Memo Bank : ne l'appelez pas fintech

Memo Bank : ne l'appelez pas fintech Cofondé par Jean-Daniel Guyot, fondateur de Captain Train, ce nouvel établissement bancaire digital sera officiellement ouvert aux entreprises de plus de 10 salariés en septembre prochain.

"Nous ne sommes pas une fintech. Nous sommes une vraie banque". Jean-Daniel Guyot, fondateur de Captain Train, insiste. Sa nouvelle entreprise, Memo Bank (jusque-là connue sous le nom de projet Margo Bank), est un établissement bancaire pour l'heure exclusivement en ligne dédié aux PME qui proposera en septembre prochain les mêmes produits et services que les banques traditionnelles. Pour cause, elle a obtenu un agrément d'établissement de crédit européen auprès de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et la Banque centrale européenne (BCE). Une licence que la majorité des néobanques pour professionnels comme Shine et Qonto ne possèdent pas (Qonto est en cours d'obtention). 

"C'est un agrément très compliqué à obtenir et pour de très bonnes raisons. Une banque ne se construit pas dans un garage avec quelques milliers d'euros. Il y a des barrières réglementaires, technologiques et financières. Il faut aussi savoir recruter les bonnes personnes pour les bons postes", indique Jean-Daniel Guyot. Parmi les "bonnes personnes", on retrouve au conseil de surveillance de Memo Bank, Ronan Le Moal, ancien directeur général d'Arkéa, qui en a été nommé président, Gilles Denoyel, ancien directeur général délégué de HSBC France, ou encore Paul Mizrahi, co-fondateur de Fortuneo et de BlackFin Capital Partners. 

"Les micro-entreprises sont bien servies par les néobanques"

En trois ans, les équipes de Jean-Daniel Guyot ont créé de toutes pièces une banque indépendante pour les PME françaises et européennes de plus de 10 salariés et enregistrant un chiffre d'affaires de plus de deux millions d'euros. Il n'y a pas de montant maximal. Memo Bank ne s'adresse donc pas aux micro-entreprises (auto-entrepreneurs, freelances, professions libérales…) "qui sont bien servies par les néobanques qui offrent des moyens de paiement, et par les banques pour le financement", souligne Jean-Daniel Guyot. Au total, le dirigeant chiffre cette cible à 150 000 entreprises en France et a pour objectif de conquérir 4 000 clients en quatre ans. Un chiffre assez faible comparé aux néobanques pro comme Qonto et Shine qui revendiquent respectivement 75 000 et 50 000 clients. "On s'adresse à des PME assez grosses, on n'a pas les mêmes ordres de grandeur que les néobanques", justifie le dirigeant.

Memo Bank a ouvert sa liste d'inscriptions mais elle n'accueillera qu'un "nombre limité de clients à la rentrée car nous voulons que l'expérience soit parfaite", indique Jean-Daniel Guyot. Les premières entreprises servies seront celles d'Ile-de-France puis de la région lyonnaise en fin d'année. Avant une expansion à d'autres métropoles françaises et européennes, sans calendrier précis pour le moment. Comme pour Captain Train, elle compte sur le bouche-à-oreille, "qui fonctionne très bien chez les PME", fait remarquer le CEO. Le coût d'acquisition n'est pas chiffré mais il sera évidemment inférieur à celui des banques puisque les coûts de structure sont moins élevés. 

Aide à la transition numérique 

Côté produits, pas de grande surprise puisque Memo Bank proposera les mêmes services que les banques traditionnelles à savoir du dépôt, du paiement ou encore du financement. Tout cela avec une expérience plus fluide que chez les grands acteurs de la place. C'est pour cette raison que Memo Bank s'est doté de son propre core banking, sorte de réacteur qui gère l'intégralité de la banque. "On ne veut dépendre de personne. On veut maîtriser notre technologie, notre futur. C'est la seule manière de créer un acteur qui sera encore là dans 15 ans", raconte Jean-Daniel Guyot. "Nous sommes certainement la banque la plus technologique de la place mais nous avons fait tout ce travail pour mettre cette technologie au service du client, du banquier et la relation entre les deux", ajoute-t-il. "L'industrie bancaire a oublié de faire évoluer ses systèmes et ses modes de relation avec ses clients. Il n'y a pas vraiment eu de phénomène de délaissement mais le système bancaire est resté assez figé sur des process adaptés à des grandes entreprises", renchérit Ronan Le Moal.

"On veut maîtriser notre technologie, notre futur. C'est la seule manière de créer un acteur qui sera encore là dans 15 ans"

Memo Bank mise donc sur un compte courant simple d'utilisation, comme le font les néobanques, des solutions de financement avec un processus d'octroi de crédit en quelques jours ou encore du financement pour des dépenses immatérielles car "ces financements sont mal assurés par la place aujourd'hui", d'après le dirigeant, qui ajoute que les PME pourront aussi bénéficier de Prêt garanti par l'Etat (PGE). En revanche, Memo Bank ne croit pas au recours massif à l'intelligence artificielle et aux robots mais veut privilégier le conseil humain grâce à une équipe de chargés d'affaires mobile (ils sont quatre pour le moment), tous issus du monde bancaire. L'ouverture prochaine de bureaux n'est pas exclue.

Les conseillers de Memo Bank ne se cantonneront pas à un périmètre bancaire. L'objectif est aussi d'aider les PME à entamer ou poursuivre leur transition numérique. "La crise du Covid a montré que les entreprises qui n'avaient pas abordé la transition numérique étaient en position défavorable", observe le CEO. "On pense que la banque est un très bon acteur les aider", complète-t-il, sans toutefois préciser les outils et offres qui seront mis à disposition pour les PME, et s'ils seront "made in Memo Bank". "Si on peut les faire en interne, on le fera. Après, on est extrêmement pragmatique. Si un autre service peut proposer beaucoup mieux que nous ou qu'il est beaucoup utilisé par nos clients, on passera par lui", précise-t-il. Ces services feront l'objet d'une tarification "simple, avec des prix clairs garantis sans mauvaise surprise", assure Jean-Daniel Guyot. La grille tarifaire sera seulement dévoilée en septembre. 

Pour convaincre les PME, Memo Bank met aussi en avant la protection des données et la souveraineté. Mais la jeune banque a tout de même choisi deux acteurs américains pour ses services cloud : AWS et Azure. "Tout est chiffré. Personne n'a accès aux données", assure le dirigeant.  

Pour accompagner ce lancement, Memo Bank a bouclé début juin une levée de fonds de 20 millions d'euros auprès de son investisseur historique Daphni, de BlackFin Capital Partners, Bpifrance, Founders Future (venture studio de Marc Ménasé) et 60 entrepreneurs dont Xavier Niel, Marc Simoncini, Rachel Delacour ou encore Jacques-Antoine Granjon, dont certains avaient déjà mis un ticket lors de la première levée de fonds de 6,4 millions d'euros début 2018.