Demain, serons-nous tous travailleurs slashers ?

Connaissez vous les slashers ? Il s'agit de travailleurs bien souvent membres de la génération Z qui cumulent les activités. Si cette situation est parfois subie, elle est dans certains cas choisie. Plusieurs raisons expliquent la montée en puissance de cette nouvelle manière de travailler.

Le Digital a fait passer l’économie du réel à la donnée. Le temps réel est au cœur de l’économie digitale. Les échanges d’informations en temps réel favorisent la décentralisation et la désintermédiation de l’économie. 

La décentralisation s’accompagne d’une désintermédiation. Les plateformes digitales permettent aux individus d’entrer directement en relation et ces plateformes n’ont plus besoin de posséder les infrastructures nécessaires à leurs activités. Uber est souvent présenté comme la plus grande flotte de taxi au monde, sans posséder une seule voiture… AirBNB comme le plus grand hôtelier, sans posséder d’immeubles…
Les plateformes digitales sont les nouvelles agoras, collaboratives et virtuelles. Elles créent de nouvelles formes de travail et de nouveaux modes de vie.

Le cumul des activités comme mode de vie

Louer sa voiture avant de partir au bureau, mettre en location son appartement pendant ses vacances, mettre à disposition ou vendre son savoir-faire… Ce cumul des activités dans une même journée en passant de l’une à l’autre  pour avoir un complément de revenu ou juste par passion, c’est être un slasher, une façon de compléter ses revenus, de faire vivre une passion, voire servir de tremplin pour un changement de vie.

Avec les slashers, émerge une nouvelle culture du travail. La Californie et la Silicon Valley ont joué un rôle précurseur dans l’émergence et la popularisation de cette culture. Monique Dagnaud dans son livre "Le modèle californien" décrit cette nouvelle vision du travail, basée sur plus d’autonomie, de liberté, de flexibilité. La génération Z et les digital natives sont abreuvés des success stories de start-up rachetées à coup de milliards de dollars, et les modèles de l’entrepreneur, du travailleur indépendant free-lance s’imposent comme de nouveaux modèles de réussite.
 
Un nouveau contrat social, pas toujours subi
  
Les nouveaux modes de travail créés par l’économie digitale sont souvent dénoncés car porteurs de précarité. Ils peuvent être vus comme des activités “de débrouille” et questionnent sur l’émergence d’une nouvelle forme de “prolétariat”, un “nétariat”, travaillant souvent à la limite du droit du travail, sans congés payés, sans assurances sociales...
Ce serait une forme de travail subie pour des individus n’ayant pas accès au marché du travail traditionnel.
Face à ce travail subi, certains individus verraient dans ces plateformes, l’opportunité de s’orienter vers un travail choisi, permettant de générer des revenus complémentaires, mais pas essentiels, d’avoir des horaires flexibles, d’être indépendant…
Cette antagonisme entre travail subi et travail choisi, conduit à s’interroger sur l’impact des plateformes digitales sur les inégalités. Permettent-elles de pallier les difficultés d’accès au marché du travail ou, au contraire, renforcent-elles les inégalités en précarisant ceux qui sont déjà les plus fragilisés. Et que devient la fonction sociale du travail dans une organisation virtuelle, sans collègues, sans relations de travail ?

Si l’on se replonge dans les théories de Durkheim, la spécialisation est source de lien social car elle créée de l’interdépendance entre les individus. Dans une société où les individus peuvent tour à tour être salarié, chauffeur, loueur d’appartement… le travail crée-t-il alors toujours du lien social ?