Chaintrust lève 2,5 millions d'euros pour automatiser la saisie comptable

Chaintrust lève 2,5 millions d'euros pour automatiser la saisie comptable Cette jeune fintech, qui transforme les factures et flux bancaires en écritures comptables, prépare un module d'édition de facturation.

L'expert-comptable ne sera jamais remplacé. C'est en tout cas ce que pensent les start-up qui s'immiscent dans le monde de la comptabilité. La majorité d'entre-elles proposent des logiciels qui épaulent les cabinets. Chaintrust en est un bon exemple. Lancée fin 2019, cette fintech qui automatise la saisie comptable annonce une levée de fonds de 2,5 millions d'euros auprès d'Eurazeo et Euler Hermes. La jeune pousse avait déjà levé 600 000 euros (dont 200 000 euros de Bpifrance) auprès de Thibaud Elzière et Quentin Nickmans (cofondateurs du start-up studio eFounders) et Eduardo Ronzano (fondateur de la plateforme de rendez-vous médicaux Keldoc) pour son lancement. Chaintrust a conçu un outil qui transforme les factures et flux bancaires en écritures comptables. Avec toutes les subtilités que cela implique. "Il faut enregistrer les données dans les bons comptes. Par exemple, si vous revendez un iPad, il faut le mettre dans un compte achat pour revente, mais si vous l'utilisez au travail, il faut le mettre dans un compte de charge ou d'immobilisation", illustre Mikaël Gandon, CEO de Chaintrust. La start-up permet aussi d'éclater les factures dans plusieurs comptes de produits, charges, dettes…

"Environ 65% du temps de travail des comptables est dédié à des tâches répétitives"

Pour débroussailler toutes ces données, la start-up a créé un moteur à base d'intelligence artificielle qui reconnaît à ce jour plus de 90% des écritures comptables. Et pour importer les flux bancaires, elle utilise la plateforme d'open banking Bridge. Mais en raison de l'instabilité de certaines API DSP2, Chaintrust a dû, comme beaucoup de start-up, trouver une solution de secours. Nom de code : EBICS, un protocole européen de partage de données sécurisé. Une technologie plus ancienne que les API DSP2 mais adoptée par la majorité des banques. "Comme on paie pour y avoir accès, les banques maintiennent ce service. Beaucoup de start-up commencent à passer par l'EBICS car la DSP2 est décevante", souligne Mikaël Gandon. C'est notamment le cas d'Agicap, fintech spécialisée dans la gestion et prévision de trésorerie, qui vient d'ailleurs de lever 100 millions d'euros. Chaintrust se connecte également aux logiciels comptables existants tels que Sage et Cegid mais aussi aux logiciels de facturation. Le tout pour 20 euros par mois par dossier, et sans engagement.

Développer son IA

Grâce à ces différentes connexions et son moteur d'IA, Chaintrust, qui ne communique pas sur son nombre de clients, permet ainsi de faire gagner du temps aux comptables et réduit le turnover important au sein des cabinets. "Environ 65% de leur temps de travail est dédié à des tâches répétitives qui n'apportent pas de valeur ajoutée directe aux PME", indique Mikaël Gandon. "C'est un argument pour recruter des juniors en comptabilité qui veulent réaliser des taches à haute valeur ajoutée", ajoute-t-il.

L'objectif principal de la levée est d'automatiser au maximum certains process et donc de développer son moteur d'IA. "Les bases de données coûtent très cher. Et plus vous automatisez, plus ça devient précis, plus cela coûte cher", raconte Mikaël Gandon. La fintech travaille actuellement sur le rapprochement bancaire. "Quand vous recevez une facture, vous avez une écriture, et quand vous passez le virement, vous en avez une autre. Nous allons faire en sorte de rapprocher automatiquement les deux flux", raconte le dirigeant. Autre projet technologique dans les cartons pour 2021 : un outil de facturation, qui viendra donc concurrencer la myriade de solutions existantes sur le marché. "La plupart des clients des experts-comptables font leurs factures sur Excel ou de vieux logiciels qui ne sont pas forcément adaptés, puisqu'une facture doit respecter certaines normes", explique le CEO. Cet outil de facturation permettra aussi à la start-up d'avoir des données "propres" et plus facilement accessibles.

En revanche, pas question de devenir un logiciel de comptabilité à part entière ou même un cabinet, ce qui impliquerait de recruter en masse. Ce n'est pas dans les plans de la fintech, qui compte actuellement 17 salariés. Elle prévoit d'embaucher "seulement" quelques profils tech et commerciaux (elle n'a qu'un seul commercial à ce jour) cette année. Si Chaintrust se développe un jour en Europe, ce qu'elle envisage, il faudra tout de même muscler les équipes. Cette internationalisation commencera dans des pays voisins. "L'Allemagne, le Luxembourg et la France ont des plans comptables très proches. Pour ce qui est des Etats-Unis, c'est très différent, mais Quickbooks (logiciel de facturation et de comptabilité pour les TPE, ndlr), qui est utilisé par 80% des TPE-PME a son propre plan comptable privé. Il suffirait donc de s'adapter à eux seulement", précise Mikael Gandon. Mais en aucun cas de les remplacer.