Géraldine Martin-Coppola (ShoeDazzle) "L'e-commerce sur abonnement peut être une contrainte pour certains clients"

Pionnier de la vente sur abonnement, ShoeDazzle a depuis modifié son modèle. Sa directrice produit et design explique pourquoi et détaille les nouveaux projets de la start-up de Kim Kardashian.

Pouvez-vous nous présenter ShoeDazzle et son concept ?

ShoeDazzle est une société créée en mars 2009 et cofondée par la star Kim Kadarshian. Nous sommes spécialisé dans la vente de chaussures et autres accessoires de mode. Notre particularité est d'offrir à nos utilisatrices des conseils de mode personnalisés. La société est basée à Los-Angeles et emploie aujourd'hui près de 200 personnes.

Comment vous différenciez-vous des autres sites de mode ?

Notre but est de simplifier le shopping sur le web. Sur ShoeDazzle, vous n'avez plus besoin de visiter des centaines de pages pour trouver un produit qui vous correspond. Chez nous, tous les produits que nous vous proposons ont été présélectionnés pour vous. Notre valeur ajoutée est d'offrir à nos utilisatrices un niveau d'attention équivalent à celui qu'elles pourraient avoir dans une boutique chic de Beverly Hills. Là-bas, les stylistes connaissent tous vos goûts et vous font découvrir les dernières nouveautés. Mais dans notre cas, les prix sont très abordables.

Comment faites-vous pour établir vos recommandations ?

Pour cela, nous faisons remplir un questionnaire à tous nos nouveaux inscrits afin de déterminer leurs goûts en matière de mode. Nous leur demandons de choisir parmi différents produits afin de déterminer leurs différents styles, puis nous allons affiner nos recommandations au fil du temps, en prenant en compte les achats passés sur le site ou les différents produits regardés. A ce jour près de 13 millions de personnes ont déjà rempli le questionnaire.

Alors que vous étiez spécialisé à l'origine dans la vente de chaussures, vous avez récemment ouvert votre offre à d'autres produits, pourquoi ce choix ?

Nous avons en effet ajouté dans un premier temps les bijoux et les sacs, puis en avril les sous-vêtements et les robes. Même si la plupart de nos clientes viennent encore pour les chaussures, l'idée, à terme, est de pouvoir les habiller de la tête aux pieds.

D'où viennent les produits en vente sur le site ?

Nous assurons le design des produits en interne avec une équipe de plusieurs stylistes chargés de repérer les tendances mode, puis nous externalisons la production en Chine.

Vous aviez basé votre concept sur un modèle à l'abonnement, pourquoi avoir changé ?

Nous avons en effet changé de modèle en avril dernier alors même que nous avions été l'un des pionniers de ce modèle à l'abonnement. Celui-ci a d'ailleurs fait notre succès puisqu'il nous a permis de gagner près de 3 millions de membres. Mais, en écoutant nos clientes, nous nous sommes rendu compte que beaucoup d'entre elles ne souhaitaient pas franchir le cap et voyaient ce système d'abonnement comme une réelle contrainte. Nous avons donc abandonné ce modèle afin d'accélérer notre croissance. D'ailleurs, ce choix s'est avérer positif puisque cela nous permis d'augmenter le panier moyen.

Ce modèle de "Subscription-based Commerce" a été copié et adapté à d'autres types de produits comme les produits de beauté, les rasoirs ou encore le vin. Pensez-vous que ce modèle ait de l'avenir ?

Il est vrai que notre succès a incité beaucoup de concurrents à nous copier et aujourd'hui ce modèle est adapté à un grand nombre de produits différents. Mais si pour certains utilisateurs ce modèle peut avoir du sens, je pense qu'à terme ces sites arriveront à la même conclusion que nous, à savoir que ce modèle à l'abonnement a des limites. Lorsqu'ils voudront passer au stade supérieur, il leur faudra adapter ce modèle afin d'offrir plus de flexibilité à leurs clients.

Quel pourrait être, selon vous, le prochain business model à faire le buzz ?

Dans le domaine de la mode j'observe à titre personnel des nouveaux modèles intéressants, notamment à l'intersection entre le web social et le mobile. Je peux vous citer l'exemple de Pose, une application permettant aux femmes de se prendre en photo pour partager leurs looks instantanément, ou encore OpenSky, un service qui permet de recevoir les recommandations de produits de célébrités. Il se passe des choses très intéressantes sur le mobile.

Comment expliquez-vous avoir acquis autant de notoriété aussi rapidement ?

Le fait que Kim Kardashian soit cofondatrice de la société nous a donné immédiatement de la visibilité dans la presse. Nous collaborons également avec des stylistes bien connus à Hollywood. Surtout, les réseaux sociaux ont joué un rôle important dans notre succès puisqu'au départ la quasi-totalité de nos clients venaient de Facebook. D'ailleurs, jusqu'à encore récemment, nous investissions près de 90% de notre budget publicitaire uniquement sur Facebook. Aujourd'hui, notre croissance nous permet d'investir dans d'autres medias, notamment la télévision depuis Juillet dernier.

Vous vous êtes retiré du marché britannique en janvier 2012 après seulement 4 mois de présence. Pourquoi ne pas avoir attendu plus longtemps ? Où en êtes-vous de votre expansion internationale ?

Cette décision a fait suite à l'arrivée d'une nouvelle équipe dirigeante qui a souhaité axer tous nos efforts sur le marché américain. L'évolution de notre modèle ainsi que l'ouverture de notre gamme à de nouveaux produits ne nous permettait pas d'un point de vue opérationnel de nous disperser sur plusieurs marchés. Nous reviendrons sans doute en Europe. Mais à l'heure actuelle nous souhaitons d'abord profiter au maximum du potentiel de croissance qu'offre le marché américain.

Quels profils ont vos clientes ? Est-ce que ShoeDazzle pourrait un jour étendre son offre à une cible masculine ?

Dans l'ensemble nos clients sont des femmes entre 25 et 34 ans. Pour ce qui est d'étendre notre offre à une cible Homme, ce n'est pas prévu dans l'immédiat même si rien n'est impossible...

Quels sont les prochains chantiers de ShoeDazzle ?

Nous allons continuer à améliorer la personnalisation de nos suggestions afin de les rendre encore plus pertinentes et nous allons poursuivre l'intégration de nouveaux types de produits au sein de notre offre, selon les demandes de nos clientes. Nous comptons aussi nous développer sur mobile d'ici la fin de l'année, puisqu'à l'heure actuelle nous ne disposons pas encore d'application. Enfin, nous allons continuer à utiliser nos connexions à Hollywood pour notre marketing. Nous avons ainsi récemment lancé un programme mensuel où des célébrités conçoivent un modèle de chaussures et dont les ventes sont ensuite reversées à une association caritative.

Géraldine Martin-Coppola a démarré sa carrière au sein du cabinet de conseil en management Mc Kinsey dans les différents bureaux de Paris, Los-Angeles et New-York. Elle a également été responsable de la division digital du groupe média BermanBraun, s'occupant notamment des sites WonderWall et GLO. Avant cela, elle a travaillé au sein de Yahoo en tant que responsable de la stratégie et productrice exécutive. Elle intègre en 2010 le site de social commerce ShoeDazzle en tant que directrice produit, en charge notamment du design. Géraldine Martin-Coppola est diplômée de Polytechnique et d'un MBA de la Harvard Business School.