Reconstruire notre mobilité, sans reproduire les erreurs du passé

La reprise progressive des transports en commun et du réseau ferroviaire, associée à l'adoption massive du télétravail, présage une transformation irréversible de nos façons de nous déplacer.

"Nous devons apprendre à vivre avec ce virus". Ces mots annoncent la couleur d’un déconfinement qui chamboule nos repères. La reprise progressive des transports en commun et du réseau ferroviaire, associée à l’adoption massive du télétravail, présage une transformation irréversible de nos façons de nous déplacer.

Ces contraintes vont-elles perdurer et modifier notre trajectoire vers une mobilité plus durable et responsable ?

La nouvelle mobilité : une révolution qui a démarré bien avant la crise du Covid...

En 2011, Adam Millard-Ball et Lee Shipper évoquent pour la première fois le phénomène de "peak car", un point de bascule qui annonçait le déclin irréversible de la voiture personnelle. Cette dernière, décriée comme principale responsable des pics de pollution et du fort niveau de congestion dans les métropoles, est devenue la cible des pouvoirs publics et l’objet de disruption du MaaS (Mobility as a Service).

L'essor des nouvelles solutions de mobilité partagées et connectées est conjointement accéléré par une tendance de fond de quête d’amélioration de la vie urbaine et par les initiatives gouvernementales : LOM (Loi d’Orientation des Mobilités), piétonnisation de la capitale, entre autres.

La voiture personnelle, le moyen de transport ultra dominant du XXème siècle n’est plus le moyen le plus pratique pour aller d’un point A à un point B en zone "ultra-urbaine". D’autant plus qu’elle demeure une source de dépenses importante pour les ménages et pour la ville. Par ailleurs, on note une tendance à la baisse des ventes de voitures neuves aux particuliers, qui témoigne du désintérêt grandissant pour la voiture personnelle.

...Et qui ne sera pas ralentie par celle-ci

La crise du Covid-19 ajoute une nouvelle variable à l’équation : les mesures de distanciation physique, qui bien évidemment nous poussent à privilégier des moyens de transport individuels. Certains y voient à juste titre un risque de retour en force de la voiture personnelle. Il faut à tout prix prévenir cette régression qui serait catastrophique pour nos villes à plus d’un titre dont la qualité de l’air qui, soit dit en passant est un aggravateur de risque dans le contexte d’une pandémie respiratoire.

Il est néanmoins important de nuancer ces propos et de voir le verre à moitié plein. Les Franciliens n’ont pas oublié en l’espace d’un confinement à quoi ressemble le périphérique parisien à 8h du matin. Et les Parisiens demeurent toujours aussi déterminés à vivre dans une ville démotorisée. Ainsi l’enquête menée fin avril auprès de 1425 utilisateurs issus de la communauté Virtuo démontre que la démotorisation urbaine est toujours d’actualité, malgré les nouveaux défis imposés par le Covid-19.

Pour un usage plus optimisé de la voiture

Les résultats du sondage sont clairs : bien que la voiture soit le moyen de transport de prédilection pour les longs trajets, la mobilité douce sera privilégiée au quotidien. Déjà leader sur les longues distances, la voiture récupère une part plus importante pour les trajets de plus de 100 Km et plus, passant d’un taux de prédilection de 54% à 77%. Cette tendance est assez évidente, car elle témoigne d’un rabattement sur la voiture vs. le train ou l’avion. 

Nous pouvons donc anticiper une demande plus fréquente pour la location ponctuelle, pour les trajets de 100km ou plus, ou leasing flexible de quelques mois pour les résidents des banlieues qui dépendent des transports en commun pour se rendre au travail.

À contrario, en ce qui concerne les déplacements courts du quotidien, la voiture ne remplace pas directement les transports en commun. En effet, malgré une légère augmentation de son usage, le gros du report modal (au détriment des transports en commun) se fait au profit des moyens de mobilité douce, et notamment du vélo. Presque un tiers des Français (29%) ont répondu vouloir opter pour des moyens de transports durables après le 11 mai notamment pour se rendre au travail selon le sondage de Cyclofix (entreprise de réparation de vélos et trottinettes électriques).

Contre un retour à la possession massive

Le comportement des utilisateurs nous conforte dans une nouvelle conception de la voiture en tant que service à la demande. En effet, plus d’un quart de répondants motorisés déclarent vouloir se défaire de leur voiture sans la remplacer. Pour 35% d’entre eux, garder un véhicule qu’ils n’utilisent que très ponctuellement n’aurait pas de sens.

La deuxième raison citée est le besoin de faire des économies. Dans un contexte de crise économique, les ménages seront contraints de réduire leurs dépenses. Posséder une voiture représente un budget annuel d’environ 7 000€, selon le Budget de l’Automobiliste de l’ACA, une charge dont les foyers urbains peuvent se passer en optant pour d’autres solutions de mobilité.

Bien que 40% des sondés démotorisés estiment qu’ils auront davantage besoin d’une voiture pour les 12 prochains mois, moins de la moitié d’entre eux souhaitent en acheter une. Ces derniers opteront sans doute pour des solutions de voitures à la demande, pour un usage ponctuel !