Entreprises de service, conseil : le marché du service dans la crise du coronavirus

La situation actuelle est unique sur notre marché. En raison de son caractère exponentiel, le COVID-19 va avoir des effets profonds et durables à l'échelle mondiale, pour l'économie en général et le secteur des entreprises de services numériques (ESN) et du Conseil en particulier.

A court terme : arrêt ou mise en pause des missions, intercontrat et télétravail

Dans les jours et les semaines à venir, les clients des sociétés de Services vont chercher à préserver leur trésorerie et à couper l’ensemble des prestations non vitales. Il est à prévoir que les clients des sociétés de services prononcent l’arrêt en masse des projets lancés ou dont elles allaient prononcer le lancement.

Plus directement, la fin du mois de mars comme toutes les fins de mois est une période de renouvellement de missions. Il y a fort à parier que la plupart des missions ne seront pas renouvelées. Il en sera de même à la fin avril car le confinement devrait se prolonger au moins sur la première et certainement la deuxième quinzaine d’avril. Les mois de mai et juin seront des mois d’incertitude qui permettront, à la marge, de préparer Juillet et la rentrée de septembre. La crise étant une crise de l’économie réelle touchant toute l’économie en même temps, aucune industrie ne servira vraiment d’amortisseur aux autres.

Le cas de la maintenance des infrastructures informatiques, vitale dans une économie qui ne tourne plus qu’en télétravail et autour d’outils digitaux, connaîtront un traitement particulier. Vitaux par nature, ces projets ne devraient donc pas connaître de destaffing massif à très court terme. Pour tous les projets non urgents et non stratégiques, nous prévoyons déjà un destaffing important des consultants.

A moyen & long terme : adaptation, réorganisation et reprise

Dans les 3 mois qui viennent, les sociétés de services vont devoir massivement adapter leur organisation du travail et prendre la mesure des nouveaux défis qui s’imposent à elles.

Juste avant la crise du coronavirus, l’industrie des services était soumise à une tension importante sur le marché des talents. Elle subissait un turnover important (entre 20% et 30%) dû à la volatilité de leurs talents. Les taux de staffing était important. Pour la majorité des sociétés de services, le problème n’était pas de trouver de nouvelles affaires mais bien de trouver plus de talents pour répondre au besoin de leurs clients.

La situation est en train de s’inverser à une vitesse et dans une proportion qu’aucune société n’a connu jusqu’à maintenant. Le défi du staffing ne sera plus de choisir parmi quelques consultants le meilleur pour une mission mais de choisir parmi des centaines de consultants pour quelques missions. La concurrence tous azimuts va transformer le champ commercial en champ de bataille. Les sociétés les plus rapides et les plus pertinentes dans leur choix de staffing seront les gagnantes à coup sûr. A cela s’ajoutera une renégociation du périmètre et probablement de la tarification des projets au forfait ou des personnes en régie ce qui amènera les sociétés de service à devoir mieux comprendre leur structure de coût.

Il est donc indispensable pour ces sociétés de préparer la reprise. Elles doivent utiliser le temps où le business est à l’arrêt pour recenser leurs compétences et leurs missions. Ce recensement va permettre de créer des scénarios de reprise et décider de l’organisation à venir. On peut prévoir une vague importante de "reskilling" ou de licenciement dans les services. Le gouvernement dans le même temps devra inclure dans son plan de relance une part importante à la formation professionnelle.

Les sociétés de services qui décideront de se séparer de nombreux collaborateurs décideront de préserver leur trésorerie à court terme. Cette décision sera parfois dictée par la nécessité de survivre au choc. Pour celles qui décideront de lancer des plans de licenciement alors qu’elles pourraient encaisser le coup sur les 12 prochains mois, ce choix court-termiste pourrait se révéler mauvais à moyen et long terme. En effet, les différents plans de relance (France, Europe, US, ...) amèneront leur lot d’opportunités et il y aura de nombreux projets à staffer. Nous préconisons pour les entreprises qui le peuvent et grâce au recensement systématique des compétences et aux scénarios de reprise, de lancer de grands plans de formations.

La crise actuelle va également donner un coup de frein important pour le freelancing et les plateformes de freelances. Cette crise sera aussi une prise de conscience pour de nombreux indépendants du statut sinon précaire en tout cas d’isolement et de fragilité à faire face aux grandes crises. Dans un monde où l’on cherche à tout prédire et à se protéger de tout, cette crise nous rappelle qu’il existe des cygnes noirs. Pour cette raison, les sociétés de services qui avaient du mal à recruter vont se retrouver face à un choix important de compétences disponibles sur le marché du travail et à un meilleur coût. Ces sociétés vont devoir faire des choix de recrutement et de sauvegarde de l’emploi. Elles y seront d’autant mieux préparées qu’elles auront recensé l’ensemble de leurs compétences et qu’elles auront créé des scénarios de reprise.