Métaverse : comparatif des plateformes, centralisées ou non

Métaverse : comparatif des plateformes, centralisées ou non Le métaverse est souvent associé au Web3, sans que ce soit toujours adéquat. Outre la technologie sous-jacente, la propriété et donc la rémunération des utilisateurs varient radicalement.

En mai 2022, un rapport du cabinet McKinsey évoquait une création de valeur potentielle autour du métaverse de 5 000 milliards de dollars d'ici 2030. Néanmoins, dès son introduction, ce même rapport admet que le terme, employé pour la première fois en 1992 par Neal Stephenson dans son roman "Snow Crash" "reste à définir, aussi bien littéralement qu'au figuré". A l'origine, la définition recouvre une infrastructure similaire à Internet mais immersive. Aujourd'hui, le terme caractérise seulement des plateformes, compte tenu de l'état actuel de la technologie et de l'absence d'interopérabilité entre elles.

Ces plateformes ne présentent pas les mêmes caractéristiques : si toutes peuvent être qualifiées d'environnement social en 3D et peuplé par des avatars, elles se distinguent par leur ouverture et la liberté offerte à leurs usagers. On retrouve donc des métaverses à l'infrastructure centralisée et d'autres plus ouverts, impliquant un certain degré de décentralisation et d'ouverture de l'écosystème.

Les métaverses centralisés

Si les moins de trente ans ne l'ont pas connu, le pionnier des métaverses est français et s'appelle "Le Deuxième monde", projet de Canal+ Interactive de reproduction immersive de Paris accessible sur Windows et MacOS dès 1997 et arrêté en 2002, en dépit d'une communauté forte de 200 000 utilisateurs.

Sur ses cendres, est apparu dès 2003 Second Life, premier métaverse sur la toile : parfois perçu comme une relique d'Internet, la plateforme est pourtant toujours bien active aujourd'hui et a surtout posé les fondamentaux de ses successeurs : VRChat, Roblox, Minecraft, Fortnite ou Meta Horizon's Worlds.

Si tous ces métaverses ne présentent pas tous la même vocation (Roblox, Minecraft et Fortnite sont des plateformes de jeu vidéo tandis que les autres restent des environnements d'interactions sociales), ils s'appuient tous sur des standards similaires en termes de monétisation : une part majeure de l'UGC, cet acronyme signifiant user-generated content ou contenu créé par l'utilisateur – leur revient. Pour susciter de l'interactivité, ces métaverses permettent en effet aux utilisateurs de créer des actifs virtuels, sous forme de skin, d'objet, d'architecture mais si ce contenu est cessible, la distribution de la valeur soulève de nombreuses questions.

Chez Roblox, les créateurs ne perçoivent qu'environ 30% de leurs produits. Du côté de Meta's Horizon Worlds, le créateur redonnera 25% de ses ventes à Meta, sans compter les frais prélevés par le store (30% dans le cas du Meta Quest Store). Chez Minecraft, les frais sont de 30%. Chez Fortnite, seuls des créateurs externes agréés par la plateforme peuvent créer des environnements de jeu – ils sont responsables de la moitié du temps joué, d'après le CEO d'Epic – et les conditions d'utilisation du jeu ne permettent même pas la revente des achats d'objets virtuels : les utilisateurs ne sont dès lors pas propriétaires de ces actifs virtuels. Dans Second Life, les terrains achetés par les utilisateurs restent la propriété de l'éditeur Linden Lab.

Par ailleurs, en cas de disparition de ces plateformes, les utilisateurs perdent également leurs achats et créations, sans possibilité de les transférer vers un autre monde.

Les métaverses Web 3.0

Capture issu de Gucci Vault Land dans The Sandbox © The Sandbox

Un meilleur partage de valeur et la possibilité de détenir la propriété d'un actif numérique, c'est la promesse des plateformes Web3 comme The Sandbox, Decentraland ou encore Somnium Space. Un vœu permis par l'infrastructure blockchain.

Si l'environnement de ces mondes est toujours exécuté sur les serveurs des sociétés concernées, il s'ouvre néanmoins à l'intégration de contenus externes, créés sur une blockchain, le plus souvent Ethereum ou Polygon, sous forme de NFT. Lors d'une entrevue avec le JDN au Gitex de Dubai, Yat Siu, fondateur d'Animoca Brands (détenteur de The Sandbox) insistait sur l'importance de ce concept : "Dans le Web3, personne ne peut me dire que je ne suis pas autorisé à vendre ma maison. Si j'ai la propriété numérique de mon actif, je dispose de mon entière liberté. Nous passons d'un capitalisme d'actionnaires à un capitalisme de participants, qu'il s'agisse d'un détenteur d'avatar, d'un terrain virtuel."

Dès lors que le créateur détient la clef de son portefeuille, il est entièrement propriétaire de ce contenu et peut donc l'intégrer et le monétiser pour des frais bien plus modiques que sur les plateformes Web2 : les transactions de Decentraland sont par exemple taxées à hauteur de 2,5%, 5% pour The Sandbox. De plus, le créateur est libre d'associer la perception de royalties sur ses créations à chaque vente secondaire. Un autre facteur de taille au sujet de ce type de création concerne l'interopérabilité : un utilisateur peut aujourd'hui utiliser un même NFT au sein de The Sandbox et de Decentraland, même si cela nécessite encore quelques étapes.

Enfin, une infrastructure Web3 permet d'activer d'autres leviers communautaires : Decentraland a notamment ouvert une part de sa gouvernance à travers une DAO (organisation autonome décentralisée) pour les détenteurs de ses jetons et de ses terrains, permettant de voter de manière transparente sur des choix stratégiques ou politiques.