Et si la solitude était en fait votre meilleure alliée ?

La solitude qu'on prend souvent pour une malédiction est en fait une super opportunité, celle de se densifier grâce à un miroir sans dispersion. Comment tirer parti de la solitude positivement (tout en la différenciant évidemment de l'isolement) ?

Assumer sa solitude intérieure, tout en étant bien avec les autres, mais parfaitement lucide que l'autre n'est pas là pour remplir mon vide et que jamais je ne suffirai à remplir le sien... Éthique d'une plénitude solaire, généreuse et sans illusion.
Quand vous êtes seul face au miroir de la vie, au pied du mur, retiré en votre for intérieur, loin des agitations extérieures... vous commencez évidemment par vous retrouver face à vos agitations intérieures. Mais c'est une excellente nouvelle ! C'est maintenant que le vrai travail va pouvoir commencer...
Parce qu'au lieu de gesticuler dans une fuite en avant sans fin, réagissant de façon automatique et conditionnée, vous allez enfin pouvoir "voir" ce qui est là en vous, maintenant, et qui n'est pas vous, mais qui vous raconte toutes sortes d'histoires qui retiennent votre attention, tant que vous acceptez leur fascination.

Début de mort alchimique

Un jour pourtant, à force de les écouter et d'y croire comme un spectateur au cinéma qui se prendrait pour chaque personnage représenté à l'écran, quelque chose se brise de cette "passion" et vous voilà saturé, presque écœuré, de ces histoires qui se suivent et se ressemblent toutes. Derrière chacune il y a les mêmes grosses ficelles : quelque chose qui n'a pourtant pas d'existence, a peur de disparaître, et s'accroche à de vaines tentatives de se maintenir, faisant ainsi beaucoup de mousse pour pas grand chose. Quand vous l'avez vu une fois (mais bien vu quand même, pas juste entr'aperçu) vous avez vu tout ce qu'il y avait à voir dans toutes les variantes de la sempiternelle même histoire (un coup je suis triste, un coup je suis en colère, un coup j'ai peur de ci ou de ça, et puis la même chose se rejoue encore et encore avec de nouveaux contenus, de nouveaux éléments, pour remettre en scène la même pièce de théâtre. En fait, c'est sans fin, "cela se mange sans faim" dirait Pierre Noêl : extrait vidéo du père noel est une ordure : "c'est très fin cela se mange sans faim !")

Esprit, es-tu là ?

Face au miroir donc, vous êtes seul dans vos chaussures, vous êtes seul face à tout ce que vous n'êtes pas, et dans le silence, peu à peu quelque chose émerge en vous qui ne peut être décrit : une "présence" intime, quelque chose comme un flux de conscience vous traverse ou s'installe, et dorénavant il faudra vivre avec pour le meilleur et pour le pîre. Ou plutôt que de "vivre avec", il va falloir "vivre depuis, ou à partir de cela", qui est vous-même, dégagé de tout le fatras évoqué plus haut.Heureusement, ce n'est pas forcément brutal et radical, comme dans les récits de spiritualité à la mode, où le quidam vous relate ce moment magique où le Silence l'a soudain envahi, où sa pensée, miraculeusement, s'est arrêtée...
"Après l'extase la lessive", comme dirait Jack Kornfield, l'histoire ne nous dit pas toujours ce qu'il advient de ces "heureux élus" qui sont soudain gratifiés d'une telle expérience d'Unité. En tous les cas, comme la vie est très riche et pleine de variétés, il se peut aussi que vous puissiez bien vous voir, et que vous retombiez pourtant un certain nombre de fois dans vos anciennes compulsions, un peu comme on arrête de fumer et qu'on reprend avant d'arrêter de nouveau et ainsi de suite jusqu'à arrêter complètement éventuellement. Tout le monde ne s'arrête pas du jour au lendemain.
Il y a des processus abrupts et d'autres qui sont plus doux et plus progressifs.
Quoi que vous viviez, ne désespérez pas, les pensées naissent, se développent et se résorbent dans le silence pour tout le monde, pas que pour les mystiques. Vous aussi, si vous êtes attentif, vous vivrez de plus en plus et de mieux en mieux... de moins en moins d'agitations, avec toutefois fort heureusement des soubresauts de résistance. Mais tant mieux si vous repiquez à la drogue de l'agitation, cela prouve que vous êtes vivant, et si vous êtes un peu retors : cela vous prouve au moins que vous n'êtes pas de la chair comestible pour les sectes. Ne serait-ce pas un des bons côtés de la chose ? Il paraît que voir les choses du bon côté est bon pour la santé...

Il faut quand même se casser un peu la tête !

