Santé mentale : nouvelle priorité stratégique des entreprises

Épidémie silencieuse mais enjeu stratégique majeur : en 2025, la santé mentale s'impose comme un levier de performance et de rétention pour les entreprises.

C'est une épidémie silencieuse que les entreprises considèrent enfin. Ces dernières années, les maladies psychiques ont augmenté de 25%, avec plus de 12 000 accidents du travail reconnus pour troubles psychosociaux par an.

En 2025, la santé mentale est devenue la priorité absolue des DRH et managers, portée par plusieurs facteurs. En plus d’adresser une explosion des risques (absentéisme, burn-out, violence), elle s’impose dernièrement comme un critère d’attractivité et de rétention des talents. Surtout, elle est un levier stratégique dans la recherche de la performance dans un contexte économique sous tension. Mais alors, comment s'intègre un sujet si profond, de l’ordre de l’intime, dans la vie réelle de l’organisation ?

Agir à tous les niveaux : du salarié à l’organisation

Très concrètement, une approche systémique de la santé mentale permet déjà d’intervenir à trois niveaux majeurs. Sur le plan individuel, il s’agit de développer des services pour tout un chacun, indépendamment de l’activité de l’entreprise: dispositifs d’écoute et de soutien psychologique, mesures d’accompagnement de différentes phases de vie, de leurs défis (parentalité, logement, endettement)... 

Au niveau managérial, révisons le rôle des supérieurs hiérarchiques. Formons-les à l’écoute, à l’empathie, à la reconnaissance des signaux faibles. Ils sont les gardiens des valeurs fondamentales de l’entreprise.

Au sommet de l'organisation, adressons les causes structurelles du mal-être. Contre la perte de sens et de plaisir au travail, l’anxiété face à l’avenir, l’isolement : l’entreprise peut être un bouclier. Donner une direction claire, faire vivre une mission et recréer un socle collectif.

Managers, dirigeants : incarner la santé mentale

En santé mentale comme en leadership, la cohérence entre les discours et les actes est décisive. C’est particulièrement vrai pour le top management. Pour éviter les dissonances, gommons toute injonction contradictoire : intimer l’autonomie dans une structure ultra-contrôlante, par exemple, est une dichotomie désastreuse.

Aux dirigeants de réaffirmer la culture d’entreprise dans leur façon de communiquer, de réguler les tensions, de parler ouvertement des difficultés. Formons nos managers pour encourager les comportements empathiques, solidaires et collaboratifs plutôt que la compétition. Cette exemplarité des dirigeants soutient leur légitimité : qui peut inviter au bien-être sans éradiquer ses comportements destructeurs ?

Il est aussi temps d’admettre et d’intégrer la fragilité comme composante normale de la vie professionnelle : chacun a déjà fait l’expérience intime d’une difficulté, d’un moment de grand stress, de déprime qui s’est répercuté au travail. Exiger des collaborateurs qu’ils laissent leurs émotions à la porte du bureau n’est ni raisonnable, ni réaliste ! Privilégions plutôt dialogue et mains tendues.

Préparer l’organisation aux crises

La santé mentale ne se joue pas seulement en période calme, au contraire. Dans les moments de forte tension, l'intolérable est trop souvent toléré. Le lien social, fragilisé. Lorsque les équipes sont sous pression, bien des limites personnelles et collectives sont franchies ! Le rôle de l’entreprise est d’amortir ces pics de tension.

Du problème courant à la crise substantielle (fin de trimestre stressante, transformation interne, harcèlement, burn-out…), elle doit se doter de dispositifs pour réagir rapidement. Qui traite ces sujets et comment ? En anticipant les frictions, en identifiant bien en amont les outils et les compétences à mobiliser, l’entreprise construit sa résilience. Misons sur une culture de la régulation : ne laissons aucun conflit dériver. Ne les normalisons pas.

Une compétence collective

La santé mentale en entreprise est l’affaire de tous, à 5 mètres autour de soi. Produire de la santé mentale demande une vigilance constante envers chacun, en difficulté ou non. Dans la manière de se parler, de s’écouter, d’organiser une réunion…

En plus de formations dispensées à tous les niveaux, il est crucial de collecter des feedbacks réguliers. En documentant et mesurant précisément les comportements, l’entreprise développe une compétence pour traiter les problèmes. Comme on sait le faire aujourd’hui pour la gestion de projet ou la sécurité, nous pouvons faire de la santé mentale une compétence partagée.

La fin d’un tabou

C’est un pas considérable : en 2025, parler de santé mentale en réunion d’équipe comme en comex ne vous fera pas passer pour un excentrique. D’ailleurs, les entreprises les plus avancées ont déjà pleinement intégré le sujet à leurs process.

Le touchant témoignage de Nicolas Demorand sur sa bipolarité nous le rappelle : chacun doit pouvoir continuer à travailler, même en difficulté psychique. Au-delà de la protection des plus vulnérables, faire de la santé mentale un enjeu commun est aussi une vraie opportunité. Celle de bâtir une entreprise durable et résiliente face à tous les défis !