"Mon métier m'a empêché de récupérer l'héritage de mon amie, j'ai tout perdu"
A cause de leur profession, certaines personnes ne peuvent pas bénéficier des gains de l'assurance-vie dont ils sont bénéficiaires.
"Louise était une vraie amie et sa mort m'a beaucoup affectée", se souvient douloureusement Bastien. Pharmacien dans le sud de Paris, il explique avoir tissé, au fur et à mesure des années, un lien très fort avec l'une de ses patientes. "Louise habitait dans le quartier où je travaillais et était atteinte d'une lourde maladie, alors elle venait régulièrement dans ma pharmacie pour récupérer ses médicaments", explique t-il. "Nous sommes devenus amis car elle venait quasiment tous les jours, souvent juste pour discuter et boire un café quand je n'avais pas beaucoup de patients", précise le pharmacien.
Selon lui, le pire des maux que devait supporter son amie était la solitude : "Elle était veuve, elle avait deux enfants et même des petits-enfants, mais personne ne lui rendait jamais visite. C'est à peine si elle recevait un coup de téléphone dans l'année". Bastien indique que c'est lui qui emmenait Louise dîner pour son anniversaire et parfois même pour Noël. L'amitié entre le pharmacien et Louise était telle qu'un jour elle lui a annoncé l'avoir inscrit comme bénéficiaire sur un contrat d'assurance-vie ouvert dans une banque.
En effet, lorsqu'une personne souscrit à une assurance-vie, elle désigne un ou plusieurs bénéficiaires à qui l'argent sera versé après son décès. La clause standard la plus utilisée désigne comme bénéficiaire "mon conjoint, à défaut mes enfants, nés ou à naître, vivants ou représentés, à défaut mes héritiers", mais il est également possible d'opter pour une clause bénéficiaire particulière. Cette dernière permet d'y inscrire par exemple un ami. Il faut alors fournir à l'assurance le nom, le prénom et la date de naissance du bénéficiaire. Or, ce que Louise ne savait pas et que son assureur ne lui a pas dit, c'est que certains types de bénéficiaires sont considérés comme illégaux, notamment à cause de leur profession.

L'assureur de Louise n'a rien dit car, légalement, il ne peut pas s'opposer à la rédaction d'une clause bénéficiaire, même si le bénéficiaire en question est "illégal". "Quand Louise est décédée, j'ai donc découvert que mon statut de bénéficiaire sur l'assurance-vie avait été déclaré nul et non avenu", explique Bastien. Le pharmacien n'a donc rien touché et le capital déposé sur l'assurance-vie a été reversé au reste de la succession dont les enfants de la défunte ont hérité.
En cause, l'article 909 du Code civil indique que "les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux qui ont prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt ne peuvent profiter des dispositions testamentaires qu'elle aurait faites en leur faveur".
Au delà des médecins, chirurgiens ou pharmaciens, la loi inclut également les membres d'un culte, les mandataires judiciaires à la protection des majeurs sous tutelle ou curatelle, ainsi que les conseillers bancaires. En clair, toutes les personnes qui, de par leur profession, sont susceptibles d'exercer une influence sur l'assuré.
En plus de ce cadre juridique, la loi permet également aux héritiers d'une personne défunte de contester une clause bénéficiaire particulière, notamment si le contrat d'assurance-vie souscrit représente la part la plus importante du patrimoine de l'assuré.
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