Interconnexion celtique : comment le projet France-Irlande bénéficiera aux deux pays ?

Les plans pour construire la première liaison électrique sous-marine qui facilitera l'échange direct d'énergie entre l'Irlande et la France viennent d'être proposés. L'achèvement préliminaire de cette liaison, baptisée interconnexion celtique, est prévu pour 2026. D'une longueur d'environ 575 km et d'une capacité de 700 MW, le projet vise à relier la côte nord de la France à la côte sud de l'Irlande.

Ce schéma d’interconnexion répond à l’objectif européen de transition énergétique, c’est-à-dire de faciliter le développement des énergies renouvelables et la transition vers des ressources à faible émission de carbone, tout en contribuant au renforcement de la solidarité électrique entre les deux pays. Il est également reconnu comme un projet d’intérêt commun (PCI) par l’Union européenne. C’est l’un des tous derniers de la relation toujours plus forte entre l’Irlande et la France.

Une avancée révolutionnaire dans l’approvisionnement énergétique durable

L’interconnexion celtique va accélérer la transition énergétique européenne, en favorisant le développement des énergies renouvelables tout en contribuant à la solidarité électrique entre les États membres de l’Union. Une fois terminé, le projet constituera une liaison fiable à haute capacité entre les deux pays, ce qui "stimulera la concurrence sur le marché unique de l’électricité de toute l’île et soutiendra le développement des énergies renouvelables, en particulier en Irlande", selon Eirgrid. L’interconnexion favorisera donc le développement durable de l’énergie éolienne en Irlande et son intégration dans le système électrique européen. Dans le même temps, en France, la nouvelle interconnexion assurera la consommation d’électricité verte acheminée depuis l’Irlande. Le directeur général d’EirGrid, Fintan Slye, a également ajouté que "cette liaison améliorera la sécurité d’approvisionnement en électricité sur l’île d’Irlande et augmentera la concurrence, tout en faisant baisser les prix pour les clients".

L’achèvement du projet d’interconnexion celtique contribuera à la réalisation des objectifs du plan d’action pour le climat de l’Irlande, qui sert de feuille de route au pays pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et lutter contre la crise climatique. Le nouveau projet de loi sur le climat s’engage sur un objectif zéro émissions nettes d’ici 2050 et fournit un cadre de gouvernance pour établir une réduction moyenne des émissions de 7 % par an au cours des 10 prochaines années. Les mesures de ce plan comprennent le développement de bonnes pratiques dans des secteurs industriels clés et une feuille de route d’actions visant à soutenir la décarbonation des grandes industries ; soutenir les pôles d’innovation et la chaîne d’approvisionnement pour les énergies renouvelables offshore ; et veiller à ce que chaque région dispose de la capacité et de compétences efficaces pour soutenir une transition juste.

Une relation fondée sur des valeurs partagées et un héritage de longue date

Lors de sa dernière visite en Irlande, l’ambassadeur français Vincent Guérend a envoyé un message optimiste dans l’espoir de renforcer les relations post-Brexit de l’Irlande avec la France : "Nous voulons dire au peuple Irlandais que la France est votre voisin le plus proche." Bien sûr, Guérend faisait référence à la nouvelle proximité que l’Irlande et la France connaissent politiquement, après le retrait de la Grande-Bretagne de l’UE. Cette relation a déjà été consolidée par le soutien de la France à l’Irlande tout au long du Brexit, démontré par son opposition à une frontière britannique dure entre l’Irlande du Nord et la République. Cet épisode a démontré que la France était l’un des alliés les plus fidèles de l’Irlande.

La France et l’Irlande ont une relation politique privilégiée car les deux nations ont beaucoup en commun. Par exemple, leur attachement aux droits de l’homme, aux libertés fondamentales, à la justice internationale et au développement durable, pour ne citer que quelques éléments fédérateurs. Non seulement ils partagent les mêmes valeurs, mais les deux nations partagent aussi des drapeaux très similaires. Le drapeau irlandais est un écho du drapeau tricolore républicain français. Son inspiration a été puisée grâce à des patriotes irlandais qui l’ont rapporté des barricades révolutionnaires de Paris. Les liens qui unissent l’Irlande à la France ne sont pas seulement des éléments du passé, aujourd’hui les touristes irlandais et français se visitent respectivement avec un niveau toujours croissant. Le français est également la langue étrangère la plus populaire auprès des étudiants Irlandais.

