Trottinettes : Dott, Lime et Tier remportent Londres, immense mais contraignante

Trottinettes : Dott, Lime et Tier remportent Londres, immense mais contraignante Les opérateurs pourront déployer 6 600 appareils chacun pendant un an dans la capitale britannique. Un marché très régulé au potentiel difficile à évaluer.

C'est potentiellement le plus gros marché européen que viennent de remporter trois opérateurs de trottinettes en libre-service. Dott, Lime et Tier ont été sélectionnés via un appel d'offres par l'autorité de transport londonienne pour démarrer une expérimentation d'un an à partir du 7 juin. La capitale britannique est l'un des derniers marchés majeurs encore inexploré par les opérateurs en Europe : les trottinettes y sont tout simplement interdites, comme dans le reste du Royaume-Uni. Mais cette interdiction a été levée provisoirement l'année dernière, permettant aux villes d'organiser des expérimentations de douze mois avec des entreprises proposant ces engins en libre-service (les trottinettes personnelles demeurent interdites). Les trois opérateurs sélectionnés par Londres pourront déployer à terme jusqu'à 6600 engins chacun, soit plus qu'à Paris, le plus gros marché européen aujourd'hui (5000 appareils chacun avec trois opérateurs). Ils vont toutefois démarrer avec une petite centaine d'appareils chacun et seulement dans une minorité de quartiers londoniens, avant de s'étendre et de grossir leurs flottes progressivement.  

Ce résultat conforte les bonnes performances de Dott et Tier, qui profitent pleinement du passage à des marchés régulés par appels d'offres en Europe, après avoir notamment gagné Paris et Lyon tous les deux. D'autant que le Néerlandais et l'Allemand étaient jusqu'ici peu présents au Royaume-Uni, contrairement au suédois Voi, qui a gagné une vingtaine d'appels d'offres dans d'autres villes du pays. Le leader américain Lime assoit un peu plus son avantage sur son rival et compatriote Bird, auquel il a également ravi Paris l'année dernière. 

Un territoire grand comme dix fois Paris

L'ouverture d'une des villes les plus peuplées et les plus riches d'Europe est une opportunité énorme pour les opérateurs de s'installer dans ce qui pourrait devenir l'un des plus gros marchés au monde. Mais derrière ce potentiel, "un certain nombre d'inconnues font que la taille réelle du marché est encore difficile à évaluer", nous expliquait en janvier l'un des opérateurs candidats, que nous ne nommerons pas car il leur était interdit de s'exprimer au sujet de l'appel d'offres dans les médias avant les résultats. 

Tout d'abord, le terrain de jeu est immense : Londres et ses quartiers (les boroughs), soit dix fois la superficie de Paris intra-muros (la limite actuelle des services de trottinettes) et une population de 9 millions d'habitants. Si le nombre de clients potentiels et le nombre d'appareils déployés sont plus élevés qu'à Paris, les opérateurs auront cependant de gros défis logistiques à relever, explique notre opérateur mystère : "Londres nous oblige à répartir équitablement les appareils entre ses différents quartiers. Mais sur cette surface étendue, comparable au grand Paris, on se retrouve avec des quartiers très variés, entre ceux du centre, hyperdenses, et ceux des extrémités, moins peuplés". Cette plus grande surface d'opération va forcément augmenter les coûts des opérateurs pour recharger, replacer et réparer les véhicules. Et donc peser sur leur rentabilité.

Pas de permis, pas de trotti

Autre différence de taille, la trottinette est une nouveauté totale pour les Londoniens, puisqu'elle était jusqu'ici interdite. Contrairement à l'appel d'offres parisien, organisé après presque deux ans d'opérations dans la ville, on ne dispose ici d'aucune données ni recul sur la popularité de ce moyen de transport dans la capitale britannique. Il y a cependant des raisons d'espérer, explique notre source. "La rapidité de l'adoption est l'une des grandes inconnues. Mais on trouve à Londres les prémices qui ont fait de Paris l'un des plus gros marchés au monde : des zones de forte densité de population et des vélos municipaux en libre-service très populaires."

Dernier frein majeur : la loi oblige les utilisateurs à disposer d'un permis voiture, moto ou scooter, ce qui pourrait réduire la taille du marché. Selon le ministère des transports britannique, 29% des adultes ne possédaient pas le permis en 2019 en Angleterre. Ils étaient même 65% à s'en passer chez les 17-20 ans et 40% chez les 21-29 ans, deux groupes d'âge particulièrement importants pour les opérateurs. D'ici quelques semaines, les trois gagnants de l'appel d'offres découvriront si l'énorme potentiel du marché londonien compense ses contraintes.