Terez Duhameau (Rakuten) "L'IA générative permet à Rakuten d'aller plus loin dans la détection de la contrefaçon via l'analyse d'images"

Alors que Rakuten France assure détecter 99% des annonces liées à la contrefaçon, Terez Duhameau, directrice de la protection des utilisateurs et du paiement, dévoile comment ses équipes s'organisent.

JDN. Comment Rakuten organise sa lutte contre la contrefaçon sur sa plateforme ?

Terez Duhameau, directrice de la protection des utilisateurs et du paiement chez Rakuten France © LdeBroca

Terez Duhameau. Nous avons deux piliers très importants : les équipes et les outils. Chez Rakuten France, j'ai une petite équipe de trois experts qui gère globalement le risque, dont fait partie la cellule anti-contrefaçon. Et puis il y a les outils, majoritairement développés en interne depuis le début de Rakuten. Bien sûr, nous les perfectionnons petit à petit. L'avantage d'outils "maison" est qu'ils sont sur-mesure et très agiles. Et dans le risque, l'agilité est la clé pour agir très rapidement. S'il y a une faille, il faut tout de suite la bloquer, sinon elle risque d'être exploitée par d'autres. Concrètement : si une personne de mon équipe repère un nouveau facteur de risque, il peut agir directement sur notre outil pour intégrer cette nouvelle caractéristique comme un risque potentiel.

Pouvez-vous nous détailler sur quelle technologie reposent ces outils ?

Notre outil principal est un algorithme de scoring-matching extrêmement puissant. Nous avons le même depuis 20 ans, mais c'est ce qui fait sa force. Il a été nourri pendant toutes ces années avec énormément de nouvelles données. Sur cet outil interne, il n'y a pas de machine learning, d'où l'importance du nombre de critères et d'éléments enregistrés. Au fur et à mesure qu'il devient riche, il correspond de plus en plus à nos besoins. L'algorithme détecte le mot-clé, un élément de description de l'annonce ou bien le profil du vendeur qui va alerter sur un risque de mise en ligne. Aujourd'hui, 100% des annonces passent dans cet outil et ensuite deux options sont possibles en fonction du critère de matching : soit l'annonce est bloquée automatiquement, soit un contrôle manuel est effectué. Avec cette méthode, 99% des annonces liées à la contrefaçon sont bloquées avant d'être publiées.

Enrichissez-vous vos outils de détection avec l'IA générative ?

L'intelligence artificielle générative a entraîné l'arrivée de nouveaux outils et de nouvelles technologies sur le marché. La principale avancée qu'apporte l'IA générative est l'analyse et la détection de la contrefaçon à partir d'images. Notre outil de scoring-matching identifiait simplement le textuel, c'est-à-dire la description, le profil, etc. Aujourd'hui, l'IA générative permet à Rakuten d'aller plus loin dans la détection de la contrefaçon via l'analyse d'images dans une annonce. Cela permet aussi de dépasser la simple contrefaçon, en identifiant les vendeurs qui mettent des photos avec leur compte WhatsApp pour essayer d'amener la transaction hors site par exemple. Après quelques essais, je suis totalement convaincue de la pertinence de l'analyse des images pour dépasser les 99% d'annonces de contrefaçon détectées. En revanche quel outil utiliser exactement, je ne saurais pas encore dire. Nous développons des outils internes mais nous testons également des outils externes comme Navee pour explorer les différentes solutions.

Pour le 1% des annonces où la contrefaçon n'est pas détectée en amont, comment réagissez-vous ?

Même si cela représente 0,01% des réclamations aujourd'hui, l'enjeu est d'être extrêmement rapide. A partir du moment où un acheteur va prononcer le mot "contrefaçon" dans sa réclamation, dans son e-mail ou par téléphone, la demande va être directement orientée vers notre cellule spécifique. Nos équipes vont faire différentes vérifications : contacter le vendeur, demander des factures, des éléments complémentaires… Si la contrefaçon est avérée ou soupçonnée, nous allons renvoyer le produit chez nous pour que des experts statuent et que l'acheteur soit remboursé. Il faut que pour l'acheteur, l'expérience soit fluide et, pour les vendeurs, qu'il y ait des sanctions : le blocage de leur compte et dans certains cas, des pénalités de contrefaçon.

Notre taux d'annonces de contrefaçon est particulièrement faible parce que nos outils sont très performants, mais aussi parce que nous avons construit notre réputation de plateforme de confiance et que certaines tentatives se déportent ailleurs. Sur les trois dernières années, nous avons observé une baisse de 30% du volume d'annonces liées à la contrefaçon.