Au fil des ans, l’Irlande a accueilli de nombreuses visites présidentielles remarquables, dont la visite privée du général de Gaulle en juin 1969, au cours de laquelle il a rappelé ses racines irlandaises du côté de sa mère. Une autre visite influente a été celle de François Mitterrand en 1988, au cours de laquelle il a prononcé un fervent discours devant le Parlement en faveur du projet Européen, devenant ainsi le premier président français à s’adresser au Dáil (Parlement Irlandais). Ces visites n’ont pas seulement eu lieu sur le sol irlandais, il y a également eu de nombreuses visites en France de membres éminents du gouvernement Irlandais. Par exemple, en 2017, le Taoiseach Leo Varadkar s’est rendu à Paris où il a rencontré le président de la République française. En outre, au cours de la présidence irlandaise de l’UE en 2013, le rythme et le niveau des visites bilatérales ont considérablement augmenté et sont restés élevés.

Des liens politiques et environnementaux forts

Pour démontrer leurs liens politiques et environnementaux forts, la France et l’Irlande ont élaboré le Plan d’action commun (2021-2025) pour refléter et mettre en œuvre leurs priorités communes. La finalisation de cet accord a eu lieu lors de la visite en Irlande du Président Emmanuel Macron, le 26 août 2021, où il a été signé par le ministre des Affaires étrangères Simon Coveney T.D. et Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères (DFA Ambassade d’Irlande : Août 2021). Les principaux objectifs énoncés dans le Plan d’action conjoint sont de soutenir le développement durable ; accroître les échanges commerciaux ; favoriser l’économie numérique ; renforcer les liens entre l’éducation et la recherche ; promouvoir la langue française et favoriser la coopération culturelle. Le Plan fait également référence à l’ouverture d’un consulat général d’Irlande à Lyon et d’un consulat honoraire d’Irlande en Bretagne, dans l’objectif de renforcer encore les relations entre l’Irlande et la France.

L’Irlande a également fait preuve d’un engagement inébranlable envers l’UE depuis son adhésion en 1973. Au fil des décennies, le gouvernement et les citoyens Irlandais sont restés massivement favorables à l’adhésion à l’UE. En témoigne l’attachement qu’ont 71% des citoyens Irlandais à l’UE contre 40% en moyenne dans les autres pays de l’Union. L’Irlande est également l’un des pays les plus tournés vers l’extérieur et les plus engagés au niveau international dans le monde, car elle continue de plaider, tant au niveau de l’UE qu’au niveau international, en faveur d’un commerce libre et équitable et pour des normes environnementales et du travail les plus strictes. L’Irlande a également été classée parmi les 10 pays de l’UE les plus innovants dans le classement européen de l’innovation (EIS). Dans le Global Innovation Index, l’Irlande a également été classée 1ère pour la diffusion des connaissances et 1ère pour l’impact des connaissances, et 15ème au niveau général. Tous ces aspects contribuent au rôle pionnier et innovant que joue l’Irlande dans l’UE.

Renforcement des relations commerciales mutuelles après le Brexit

En plus de leur relation politique renforcée, la France et l’Irlande ont développé de riches relations commerciales et d’investissements croisés l’une avec l’autre. De nombreuses statistiques en témoignent : par exemple, la France est le neuvième bénéficiaire mondial des investissements irlandais. Tandis que les investisseurs irlandais détiennent près de 4,8 milliards d’euros d’actifs en France dans 300 entreprises employant plus de 20 000 personnes, les investissements français en Irlande sont évalués à 21,5 milliards d’euros, avec un flux de 3,2 milliards d’euros en 2015. Il existe également environ 350 entreprises françaises en Irlande, employant 13 000 personnes, ce qui fait de la France le quatrième investisseur en Irlande, selon les statistiques irlandaises. Par ailleurs, les échanges de biens entre la France et l’Irlande se sont élevés à 9,8 milliards d’euros en 2018, soit une hausse de 2,5% par rapport à 2017. Selon les douanes françaises, les exportations irlandaises se sont élevées à 3,2 milliards d’euros, soit une augmentation de 12,1%, tandis que les importations irlandaises ont diminué de 1,5% à 6,6 milliards d’euros. Les chiffres du commerce et de l’investissement montrent que malgré le Brexit et les effets qu’il a eus sur les deux pays, la France et l’Irlande ont démontré que leurs relations commerciales, au lieu d’en souffrir, se renforcent face aux changements. À la suite du Brexit, l’Irlande deviendra également la dernière nation principalement anglophone de l’Union Européenne.

La relation entre la France et l’Irlande est évidemment une relation qui a résisté à l’épreuve du temps, tout en continuant à se renforcer au fil des ans. Leurs valeurs politiques, environnementales et culturelles communes sont ce qui fait prospérer la relation, ainsi que le respect mutuel envers chaque nation. L’Irlande et la France ont montré qu’elles étaient alliées tout au long du Brexit et ont refusé de le laisser impacter les frontières de l’Irlande. En outre, avec l’achèvement de l’interconnexion celtique à l’horizon, nos nations seront connectées de manière durable et technologiquement innovante, ce qui apportera de nombreux avantages aux deux pays tout en marquant le début d’une nouvelle ère de croissance et de développement dans les relations franco-irlandaises.