Son CDD est fini depuis deux ans mais son employeur a oublié de lui dire : la Cour de cassation lui accorde des milliers d'euros

Son CDD est fini depuis deux ans mais son employeur a oublié de lui dire : la Cour de cassation lui accorde des milliers d'euros Cette entreprise a très mal géré la fin du CDD de remplacement de ce salarié. Elle a été condamnée à lui verser des milliers d'euros.

Il a appris la fin de son contrat de travail deux ans après l'avoir quitté  et a gagné en justice six ans plus tard. Cette histoire invraisemblable est celle d'un marin, on la rembobine : le 13 août 2015, un salarié est engagé comme matelot dans le cadre d'un contrat à durée déterminée de remplacement. "Dans ce type de CDD, la durée n'est pas prédéterminée : le terme correspond à la fin de l'absence ou à la cessation définitive d'activité du salarié remplacé", explique Mamadou Traoré, juriste en droit social.

Un mois après le début de son contrat, en septembre 2015, le matelot remplaçant est victime d'un accident du travail. Toutefois, son CDD de remplacement ne se termine pas car le contrat du titulaire est toujours en cours. Vous suivez toujours ? Des mois plus tard, le 25 juillet 2017, le marin titulaire est licencié par l'entreprise. C'est à ce moment précis que le CDD du marin remplaçant devrait théoriquement prendre fin mais l'employeur oublie de l'informer.

"Lorsque le CDD est conclu pour remplacer un salarié absent, le licenciement du salarié remplacé constitue le terme du contrat, puisqu’il marque la cessation définitive de son activité. Mais ce terme n’a d’effet juridique que s’il est notifié au remplaçant. A défaut, la relation contractuelle est réputée se poursuivre", clarifie Mamadou Traoré. Toujours en arrêt de travail, le marin remplaçant n'est au courant de rien.

Le silence de l'employeur dure des années. Entre temps, le marin remplaçant est déclaré inapte à sa profession le 11 mars 2019, des suites de son accident de travail ayant eu lieu 4 ans plus tôt. Or, "en cas d’inaptitude professionnelle, l’employeur a deux obligations majeures, rechercher un reclassement adapté et reprendre le paiement du salaire un mois après l’avis d’inaptitude, si aucune mesure n’a été prise", liste le juriste.

Mais dans le cas qui nous intéresse, la conduite de l'employeur est toute autre. Le 4 juillet 2019, il adresse un courrier au conseiller juridique du salarié indiquant que le contrat du matelot remplaçant est terminé depuis deux ans avec le licenciement du marin titulaire. Le salarié inapte ne reçoit les documents de fin de contrat que l'année suivante, le 25 janvier 2020. Dès lors, il saisit la justice pour demander la requalification de son CDD en CDI. Il réclame également que la fin de son contrat soit considérée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse pour percevoir des indemnités.

Le 21 février 2024, la 8e chambre prud'homale de la cour d'appel de Rennes rend sa décision. Elle requalifie le CDD en CDI et considère que le salarié doit être indemnisé de la même manière qu'après un licenciement sans cause réelle et sérieuse. L'employeur conteste alors ce verdict devant la Cour de cassation. Dans un arrêt du 13 novembre 2025, elle confirme la décision initiale.

"Le silence de l'employeur constitue précisément la faute retenue par la Cour. Il avait l'obligation d'informer le salarié remplaçant de la cessation d'activité du salarié remplacé. Ce défaut d’information est au cœur de la requalification en CDI, car la relation est supposée s’être poursuivie en l’absence de notification du terme", décrypte Mamadou Traoré.

En plus de la requalification, l'employeur a été condamné à verser de multiples sommes au salarié : indemnités pour compenser les congés payés, le préavis mais aussi un rappel de salaire. Si le montant exact n'est pas détaillé dans l'arrêt de la Cour de cassation, cela représente plusieurs milliers d'euros. Comme quoi, le silence est d'or, mais il peut aussi coûter très cher.