Dans les organisations mondiales, la confiance se pense sans contact

Cette année pour la première fois depuis sa fondation en 1971, le Forum économique mondial (WEF) ne s'est pas déroulé à Davos, mais via des conférences ou des échanges exclusivement virtuels.

Cette année pour la première fois depuis sa fondation en 1971, en raison de la pandémie de covid-19, le Forum économique mondial (WEF) ne s’est pas déroulé à Davos, la célèbre station de sports d’hiver suisse, mais a pu se tenir grâce à des conférences ou des échanges exclusivement « virtuels ». Autrement dit, sans les plateformes de communication, sans les services de vidéoconférences, sans les technologies en un mot, le Forum aurait été annulé.

Les rencontres de Davos ont souvent été réalisées dans le contexte de crises graves. En Janvier 2002, le World Economic Forum avait fait de la paix et de la prospérité pour tous les meilleurs antidotes au terrorisme ; en 2008, en pleine crise financière, Bill Gates y avait prononcé un discours sur le "Creative Capitalism". En 2021, le thème général est en phase avec les préoccupations des dirigeants, des chefs d’entreprise et de la plupart des opinions mondiales : "Une année cruciale pour reconstruire la confiance".

On sait que les Français sont parmi les plus défiants quand il s’agit des autorités, 51% allant par exemple jusqu’à penser que les "élites" prennent leurs décisions tout en sachant qu’elles vont contre les intérêts de la majorité. Avec la covid-19 et les questions sur la gestion de la crise sanitaire, des masques au vaccin en passant par la stratégie du stop & go, les doutes sur leur efficacité et leur raison d’être, les craintes sur les conséquences économiques, sociales et humaines, tout participe de cette "crise du résultat" qui délégitime les autorités depuis des années et fabrique de la défiance.

On sait aussi que les Français sont parmi les plus friands de technologies : en 2019, le taux d’équipement en smartphone progressait encore par comparaison à 2018 (77%, +2 points), dépassant les ordinateurs (76%, -2 points) ; le smartphone est notamment utilisé par 68% de la population pour accéder à Internet, par 62% pour échanger des messages, les applications servent à téléphoner pour 51%. L’extraordinaire polyvalence des smartphones en fait l’outil n°1 pour communiquer, s’informer, travailler, partager des idées : c’était la clef du lien social avant la crise de la covid-19, qui a encore accentué et renforcé le phénomène. En 2019 déjà, 60% des Français fréquentaient les réseaux sociaux, 38% des 18-24 ans et 23% des 12-17 ans considérant qu’ils aident à mieux suivre ou comprendre l’actualité.

Comment les technologies peuvent-elles aider à la fois à recréer la confiance et prolonger les liens ?

De manière presque provocatrice, on peut dire que la situation créée par la covid-19 a forcé à trouver des solutions, partout dans le monde, et à accéléré l’implémentation des technologies dans tous les aspects de la vie quotidienne. L’intégration des technologies dans notre quotidien a été précipitée dans des proportions inimaginables en 2019 et elles se sont imposées comme la manière la plus efficace de palier les obstacles à la continuité de la vie professionnelle et personnelle. Dans tous les domaine, santé, travail, enseignement, loisirs, commerce, séduction, etc., les technologies ont été autant d’antidotes : télémédecine ou téléconsultation, télétravail, télé-éducation, plateformes, achats on line, entrevue-vidéo sur les sites de rencontre, etc., elles ont en effet permis, voire favorisé, le passage du « en contact » au « sans contact » dans ce monde sous contrainte et à distance résultant des mesures anticontamination. Pendant la crise, si les technologies n’ont pas remplacé les interactions réelles, elles les ont donc malgré tout prolongées, que ce soit dans l’entreprise ou avec la famille et les amis.

Mais cette accélération a aussi fonctionné comme un révélateur d’inégalités : seuls 5 millions de salariés sur 25,5 millions au total peuvent transférer leur vie professionnelle en home office et travailler à distance et 15% de la population française est réputée "illectronistes", ne sachant pas se servir d’un PC ni d’un smartphone, sans oublier les questions de l’accès à la fibre sur l’ensemble du territoire... 

Pour autant, leur rôle social, économique ou culturel et leurs bénéfices perçus sont aujourd’hui tels que seules les technologies échappent au pessimisme général. Le développement de l’accès aux outils et aux technologies numériques vient en tête de ce qui va s’améliorer en 2021, suivi par les possibilités de formation et d'éducation. A l’inverse, sur tous les autres sujets, rythme du changement climatique, emplois, santé, inégalités, relations internationales, 2021 porte tout, sauf un message d’espoir ; en France notamment, où l’emploi est la première préoccupation, devant le changement climatique et l’état de santé (mentale ou physique).

En 2021, les technologies étaient au cœur des différents enjeux abordés à Davos, en particulier dans le contexte de la quatrième révolution industrielle en lien avec l’intelligence artificielle, 63% des Présidents des plus grands groupes mondiaux considérant que l'IA aurait un impact plus important que celui d'Internet. Mais recréer la confiance, c’est aussi rassurer sur la « réinitialisation de la société », présentée comme la solution pour refonder le capitalisme par le Professeur Klaus Schwab, fondateur et président du Forum Économique Mondial, et Thierry Malleret, directeur associé de Monthly Barometer, dans leur ouvrage publié en septembre 2020, COVID-19 : La Grande Réinitialisation. Dans un contexte vite complotiste dès qu’il s’agit d’organisations mondiales, des réponses fortes et rassurantes sont aussi "cruciales pour reconstruire la confiance".