Du management de contrôle au management empathique : savoir manager à distance
Si le télétravail se déploie progressivement, de nombreuses entreprises y sont encore réticentes. En France, seuls 5,9% des salariés des activités financières et d'assurance télétravaillaient régulièrement .
Le contexte actuel a contraint de très nombreuses entreprises à passer massivement au télétravail, à avoir recours au chômage technique ou au roulement des collaborateurs lorsque les infrastructures, les outils informatiques ou les activités ne permettaient pas le travail à distance. Ainsi, collaborateurs et managers se trouvent confinés chez eux, pour une période indéterminée qui peut être anxiogène, d’autant que les familles sont tout le temps sous le même toit : l’équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle n’est pas évident à trouver. Aujourd’hui, la question n’est plus « pourquoi changer et passer au télétravail ? », mais plutôt « puisqu’il faut changer, comment faire évoluer les pratiques managériales pour répondre à ce nouvel enjeu ? ».
Maintenir l’activité à distance
L’objectif premier du management est de maintenir l’activité de son équipe, et avec la distance, il a également pour défi supplémentaire de maintenir le lien entre ses collaborateurs et de veiller à leur bien-être. Lorsque les équipes ont accès aux infrastructures informatiques nécessaires, de nombreux outils digitaux permettent aujourd’hui de faire des réunions d’équipes à distance et des applications permettent de créer un suivi et d’assurer des reportings pour que le manager maintienne sa visibilité sur les projets. Si ces outils sont essentiels pour assurer la continuité de l’activité, les multiplier peut devenir anxiogène et chronophage pour les collaborateurs. François Dupuy, sociologue des organisations, explique dans son ouvrage Lost in management que, dès que les entreprises souhaitent imposer « des processus et des contrôles forcés, elles font passer un message clair de défiance »[1]. Cela peut en effet être mal interprété par les collaborateurs qui peuvent se sentir surveillés, créant ainsi un sentiment de mal être : le manager doit donc expliquer le sens et l’utilité de ces outils pour en accroître l’efficacité.
Savoir manager de manière empathique
A ce suivi « raisonné » s’ajoute un management empathique : le manager doit s’assurer que ses collaborateurs travaillent dans de bonnes conditions, dans un espace calme où ils ne seront pas dérangés, mais aussi qu’ils trouvent un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle. En effet, le télétravail rompt naturellement le séquençage habituel de nos journées et crée une superposition des temps et des espaces. Le site du Réseau de Transport d’Electricité (RTE) montre que le pic de consommation électrique entre 8h et 9h le matin a disparu avec cette période de télétravail massive, ce qui montre bien que les collaborateurs n’organisent plus leur temps de la même façon. Pour s’assurer que leur bien-être et leur motivation sont conservés, le manageur peut imaginer des pauses collectives ou des échanges informels permettant de discuter des problèmes de chacun et de trouver des solutions adaptées, en ajustant les horaires, en allégeant certaines activités ou en favorisant les travaux de groupe. Ces moments sont aussi l’occasion de partager ce qui fonctionne : les collaborateurs ne perdent plus de temps dans les transports et peuvent l’investir dans des activités personnelles, la concentration peut être plus efficace chez soi que dans un open space par exemple. L’écoute, l’observation et le soutien du manager sont essentiels pour maintenir la force du collectif lors de cette transition, pour trouver des solutions aux obstacles et capitaliser sur ce qui fonctionne. C’est par ce travail d’empathie et d’amélioration continue qu’un management à distance adapté pourra naître.
A la fin du confinement, forts de cette expérience, managers et collaborateurs pourront ainsi maintenir partiellement le télétravail pour les bienfaits qu’il apporte tout en profitant des avantages du travail en présentiel.