Neuf conseils pour soigner sa trésorerie pendant la crise

Neuf conseils pour soigner sa trésorerie pendant la crise Que vous soyez en négatif ou que vous ayez un peu d'avance sur votre trésorerie, voici les bonnes pratiques à adopter pour tenir.

Sauver sa trésorerie. C'est aujourd'hui le problème numéro un des entreprises. Certaines sont déjà dans le rouge tandis que d'autres ont un peu d'avance... mais jusqu'à quand ? Pour l'heure, aucune date sur la fin du confinement ou la réouverture des commerces jugés non essentiels n'est annoncée. Et donc aucune date de reprise globale de l'activité économique n'est envisagée. Le JDN a contacté plusieurs professionnels de la gestion et de la prévision de trésorerie afin de vous aider à passer au mieux cette période critique qui risque de durer. 

Conseil n° 1 : prévoyez le pire

Vous devez imaginer le pire scénario pour votre entreprise... en espérant qu'il ne se passe pas. Et le pire n'est pas un confinement d'un ou deux mois. "Si on regarde la Chine et l'Italie, on parle plutôt d'un confinement de trois mois, d'une réouverture des restaurants au bout de six mois avec une sortie de crise qui mettra du temps à arriver", observe Sébastien Beyet, PDG d'Agicap, solution de gestion et de prévision de trésorerie pour les TPE et PME. "Il faut donc prévoir une forte baisse d'entrée d'argent pendant longtemps. Anticiper cette baisse permet de prendre des décisions pour repartir sur de bonnes bases", ajoute-t-il. Ne prévoyez pas non plus que le pire. "Il faut faire en sorte d'avoir des scénarios différents en fonction de ce que pourrait donner la crise : un optimiste, un pessimiste et un intermédiaire. "Pour chaque scénario, il faut y associer des projections de cash flow et voir si c'est réaliste ou non", recommande Guillaume Roudeau, senior director au sein du pôle treasury advisory du cabinet spécialisé Redbridge.  

Conseil n°2 : réduisez vos coûts 

Il est important de surveiller les rentrées d'argent mais aussi les sorties. En premier lieu, les experts interrogés conseillent de réduire certains coûts. "Je préconise de supprimer les dépenses marketing et autres dépenses bonus comme les abonnements en ligne, des prestataires pas indispensables… Plus tôt vous le ferez et plus tôt ce sera impactant sur votre trésorerie", fait remarquer Sébastien Beyet. "Sur les autres dépenses, il faut réduire la voilure, regarder poste par poste ce que vous dépensez. Mis tout bout à bout, vous ferez des économies et en quelques mois, vous aurez peut-être un mois de cash en plus", complète-t-il

"Plus tôt vous supprimez dépenses, plus tôt ce sera impactant sur votre trésorerie"

Vous pouvez également réduire vos charges fiscales. A la mi-mars, le gouvernement a annoncé une série de mesures permettant aux entreprises de reporter, sans pénalité, des charges fiscales et sociales. L'Etat a également négocié avec EDF, Engie ou encore le Centre national des centres commerciaux pour reporter le paiement des factures de gaz, d'électricité et les loyers. Enfin, c'est aussi l'occasion de renégocier votre prêt avec votre banque, si vous en avez un, afin de le rééchelonner. 

Conseil n°3 : envisagez le chômage partiel 

Le recours au chômage partiel n'est évidemment pas une décision facile à prendre. Toutefois, nos experts recommandent d'y recourir rapidement car sa mise en place effective n'est pas instantanée. "Il faut se créer un compte sur le site de la Direccte, ce qui peut prendre plusieurs jours. Faire la demande n'engage à rien. En fin de mois, vous déclarerez le nombre d'heures chômées", explique Sébastien Beyet. N'en abusez pas non plus puisqu'il y aura des contrôles a posteriori.

Conseil n°4 : cherchez des financements 

Suite à l'annonce du confinement, l'Etat a mis en place plusieurs dispositifs, notamment avec Bpifrance, pour permettre aux entreprises d'obtenir rapidement des prêts auprès de leur banque. "Il ne faut pas faire les choses au dernier moment quand vous êtes dans le rouge. Tant que les vannes sont un peu ouvertes, il faut y aller. Il se peut que les conditions d'obtention de crédit se durcissent à terme", fait remarquer Tiffany Tinperman, CEO de Trésoria, service de recherche de financements dédié aux TPE et PME. "Pour s'assurer d'avoir une réponse positive de la banque, il faut faire appel aux mécanismes mis en place par l'Etat, surtout si votre business est dégradé. Nous conseillons de mettre en place des prévisions de trésorerie d'un, deux ou trois mois très rapidement pour que la banque puisse prendre une décision le plus vite possible", préconise de son côté Guillaume Roudeau. 

