Le digital in store n'est plus, place au "digital efficace" pour une nouvelle expérience client

De nombreuses enseignes et marques se sont lancées dans de premières initiatives digitales qui n’ont finalement pas passé le cap de l’année de l’exploitation. Quelles sont les raisons de cet échec ? Quel est le secret des enseignes qui ont su intégrer le Digital au sein d’une expérience, et au service d’une nouvelle vocation d’enseigne ?

Tout part d'un constat. L’observation de l’évolution des Points de Vente physiques témoigne du manque de succès des premières initiatives de lancement des dispositifs digitaux in store. D’une année sur l’autre, le "bouton d’appel vendeur" a disparu chez H&M NY, ou, quand on l’utilise chez Nike NY, on ne voit jamais arriver le vendeur… Les miroirs connectés, s’ils n’ont pas disparu (Ralph Lauren NY), restent à l’état de démonstration. Les écrans qui donnent accès aux sites internet, même en grand format, n’ont pas été utilisés, et les TV dans les lieux d’accueil ne sont pas assez regardées... Voici deux images d'illustration : le bouton vendeur chez Nike et le miroir connecté chez Ralph Lauren. 


Ces semi-échecs s'expliquent pour de multiples raisons : soit parce que ça ne fonctionne pas toujours techniquement, soit parce que le client ne s’en sert pas, soit parce que les équipes terrain s'en détournent…

Fini l’engouement qui a amené les enseignes à commander et faire fleurir en nombre les écrans en boutiques, sans penser au préalable à leur rôle dans une expérience client pensée en mode "global", aux usages et bénéfices attendus, tant pour le consommateur que pour le collaborateur interne. "On parle beaucoup de boutique connectée. On dit, on va mettre du Digital et on est connectés. Le Digital pour le Digital, ça ne sert à rien !", affirmait déjà il y plus de 2 ans Carine Rebstock, International Retail Director chez Orange.

Peu à peu, les enseignes reculent…

Elles finissent par conclure que finalement, le Digital in Store, en soi, n’a pas vocation d’être. Certaines vont jusqu’à mettre en doute leurs investissements. "L’innovation, ce n’est pas le digital", nous confiera Florence Sanson ,Leader Innovation chez Norauto au salon Conext. Alors tous ces dispositifs lancés ont-ils été pensés pour servir une Expérience Client nouvelle génération ? Ont-ils été réellement co-construits en partant du client, des besoins du collaborateur, et en associant tous les acteurs de l’architecture, de la technique, de la logistique, du terrain, du management, de la communication … et des canaux digitaux ? Aux dires de nombreux prestataires en place, il semblerait que non… La responsabilité s’est diluée en silos dans l’entreprise, plus de fil rouge, de suivi d’un potentiel Parcours Client...

Or aujourd’hui, vivre une Expérience Client hors norme est un pré-requis, une exigence des clients, parce que, s’ils font l’effort de se déplacer en magasin, c’est aussi pour le Conseil, la Rencontre et l’Emotion. Alors le digital ne peut que s’inscrire au service de cette rencontre.

Même les E Commerçants sont pris dans cette tendance…

Un exemple éloquent…les membres de la Communauté d’Air B&B ont eux-mêmes suggéré à la marque d’aller au-delà de la simple mise en relation entre Host et Guest pour orchestrer la "rencontre" et le "partage" d’Expériences pour leur voyage. Surfer avec un vrai surfer sur l’un des plus beaux spots, visiter le Louvre avec un passionné, animé d’un regard dont on partage les convictions essentielles, cuisiner avec un Chef dont la personnalité sera la plus proche de la mienne, de mes affinités… … voilà qui va bien au-delà de la simple réservation d’un cours de surf, de l’achat d’un billet de musée, ou d’un cours de cuisine. Et qui a donné naissance d’un nouveau service chez Air B&B (Expériences) il y a maintenant 18 mois. "Chez Air B&B, nous pensons que demain l’organisation d’un voyage se fera bien autrement…elle ira bien au-delà de la réservation d’un vol, d’un hébergement au meilleur tarif… ça, ce sont les commodités. Le consommateur se projettera plutôt sur l’Expérience qu’il souhaite y vivre …la rencontre humaine sera la clé du voyage demain…", affirme Baptiste MANIN, Expérience Manager chez Air B&B lors du dernier salon Conext Lille.

Pour répondre à cet enjeu, les enseignes font peau neuves et font place au Digital Efficace en Point de Vente, celui qui inscrit et pense les dispositifs pour qu’ils augmentent l’expérience du client, ou la qualité de service du collaborateur, celui  qui s’inscrit au cœur de l’expérience à vivre avec mon vendeur expert dans l’espace physique.

Et on y est presque…

"Commerce électronique et commerce physique sont en train de s’imbriquer... on ne parle plus d’e-commerce", souligne Farid Mheir, expert en technologies numériques qui œuvre au quotidien au Canada pour le cloud, la blockchain, l’IA, l’e-commerce, dans les Points de Vente. 

Voici quelques exemples de "Digital Efficace" : 

·  S’orienter facilement dans un espace à grande surface (écrans d’orientation hyper ergonomiques chez Bloomingdales)

·  Accéder plus rapidement à un produit en particulier (Scan Box de reconnaissance chez Métro, Undiz Machine, …) 

·  Permettre de projeter la vue d'un produit en taille réelle (écrans grande taille avec possibilité pour le vendeur de broadcaster, c'est-à-dire d'envoyer le contenu de sa tablette pour le partager avec son client comme chez King Jouet ou Boulanger) 

·  Commander l’arrivée du produit par des "runners", logisticiens en arrière boutique pour ne plus avoir à rompre la relation client (Aldo Shoes & Accessories).

·  Configurer et personnaliser des éléments pour constituer son propre produit (Consoles de jeu chez Microsoft NY, Ateliers de personnalisation NYKE NY)

·  Consulter les avis clients (Boulanger)

·  (Re)prendre RV

·  Retirer un produit (Click & Collect) et le réserver (Click & Reserv)

·  Augmenter la capacité du vendeur à recommander le bon produit, notamment via les moteurs d’IA. C’est déjà le cas à La Redoute, pour faciliter la recommandation des bons accessoires. Autre exemple : chez Adidas NY, on vous propose de courir sur un tapis de course, pour analyser en précision votre foulée : vos données, mixées à celle des autres clients, permettent au vendeur expert de soumettre une meilleure recommandation produit "les X personnes qui courent comme vous ont acheté à 80% ce modèle là".

En conclusion,

Traduire son ambition, la nouvelle vocation d’enseigne de façon concrète et opérationnelle va bien au-delà du simple dessin d’un Nouveau Concept performant, c’est avant tout avoir pensé le Digital en soutien d’une Expérience Client nouvelle, et pas comme une Expérience en soi.

D’où la nécessité d'anticiper les Parcours Clients in Store, pour travailler l’ensemble des composants (merchandising, logistique, management, postures de vente, dispositifs digitaux et mobiles, les postures de vente…) comme une partition de musique bien orchestrée, au service de la construction d’une Expérience Client complète et atypique.

Nathalie Innocenti assure une formation "Magasin de demain : parcours client connectés" chez CCMBenchmark Institut. Pour en savoir plus, cliquez ici.