Ce serait trop facile s'il suffisait de prendre des cours de yoga ou de médiattion pendant 3 ou 30 ans, pour vivre une illumination. Vous ne vous en sortirez pas comme ça, avec trois conseils piqués ça et là dans des livres de spiritualité, ni même avec des années d'ashram ou de monastère, si vous ne faîtes pas le boulot. Comme le disait le sage Nisargadatta : "Il faut se casser un peu la tête !" ... au sens propre d'ailleurs, pas se faire bobo au crâne (le pauvre) mais épuiser son mental à force de vivre avec la conscience que nous ne sommes pas ceci et pas non plus cela.
C'est une écologie de notre propre esprit qu'il faut accomplir, en découvrant de l'intérieur et par nous-mêmes : qui nous sommes, quelle est notre véritable nature. Et face à cette expérience à vivre, au bout des mots et des pensées, quand justement : il n'y en a plus pour dire, il reste à se taire et attendre. Attendre rien. Juste être là. Juste : être.

Vous n'allez pas vous disloquer : bien au contraire !

Peu à peu, vous devenez plus consistant, un noyau se condense au centre de votre individualité. Les propos lénifiants qui racontent des sucreries selon lesquelles on s'unifierait au grand tout pour y perdre notre individualité sont des plaisanteries, qui n'ont pas fait le voyage ! 
De plus en plus, celui qui va vous croquer n'est pas encore né, parce que vous n'êtes plus "croquable". Même Dieu ne vous pourra pas vous avaler : même la baleine serait obligée de vous rechacher sur le rivage, tel un nouveau Jonas. Dieu vous préfère individualisé, conscient, aimant et actif en Lui. C'est bien plus Viril, c'est bien plus Vrai, qu'une refonte trop facile, et qui ne voudrait rien dire.

Pourquoi parler de Vide, alors qu'il s'agit d'un Plein ?

Depuis ce noyau de plénitude qui commence à poindre en vous, vous devenez plus rayonnant. Sans vous prendre pour un soleil, il émane quelque chose de vous, qui s'adresse directement à l'autre, mais que vous ne contrôlez pas. Etant davantage "présent", des relations véritables sont alors possibles, sans attente, sans déception. "Sans peur et sans reproche" dirait le chevalier Bayard. J'aime aussi dire : "sans plainte et sans reproche ni justification" (histoire de rafraîchir la devise de l'illustre ancêtre).
Vous devenez peu à peu une personne conciliante (parce que vous comprenez bien que chacun fait ce qu'il peut, du fond de sa coquille, et qu'il n'y a rien à attendre de l'autre, ni rien non plus à juger à son propos). Vous êtes trop concentré dans votre solitude à faire face à votre propre équation que personne ne va résoudre à votre place. vous savez depuis longtemps qu'il n'y aura pas de sauveur qui prendra vos pêchés sur ses épaules, et hop, vous voilà sauvés à moindre frais ! Heureusement que non, d'ailleurs : Ce serait le chaos. Non, il faut faire le boulot et c'est tout.
Le reste ne sont que des indulgences de religions. C'est pas méchant, il en faut bien, mais vous n'avez plus de temps à perdre avec tout ça. Cette fois-ci, sans dispersion et en acceptant votre solitude (on y revient enfin !), c'est un combat à outrance, que vous ne pouvez d'ailleurs que remporter, puisque vous n'avez plus aucune autre issue. Quand ? Peu importe. Comment ce sera ? On verra bien. Ce qui est sûr, c'est que c'est maintenant que tout se joue. C'est tout. Un pas l'un devant l'autre, et le Chemin se fait.

Il faut bien atterrir, maintenant...

Je me suis un peu laissé emporter loin de là où j'imaginais arriver. Je comptais écrire un texte encourageant sur la solitude, pour réconforter les personnes qui vivent mal la leur. Un truc de coach compatissant, qui délivre une ou deux pensées à deux balles, histoire de faire un peu de pub, de générer du trafic sur son site et tutti quanti... 
Mais je m'aperçois que j'ai plutôt "craché du Feu". Cela n'intéressera sûrement pas grand monde du coup. Qui aurait envie de se brûler ? Mais tant pis, le coup est parti comme ça : c'est peut-être une sorte de "coming out". Et si derrière le coach, se cachait une sorte de philosophe inconnu ? 

Moi, je n'ai rien à dire. Je fais mon boulot de coach avec tout mon cœur, et c'est tout. Par ailleurs, je chemine sincèrement, sans tambours ni trompettes. Mais je sens que quelque chose du dedans pousse à vouloir dire des trucs. Alors, je les sors. Vous ferez le tri ? Je vous fais confiance...