La fonction Achat en mal de reconnaissance

La plupart des dirigeants s’accordent sur l’importance stratégique des Achat dans les grands groupes. Ce métier exige des talents : savoir-faire analytique, capacité de négociation, ouverture vers l’extérieur. Pourquoi cette fonction est-elle alors si peu reconnue dans les entreprises ?

L’étude de Capgemini Consulting, menée en collaboration avec la CDAF et fondée sur des entretiens approfondis avec des Directeurs des Achats de grands groupes, constate que la grande majorité des Directeurs des Achats interrogés sont heureux dans leur fonction, mais que 52% d’entre eux souhaitent sortir des Achats pour leur prochain poste. Revenons sur les raisons de ce désamour. 

Métier très complet, opérationnel, avec un impact financier mesurable et une grande diversité des tâches, les achats ont de nombreux atouts à revendre. Dans les secteurs de l’Automobile et de la Distribution, où ce métier représente une part importante de la valeur ajoutée, la Direction Générale est consciente de la large contribution des Achats à la performance économique de l’entreprise, mais ce n’est pas le cas ailleurs. Près de 60% des Directeurs des Achats interrogés dans le cadre de l’étude Capgemini Consulting ont déclaré devoir se battre au quotidien pour faire reconnaître la valeur ajoutée de leur fonction.

Plusieurs raisons expliquent ce sentiment de moindre reconnaissance de la fonction achats. La première difficulté tient au fait que la performance Achats n’est pas toujours visible dans les comptes de l’entreprise. Une partie des gains sont des évitements de coûts, et ne sont donc pas reportés. Et quand l’effort est atteint par les autres départements, celles-ci peuvent être tentées de claironner leur succès. A l’inverse, lorsque les chiffres de réduction des coûts ne sont pas atteints, ou lorsqu’un problème fournisseur vient impacter les résultats économiques, la tentation de pointer du doigt les Achats se fait grande.

D’autre part, négocier les prix ne garantit pas la maîtrise du volume des dépenses. D’autres facteurs tels que la consommation peuvent intervenir et annihiler la performance obtenue en négociation. Lorsque le budget n’est pas recalculé à l’issue d’une opération Achats, il est fréquent qu’il soit consommé dans son intégralité, masquant les gains obtenus. Ceci place les Achats dans une position de fonction support qui n’est pas toujours à leur avantage.

L’exercice même de réduction des coûts lié à la fonction Achats peut par ailleurs alimenter des crispations des Directions sur lesquelles portent les économies. La fonction Achats peut rapidement devenir synonyme d’écrasement et de réduction de coûts alors qu’elle booste en réalité la performance économique. « On est quand même toujours perçu comme des "Messieurs Moins" et non pas comme des "Messieurs Plus" de performance», résume un des Directeur des Achats interrogé dans le cadre de l’étude.