La relation au temps de la Génération Z

Il est souvent évoqué que la génération Z a une autre relation au temps que les générations précédentes et que cette situation génère un rapport à l'activité professionnelle différent. Qu'en est il réellement et quelles conséquences sur les relations et l'organisation du travail ?

Les membres de la Génération Z à l’instar de la Génération Y n’ont pas la même relation au temps que les générations précédentes et cela influence fortement leur manière de s’organiser et d’accéder à l’information. Trois pratiques incarnent leur manière de fonctionner et les entreprises seraient bien inspirées de les prendre en compte si elles veulent développer le niveau d’engagement de leurs jeunes collaborateurs.

L’imbrication entre vie professionnelle et personnelle

Pour les baby-boomers et la Génération X, il y avait dans la gestion du temps une séparation claire entre le temps personnel et professionnel. Selon l’expression consacrée "on laissait ses problèmes personnels au vestiaire" pour ne penser qu’au travail. C’est avec réticence et parcimonie que l’on s’accorde le droit de  pouvoir appeler ses proches pendant le temps de travail. La donne est différente avec les jeunes générations et notamment la génération Z qui va naturellement s’autoriser des moments de détente pour aller sur les réseaux sociaux ou s’investir sur un projet personnel. Inversement, ce jeune salarié peut s’investir sur un projet professionnel à minuit ou selon son bon vouloir y consacrer une partie de son weekend. Tout cela pour dire que ce n’est pas le niveau d’engagement qui est en jeu mais la relation au temps. Les interactions entre vie professionnelle et personnelle sont nombreuses puisque que l’on sait qu’un membre de la Génération Z consulte jusqu’à 150 fois son smarphone dans une journée et qu’il va y consacrer entre 4 et 5 heures de son temps. Il ne faut pas oublier que le jeune ne va pas travailler par obligation et devoir. Son moteur c’est avant tout le plaisir de faire.

Aux managers de savoir s’adapter à cette nouvelle donne.  Ils doivent être en mesure de proposer des modalités souples d’organisation qui ne reposent plus sur des horaires fixes. Le télétravail est plébiscité par les jeunes. Dans un déplacement professionnel pouvoir faciliter la visite de la région peut être un contrat gagnant-gagnant. Il faut aussi faciliter l’accès à des services extra-professionnels (conciergerie, crèche d’entreprises, salle de sport.) Interdire les réseaux sociaux plutôt que de jouer la carte de la responsabilisation serait la pire des erreurs. Par contre savoir les utiliser dans le cadre professionnel s’avère une solution efficace pour rendre plus attractive et fluide la communication, la coordination, voire le reporting.

L’immédiateté et le temps présent

Les jeunes Z sont dans le temps présent et l’immédiateté. Ils sont peu proactifs et ne se projettent pas naturellement sur le moyen temps. Ils sont très réactifs et ils attendent la réciproque de leurs interlocuteurs. Ce sont des constats qui sont fréquemment faits par les managers et qu’il faut évidemment prendre en compte. Cette réalité se traduit notamment par de l’impatience. Cette relation à l’immédiateté peut les amener à faire rapidement une relance à leur manager faute d’avoir reçu réponse à une demande. La relation au temps entre les jeunes recrues et leur manager n’est pas la même et au quotidien elle peut créer des tensions, le jeune pouvant considérer le délai d’attente comme un manque de considération. 

Il y a une réflexion critique à conduire sur les processus de pilotage et d’évaluation des performances. Les entretiens annuels ont-ils un sens pour les membres de la génération Z qui sont en attente de cycles beaucoup plus courts ?... Attendre plusieurs mois une formation après l’entretien annuel génère aussi beaucoup de frustrations. Sans parler de l’organisation de la mobilité interne qui exige souvent un maintien dans un poste plusieurs années avant de pouvoir passer à une autre fonction. Les processus de management sont à revisiter si nous voulons pouvoir fidéliser des jeunes qui ne partagent pas la même relation au temps.

Le travail multitâche

Il est important de prendre aussi en compte le fait qu’ils sont multitâches. Ils ont été capables pendant leurs études de réviser leurs leçons tout en écoutant de la musique et en surfant sur internet. Travailler avec plusieurs écrans ne pose aucun problème. Ils sont capables aussi d’avoir rapidement une vision globale des informations en passant d’une information à l’autre. Soyons clair : le cerveau n’est pas en mesure de réaliser plusieurs tâches de manière strictement simultanée. En fait, plusieurs zones peuvent s’activer en même temps, mais le cerveau ne traitera qu’une seule tâche à la fois. Les jeunes Z développent à travers l’usage des écrans une aptitude à passer très rapidement d’une tâche à l’autre. Cette faculté ne se fait pas sans conséquences sur la capacité à se concentrer durablement sur un sujet ou sur la profondeur d’une analyse. Selon le professeur Olivier Houdé, ils ont développé à travers les réseaux sociaux des aptitudes cérébrales de vitesse et d’automatismes au détriment du raisonnement et de la maîtrise de soi.

Les managers doivent intégrer ce besoin de pouvoir passer rapidement d’une activité à l’autre en sachant mettre en place les gardes fous nécessaires pour juguler les risques d’une analyse trop superficielle. La réactivité est appréciable mais elle peut dans certaines activités avoir des conséquences sur la qualité du travail (voire la sécurité) car Il ne faut pas mélanger vitesse et précipitation.