Une War room, des entraînements et plusieurs leçons : Alan raconte les coulisses de sa conquête de Bercy

Une War room, des entraînements et plusieurs leçons : Alan raconte les coulisses de sa conquête de Bercy Le directeur du développement d'Alan explique au JDN comment l'assurtech est parvenue à remporter le prestigieux appel d'offres du ministère de l'Economie et des Finances.

Dans le monde de l'assurance, l'annonce a fait l'effet d'un tremblement de terre. Le 23 mai, le ministère de l'Economie et des Finances a choisi Alan pour assurer la couverture santé de ses 130 000 agents. Le néo assureur a devancé des acteurs historiques comme la Mgéfi, une filiale du groupe Matmut, Malakoff Humanis ou encore Prédica, une entité de Crédit Agricole Assurances.

Ce n'était pas tout à fait David contre Goliath(s), puisqu'Alan, licorne reconnue de la French tech, n'a plus grand chose de la petite start-up qu'elle fut à ses débuts en 2016. Mais le rapport de force semblait toutefois déséquilibré. Pourtant, c'est bien le challenger qui l'a emporté face aux poids lourds du secteur. 

Cette victoire ne doit rien au hasard. Elle est le fruit d'un travail de préparation de près de trois ans qui a débuté en avril 2022, date de la publication du décret relatif à la protection sociale complémentaire (PSC) qui impose aux administrations de souscrire une complémentaire santé pour leurs agents. "On savait que plusieurs appels d'offres allaient arriver. On a donc commencé par lister les ministères potentiels qui pouvaient nous intéresser", raconte Augustin Mine, directeur du développement d'Alan. Evidemment, le ministère de l'Economie et des Finances, avec ses 130 000 agents, a été coché par l'entreprise.

Une équipe dédiée avec les leaders d'Alan

A l'époque, l'assurtech partait presque de zéro. "On n'avait jamais répondu à un appel d'offres public", confie Augustin Mine. "A l'été 2022, on a construit une petite équipe composée de leaders de chez Alan. On disait qu'on travaillait dans la war room. On était un peu à huis clos". En mode commando, ce groupe dédié aux appels d'offres devient le fer de lance de la conquête du prestigieux contrat de Bercy. Mais avant d'y prétendre, il fallait construire les bases.

"On a essayé de s'approprier toutes les règles et les exigences qui gouvernaient les appels d'offres. On a rencontré les ministères, du moins ceux qui acceptaient de nous recevoir car Alan n'était pas dans les radars de la plupart d'entre eux", se souvient le dirigeant. Encore novice, l'équipe s'est faite la main en répondant à plusieurs "petits" appels d'offres qui ont servi de formation. "On a remporté l'Institut national de la consommation. On a aussi connu des défaites. Mais celles-ci ont été fondatrices car, quand on perd, on reçoit un courrier de rejet qui permet de comprendre ce qu'on doit améliorer".

Des défaites fondatrices et des victoires de référence

Après ces petits tests, les choses sérieuses ont commencé. En novembre 2023, Alan remporte sa première victoire significative en décrochant le contrat de l'Assemblée nationale. "Cette victoire nous a donné de la visibilité et a motivé l'équipe qui travaillait un peu dans le vide pendant la période de formation". Si la licorne a essuyé des revers pour l'Office national des forêts et pour le ministère de l'Agriculture, elle a connu d'autres succès d'envergure : son premier ministère en juin 2024 avec la Transition écologique (60 000 agents concernés) et les services du Premier ministre en septembre 2024 (4 900 agents concernés).

Ces deux succès vont peser lourd dans la balance au moment du très attendu appel d'offres de Bercy. Lorsque celui-ci est publié, en décembre 2024, Alan s'apprête justement à déployer ses services pour Matignon et le ministère de la Transition écologique. "Assez vite, les retours ont été très positifs, aussi bien du côté des agents que des responsables RH. On est alors perçu comme aussi légitime qu'un grand groupe".

Une croissance appréciée

Outre ces deux références (et même trois avec l'Assemblée nationale) l'entreprise fondée par Jean-Charles Samuelian-Werve et Charles Gorintin possède d'autres atouts pour convaincre le ministère de l'Economie et des Finances. "Notre expertise a été appréciée. Pour tous les appels d'offres, deux critères étaient évalués : le prix et la gestion (qui correspond à la qualité du produit et à l'accompagnement, ndlr). A chaque fois, on est arrivé premier sur le critère gestion. Par ailleurs, notre taux de croissance était aussi un avantage. Chaque année, on accompagne 150 000 à 200 000 nouveaux utilisateurs. Ces volumes montrent qu'on est prêt à accueillir une vague de nouveaux membres", indique Augustin Mine. "Pour résumer, l'appel d'offres est arrivé à un moment de notre histoire où on avait déjà beaucoup prouvé".

Il semble bien que ces arguments aient pesé dans la décision finale. La Mgéfi, un des concurrents d'Alan, a déposé un recours pour contester la décision avant d'être déboutée. "J'imagine que la nouvelle a été dure à accepter pour eux. Ils ne devaient pas s'y attendre", glisse le directeur du développement de l'assurtech aux 680 000 membres.

Alors qu'Alan est entré dans la phase déploiement auprès des agents de Bercy, l'entreprise compte bien capitaliser sur cette victoire emblématique. "Désormais, c'est difficile de parler de nous comme une petite start-up. On a gagné en crédibilité et cela se ressent dans nos interactions avec les entreprises privées qui sont rassurées de savoir qu'on travaille avec des structures plus grosses qu'elles", assure Augustin Mine. "Pour les prochains appels d'offres, on sera encore plus légitime". Et cette fois, plus personne ne s'étonnera de voir Alan s'imposer.