"Tant que les vannes sont un peu ouvertes, il faut y aller. Il se peut que les conditions d'obtention de crédit se durcissent à terme"

 

Si votre banque refuse de vous accorder un crédit, vous pouvez vous tourner vers d'autres acteurs financiers. Le JDN a dressé la liste des financements de trésorerie à court terme dont certains sont proposés par des start-up "Il existe de nombreuses solutions de financement méconnues du chef d'entreprise comme le crowdlending, le financement du bon de commande, l'affacturage, le leaseback (vendre un actif et le récupérer en location pour une longue durée, ndlr)", énumère Tiffany Tinperman. 

Conseil numéro 5 : sélectionnez les factures à régler 

Ne refusez pas de payer toutes les factures, même si la situation est compliquée pour vous.  "Les factures déjà émises doivent être payées pour éviter un effet boule de neige dans l'économie, surtout si votre fournisseur est plus petit que vous. Si vous ne pouvez pas, essayez de négocier avec eux", conseille Sébastien Beyet. "Il y a une interdépendance forte entre tous les acteurs. On est tous le client et le fournisseur de quelqu'un. Il faut éviter d'avoir des réflexes égocentrés. N'allez pas suspendre vos paiements fournisseurs ou encaisser trop vite. Optez pour du cas par cas", renchérit Guillaume Roudeau. En revanche, pas de panique pour les factures destinées aux grandes entreprises, qui sont compréhensives en ces temps de crise puisqu'elles ont souvent de grosses poches de trésorerie. Prévenez-les que vous devez décaler le paiement de vos factures. 

Conseil n°6 : dotez-vous de bons outils

Pour bien prévoir et suivre votre trésorerie, et fournir des données claires à votre banquier si vous souhaitez contracter un prêt, utilisez de bons outils. Si vous êtes à l'aise avec Excel, vous pouvez très bien vous en servir pour visionner votre trésorerie. Sinon, il existe plusieurs solutions, qui sont d'ailleurs partiellement ou entièrement gratuites depuis le début de la crise. En voici une sélection non exhaustive : 

Conseil numéro 7 : demandez des conseils autour de vous 

Vous n'êtes pas la seule personne à vous posez beaucoup de questions en ces temps difficiles. "Les entrepreneurs doivent échanger avec leur pairs. C'est toujours bien de se confronter à d'autres, avoir un avis extérieur. Surtout quand on a peur de prendre une décision. Le chômage partiel, par exemple, est violent. On a besoin d'être rassuré", illustre Tiffany Tinperman.

"Il faut mettre en place des mécanismes, actions et leviers à horizon 6, 8 ou 12 mois."

 

Contactez donc d'autres entrepreneurs et entrez dans des communautés sur Facebook ou Slack. Agicap a par exemple créé le canal Slack "Cash is king" pour échanger sur les problématiques de gestion de trésorerie. Vous pouvez également assister à des webinars organisés par des start-up (Clémentine, Evoliz, Dougs, …) ou des organismes comme le Village by CA ou The Family

Conseil n°8 : trouvez de nouveaux revenus 

Profitez-en pour plancher sur de nouvelles sources de revenus ou de nouveaux business models. Si vous n'avez pas d'activité e-commerce, peut-être est-il temps de s'y mettre, si c'est possible bien sûr. Certains commerces de proximité ont récemment lancé des offres en ligne par exemple. 

Conseil n°9 : anticipez la sortie de crise 

Même si l'issue de la crise est incertaine, il faut l'anticiper d'un point de vue financier mais aussi business. "Il faut mettre en place des mécanismes, actions et leviers non plus sur du court terme mais à horizon 6, 8 ou 12 mois. Il faut se demander comment sera le monde de demain, voir dans quelle mesure le business va évoluer et quel sera l'impact sur le cash flow", insiste Guillaume Roudeau. C'est aussi le moment de revoir sa stratégie financière."C'est le moment de prendre de la hauteur car en général un entrepreneur n'a pas le temps quand son activité tourne. Il faut par exemple repenser à la saisonnalité de sa trésorerie, définir le financement de ses stocks aux bonnes dates...", indique Tiffany Tinperman. En trois mots : anticipez, anticipez, anticipez.