Qui a peur du travail hybride ?

4 grandes entreprises 5 sur cinq ont adopté une organisation dite "hybride". Si les entreprises veulent offrir une réelle flexibilité à leurs salariés, la règle ne doit pas être tabou.

Quatre grandes entreprises françaises sur cinq ont adopté une organisation dite "hybride" flexible, mixant présentiel et distanciel. Nous avons bel et bien dépassé le stade de l’adaptation temporaire à une pandémie mondiale : le passage à un mode de travail hybride, mélangeant intelligemment présence au bureau et télétravail, est révélateur d’une transformation réelle et pérenne de notre manière d’appréhender le travail. Or, certaines entreprises pensent qu’il est encore possible d’organiser ce nouveau mode de travail complexe via des fichiers Excel tenus à la main ou en misant sur le "bon sens" et l’organisation "informelle" qui n’est souvent qu’un vaste bazar présenté, à tort, comme de la "flexibilité".

Il n’en est rien : si les entreprises veulent offrir une réelle flexibilité à leurs salariés, synonyme d’attraction des talents et d’efficacité, la règle ne doit pas être tabou et il est même urgent d’aller encore plus loin pour ancrer durablement cette flexibilité.

La grande gagnante du travail hybride : l’incertitude généralisée

De notre expérience et nos entretiens réguliers avec des centaines de DRH, il ressort que le passage au travail hybride a généré beaucoup d'incertitudes, sur plusieurs plans. De l’incertitude côté salarié, sur la capacité à voir les personnes qui importent, pour les jours où ils font le choix de se rendre au bureau. Sur leur capacité à avoir une place certaine et attribuée lorsqu’ils se rendent au bureau. Autant d’incertitudes qui freinent leur retour au bureau, au grand désespoir des DRH. Mais l’incertitude ne s’arrête pas au simple salarié. 

Côté manager, il est devenu difficile de faire collaborer les équipes en présentiel. De s’assurer également que personne n’est à risque d’isolement psycho-social du fait du télétravail. 

Enfin, côté ressources humaines : comment s’assurer à l’échelle de l’entreprise que le lien social, socle de productivité et de bien-être au travail, n’est pas en train de se déliter ? Comment s’assurer également que la politique de télétravail, chantier qui a souvent nécessité des heures de travail, consommatrice de temps et d’énergie, est bien appliquée et adaptée aux aspirations réelles des salariés ? 

Toutes ces questions ont placé l’organisation du travail comme priorité numéro 1 des DRH, selon la dernière étude conjointe de l’ANDRH et du cabinet de conseil BCG (Le futur du travail vu par les DRH, 2e édition, Mars 2022).

Bonne nouvelle : cette incertitude n’est pas une fatalité

La complexité de ce nouveau mode de travail est infinie. L’incertitude s’est installée et pour y remédier, certains s’accrochent à des points d’ancrage qui freinent la flexibilité : bureaux attribués, jours fixes de télétravail, voire même contrôle des salariés par le temps d’écran, etc. On fait marche arrière, faute d’avoir trouvé la solution qui mettrait tout le monde dans les meilleures conditions. Dans les faits, cette incertitude vient de plusieurs "trous dans la raquette". 

La question numéro 1, que tout le monde se pose, du stagiaire au CEO : qui vient quand au bureau ? Il est amusant de voir à quel point une question aussi simple ne trouve souvent pas de réponse.  Autres questions qui en découlent : comment savoir si ma politique de télétravail est la bonne ou quelle politique de télétravail mettre en place ? Comment mesurer précisément ses besoins en espaces de travail ? Comment réduire le gaspillage des restaurants d’entreprise ? Comment adapter la paye, les indemnités télétravail, les titres restaurants ? 

Heureusement, cette incertitude n’est pas une fatalité : avec une volonté de transparence et les bons outils, l’entreprise peut facilement la réduire, voire l’éliminer.

Une seule solution pour prendre les bonnes décisions : la donnée

L’avantage d’avoir créé une entreprise en sortant d’école, c’est que nos apprentissages sont encore frais. L’un d’eux, principe rabâché à longueur de cours, m’est encore cher : “si votre décision n’est pas justifiée par de la donnée, ne la prenez pas”. 

Et dans le cadre du travail hybride, la précieuse donnée existe : sur la présence des équipes au bureau, la fréquence de fréquentation des espaces, les taux d’occupation moyens et historiques des espaces, etc. L’hybridation du travail est un chantier de l’innovation en tant que tel. Il faut être en mesure d’appréhender les nouvelles habitudes et aspirations de chacun, grâce aux données, pour pouvoir repenser le travail et les espaces de travail intelligemment. 

Il est urgent que les managers, les fonctions RH et Workplace s’appuient sur de la donnée concrète et fiable pour piloter quelque chose d’aussi important que leur politique de télétravail et l’organisation de leurs espaces. Les enjeux autour de la rétention et de l’attraction des talents sont trop énormes pour pouvoir prendre ces décisions à la légère. 

L’entreprise a entamé sa révolution organisationnelle et les gagnants de demain seront ceux qui sauront insuffler et accompagner un véritable changement pour répondre à la fois aux aspirations des collaborateurs et aux enjeux stratégiques de productivité et de croissance des entreprises.