son Sotheby's Metaverse, une salle de vente virtuelle dédiée aux collectionneurs de NFTs. L'œuvre 5,000 Days, de l'artiste Beeple, s'est vendue pour la somme astronomique de 69 millions de dollars.

Au total, plus de 28 milliards de dollars d'investissement dans le monde sont allés aux start-up spécialisées dans les cryptomonnaies et les NFTs en 2021, d'après PitchBook, une entreprise qui traque ces investissements. Ces jeunes pousses comptent actuellement parmi les plus attractives de la Silicon Valley, et n'ont aucune peine à recruter les meilleurs talents. Certains n'hésitent pas à quitter des emplois grassement rémunérés chez Facebook et Google pour rejoindre ce qu'ils considèrent comme un nouvel eldorado.

Car au-delà des transactions d'œuvre d'art virtuelles qui flirtent avec la spéculation la plus débridée, c'est le futur de l'internet que les start-up de la blockchain, des cryptomonnaies et des NFTs entendent inventer. Au web 2.0, ou web social, qui a permis aux utilisateurs de créer facilement toutes sortes de contenus, tout en mettant leurs données et leurs vies privées sous le contrôle d'une poignée de géant technologique, doit selon cette vision succéder un Web 3.0, ou web des créateurs. Grâce à la décentralisation et à la désintermédiation permise par la blockchain, cette troisième mouture de l'internet doit rebattre les cartes en faveur des créateurs de contenus, en leur permettant de facilement diffuser et monétiser leurs œuvres auprès de leur communauté.

OpenSea entend être à la pointe de ce succès, mais la concurrence s'annonce rude. En octobre dernier, Coinbase, la première plateforme d'échange de cryptomonnaies aux Etats-Unis, a annoncé le lancement de sa propre plateforme d'échanges de NFT. En quelques semaines, Coinbase a rassemblé 2,5 millions d'inscrits sur sa liste d'attente.