Le pari de la VR porte-t-il ses fruits en entreprise ?

Après l'enthousiasme initial des débuts, il est l'heure de se poser une question douloureuse, mais nécessaire : le pari de la réalité virtuelle en entreprise a-t-il été un bon choix ?

Nombreuses sont les entreprises à avoir investi dans la réalité virtuelle pour la formation de leurs salariés notamment. Entre 2015 et 2020, les exemples sont légion. Néanmoins depuis le pari de Méta pour le Métavers – englobant la réalité virtuelle - la situation semble être différente. En janvier 2023, Meta licenciait 13% de ses effectifs, pour un total de 11 000 employés. La faute à des investisseurs qui peinent à être convaincu du projet métavers, un rejet sceptique des questions de réalités alternatives et de leur applicabilité qui semble se répandre à l’usage de la VR en général. Aussi, maintenant que l’enthousiasme initial est dépassé, il est l’heure de se poser une question douloureuse, mais nécessaire pour avancer : le pari de la réalité virtuelle en entreprise a-t-il été un bon choix ?

Des avantages réels

La réalité virtuelle connait de nombreuses applications dans l’industrie. Face aux processus de production qui connaissent une densification de leur complexité, la simulation permet de former in situ des opérateurs qui peuvent ainsi faire leur premier pas en toute sécurité. À titre d’exemple, en 2020, Volkswagen prévoyait de former 10 000 de ses salariés à 30 formations dispensées en réalité virtuelle.

C’est une technologie qui a bien sûr un impact sur la phase de conception. La CAO (Computer Aided Design) a permis de consigner les planches à dessin et de permettre une modélisation plus aboutit des pièces manufacturées. La sophistication toujours plus importante des pièces est ainsi simplifiée par la simulation qui divise coûts, risques et délais. Les plans créés sont ainsi plus adaptés et contribuent à la réduction drastique des rebuts de production. En somme ici, la VR permet de travailler plus précisément sur la conception et améliore durablement la productivité.

En ce qui concerne la logistique, aujourd’hui, les environnements interactifs générés par ordinateur rendent les organisations capables de cartographier leur logistique d’entrepôt en trois dimensions et de la tester au travers de scénarios virtuels précis, au moyen de casques VR. Elles peuvent ainsi examiner des processus logistiques complexes pour y déceler des sources d’erreur et les optimiser dans les moindres détails, avant même que leurs coûts ne deviennent réellement problématiques. De même, la virtualisation de la chaîne d’approvisionnement met en évidence les dépendances et l’impact des décisions sur les opérations. Ici aussi, la VR est un outil de diagnostic pratique.

Un mirage qui s’essouffle ?

Pour qui observe l’industrie depuis longtemps, la VR a été très vite portée au pinacle des solutions d’avenir. Pourtant, et malgré les applications citées, force est de constater que la VR n’est pas devenue une norme industrielle. C’est un avantage certain, mais localisé, mais la multiplication prophétisée de ces usages est restée lettre morte.

Et pour cause, les défis sont multiples et les forces de friction sont particulièrement importantes pour permettre à cette technologie de prendre une place prépondérante dans les processus de production. Parmi les défis de l’industrie 4.0, former les employés peu férus de nouvelles technologies et donc peu motivés est l’une des questions les plus difficiles à résoudre. À ceci, s’ajoute la difficulté d’adapter cette technologie aux impératifs de santé de chacun, puisqu’il faut ajuster les casques à la vision de tous et prendre en compte également le motion sickness (maux de tête et vertiges) dont souffrent certains utilisateurs.

Pour finir, c’est l’apport même de la VR qu’il s’agit d’interroger. De nombreuses campagnes marketing en vantent les apports en termes d’engagement, de mémorisation, d’implication. Pourtant, la science est bien plus prudente. Si elle remarque des améliorations dans ces domaines, ces dernières sont relativement à la marge et sont localisées à des processus dans des domaines spécifiques. Et si la VR permet de visualiser et de tester des scénarios en profondeur, choisir d’y voir un va-tout qui redéfinirait en profondeur l’industrie semble un vœu pieu qui, en soit, a peu de chance d’aboutir.