Ingénieur en habitats durables, un métier au cœur de la révolution climatique

Ingénieur en habitats durables, un métier au cœur de la révolution climatique Comment concevoir des bâtiments peu consommateurs en énergie, voire à énergie positive, avec un impact faible sur l'environnement, et qui reste agréable à vivre ? Une nouvelle catégorie d'ingénieurs est née pour répondre à ces défis.

Recouvrant les logements ou édifices tertiaires à la fois économiques en énergie, respectueux de l'environnement et sains pour leurs résidents, l'habitat durable se démocratise en France depuis environ une dizaine d'années. Née en réaction aux conséquences du changement climatique, cette mouvance a donné naissance à un nouveau métier : ingénieur en habitats durables. "Ma mission est de conseiller les différents intervenants d'un projet immobilier, maîtres d'ouvrage, architectes, ingénieurs en structure, ingénieurs en chauffage, ventilation, climatisation […] sur les choix à faire en termes de conception pour aboutir à un produit durable", résume Rafik Louati, ingénieur en construction et habitats durables chez Terao, un bureau d'études en efficacité énergétique et environnementale des bâtiments.

François Coudrieau est ingénieur en habitats durables au sein d'Alterea, société experte en optimisation énergétique du bâtiment. © Alterea

Les réglementations thermiques introduites en 2005 et en 2012 livrent un premier cadre législatif à ces nouveaux pelotons d'ingénieurs. Aux côtés de cet arsenal juridique, la certification française HQE (ou haute qualité environnementale) s'est imposée depuis son introduction en 2004 comme une référence du domaine. A l'optimisation thermique et énergétique, elle ajoute celles de la qualité sanitaire, de la gestion de l'eau, ou du confort acoustique, visuel et olfactif. Parallèlement, des labels ont vu le jour : E+ et BEPOS effinergie 2017 pour les bâtiments à énergie positive, et C- et BBCA pour les constructions à faible emprunte carbone.

"Certains clients nous sollicitent explicitement en vue d'être certifiés HQE. Ils cherchent souvent par ce biais à valoriser leur bien sur le marché. D'autres souhaitent s'inscrire dans une démarche d'habitat durable sans pour autant avoir cet objectif. Tout l'enjeu pour nous est alors de leur démontrer qu'un tel projet ne leur coûtera pas beaucoup plus cher", explique François Coudrieau, ingénieur en habitats durables au sein d'Alterea, société experte en optimisation énergétique du bâtiment.

François Coudrieau comme Rafik Louati s'accordent sur un point : le tout premier objectif d'un chantier d'habitat durable réside dans la performance énergique. "Cela passe d'abord par l'orientation géographique et le choix de matériaux pour optimiser l'isolation", souligne Rafik Louati. Et François Coudrieau d'ajouter : "Des tests permettent de vérifier l'isolation grâce à des caméras thermiques l'hiver pour relever les fuites de chaleur vers l'extérieur, ou encore par la mise du bâtiment en dépression pour identifier à l'inverse les fuites d'air de l'extérieur vers l'intérieur."

Une fois l'optimisation du gros œuvre réalisée vient celle des systèmes de climatisation, de chauffage, d'eau chaude et d'électricité. L'objectif étant, in fine, d'aboutir à un bâtiment produisant plus d'énergie qu'il n'en consomme. "Pour la climatisation, nous recommandons la ventilation naturelle. Elle emmagasine et stocke la fraicheur la nuit et la réinjecte le jour pour éviter aux systèmes de refroidissement de fonctionner à plein régime", poursuit François Coudrieau. Même logique pour le chauffage naturel qui consiste à capter la chaleur du soleil par les vitres puis l'accumuler dans la masse du bâti avant de la restituer à l'intérieur par convection et rayonnement. "Plus prosaïquement, nous préconisons le recours aux réseaux de chauffage urbain pour mutualiser l'énergie consommée, ou à l'installation de chaudières à condensation qui se révèlent plus efficaces que les systèmes traditionnels", ajoute François Coudrieau. Pour compléter l'édifice, un bâtiment à énergie positive pourra évidemment bénéficier de panneaux solaires.

Dernier enjeu de l'ingénieur en habitats durables : éviter les émissions de gaz à effet de serre. "Sur les chantiers, cet objectif passe notamment par une réduction de la consommation de béton classique dont la production est fortement émettrice en gaz à effet de serre. Plusieurs alternatives existent : des bétons à bas carbone voire le recours à des bétons recyclés en économie circulaire", indique Rafik Louati. Et François Coudrieau de conclure : "S'engager dans cette voie est une manière pour nous et nos clients d'anticiper l'entrée en vigueur en 2020 d'une nouvelle réglementation visant justement à limiter les émissions de gaz à effet de serre sur le cycle de vie du bâtiment."