Evolutions de la fonction RH : externalisation ou centres de services partagés ?

Quels sont les avantages et inconvénients de l'externalisation, de la création d'un CSP ou de la gestion interne traditionnelle pour le département RH ? Franck Boutboul livre ses conseils pour faire le bon choix.

L'externalisation et la création de centres de services partagés (CSP) apparaissent de plus en plus comme des évolutions organisationnelles appliquées à la fonction RH. Ce mouvement s'inscrit dans le contexte plus général de l'émergence des nouvelles formes d'organisation et de leur rôle actif au sein des entreprises : participer à l'atteinte de leurs enjeux.
 
A ce titre, de nombreuses questions se posent quant au choix concernant la réorganisation des différents domaines RH : les centres de services partagés sont-ils une étape intermédiaire avant l'externalisation de la fonction RH ? Ou représentent-ils une réelle alternative ? Quels sont les avantages et les inconvénients respectifs des trois types d'organisation : CSP, externalisation ou organisation traditionnelle de la fonction ?

Les enjeux au coeur des choix d'organisation
La fonction RH, à l'instar de nombreuses fonctions dans l'organisation, évolue pour intégrer les nouveaux enjeux : évolution des réglementations, dimension internationale et complexification des opérations, valorisation des RH, évolution démographique et fidélisation des talents, responsabilité sociale de l'entreprise, etc. Les défis que doivent relever les entreprises, et leur multiplicité, impactent inexorablement leur stratégie RH.
 
Pour s'adapter et répondre favorablement à ces enjeux, les entreprises doivent faire des choix organisationnels RH avec une évolution voire une remise en cause de leurs objectifs et, par voie de conséquence, de leur modèle. D'un côté, l'organisation doit veiller à améliorer la productivité RH et optimiser le fonctionnement de ses commodités. En ce sens, elle crée de la valeur pour l'entreprise, qui est une valeur financière à court terme. De l'autre, il est de sa responsabilité de travailler sur la performance RH, créatrice de valeur sur le long terme : amélioration des processus d'évaluations augmentant la pertinence des plans de formation, donc amélioration des compétences RH, de la créativité et de la productivité.

A ce titre et à plus long terme, les résultats financiers seront plus importants, mais probablement, indirectement et potentiellement plus pérennes. Aussi, concevoir, déployer, opérer et maintenir une organisation alignée avec les objectifs de l'entreprise consiste à trouver le bon équilibre entre le court et le long terme, entre la productivité et la performance RH. Cependant, il s'agit avant tout, de définir les enjeux liés à l'organisation et de trouver les solutions susceptibles d'accompagner l'entreprise dans sa démarche d'optimisation des processus et de création de valeur.
 
Externalisation versus CSP : des modèles à part entière
Dans cette recherche d'une meilleure configuration opérationnelle, les entreprises se tournent vers des modèles offrant le meilleur calcul coût/avantages. La question qui se pose dès lors est : mutualiser et capitaliser en interne l'expertise RH (au sein d'un CSP) ou chercher cette expertise en externe (auprès d'un "outsourceur") ?

Les principaux points communs entre les deux formes d'organisation sont les suivants :
- des facteurs communs explicatifs du choix de l'un ou l'autre de ces formes : des systèmes d'information plus ou moins vieillissants, un niveau de qualité non mesuré ou non maîtrisé, un niveau d'expertise inadéquat ou mal réparti au sein des différentes entités de l'entreprise, une volonté de se départir de la gestion administrative et de se consacrer aux activités créatrices de valeur sur le long terme,
- le transfert de tout ou partie de la fonction vers une entité autonome, qui induit des transferts technologiques et humains,
- la rédaction d'un contrat formalisant les relations entre les entités de l'entreprise et le prestataire de services interne ou externe ; ce contrat crée une relation client/fournisseur entre le prestataire interne ou externe et les services utilisateurs.

Toutefois, quels sont les avantages propres à l'une ou à l'autre des solutions ? Quel modèle servira le mieux quels enjeux ?
L'externalisation, tout d'abord, se distingue par la maîtrise et la richesse des compétences et des moyens en ce qu'elle concentre, au sein d'un même pôle, l'expertise humaine et technique ad hoc. Ce professionnalisme permet tout à la fois une meilleure gestion des risques, une meilleure capacité de déploiement et l'opportunité de solutions clés en main directement opérationnelles sur site pour les entreprises qui la choisissent.

De son côté, le CSP présente l'avantage d'une meilleure connaissance métier de l'entreprise a priori. En termes de transformation (en cas de fusion par exemple) et de maintien de l'expertise RH, l'externalisation et le CSP sont à mettre sur le même plan en théorie. Enfin, au regard de la productivité et de la gestion de la transition, les opportunités sont variables en fonction du niveau de centralisation initiale de l'organisation et de la pérennité de la qualité de service du CSP.

Dans l'échelle des centres de responsabilité, le CSP pourrait normalement être un centre de profit. Cependant, ce n'est pas systématiquement le cas, l'objectif n'étant pas de dégager le profit le plus important possible mais "seulement" d'obtenir un équilibre entre les charges et les prestations facturées. Certes une certaine liberté est laissée quant aux choix d'investissements. Cependant, on comprend aisément que le CSP est plus proche d'un centre de coût avec respect d'un budget que dans une logique de centre de profit. Le respect de ces contraintes facilite la mise en concurrence du CSP avec des prestataires externes. Responsable de ses moyens, de la qualité et du coût des prestations à l'égard des clients internes à l'entreprise, le CSP RH peut constituer une première étape vers l'externalisation, voire une alternative.

Externalisation ou CSP ? Une fois les enjeux définis et les meilleures solutions posées au regard des objectifs assignés, l'organisation doit cependant évaluer les critères de faisabilité en tenant compte des environnements disparates de l'entreprise : dimension géographique, climat social, communication et culture d'entreprise. C'est au regard de cette analyse que l'entreprise fera son choix.


La mixité des solutions en fonction des enjeux opérationnels
Pour ce faire, la réflexion peut reposer sur trois axes d'analyse : les activités réalisées, les compétences requises et les outils qui supportent l'ensemble. Recrutement, mobilité interne, gestion de la performance, développement professionnel, formation, rémunération, administration du personnel, temps et activités, paie... chacun des domaines RH doit être analysé en fonction de ces trois axes dans une optique d'amélioration globale de la performance RH.
Bien souvent, sont constatés des modèles mixtes, alliant fonctions externalisées et CSP afin de tenir compte de la criticité, de la complexité, de la maturité technologique et du niveau de compétences nécessaires à chacun des processus RH. A la lecture de cette grille d'analyse, la paie s'impose comme le processus le plus externalisable. 

En conclusion, "la meilleure" organisation de la fonction RH ne peut être unique et surtout doit être évolutive dans le temps pour répondre au mieux aux enjeux et besoins de l'entreprise en perpétuel renouvellement.