Après la hype, quel ROI pour les chatbots dopés à l'IA générative en e-commerce ?

Après la hype, quel ROI pour les chatbots dopés à l'IA générative en e-commerce ? Depuis 2023, il ne se passe presque pas un mois sans annonce de chatbot à l'IA générative dans l' e-commerce. Derrière la hype, le JDN est allé voir les résultats pour les marchands.

Les chatbots basés sur ChatGPT ont été le premier cas d'usage d'IA générative dans l'e-commerce. En 2023, ils ont remplacé les algorithmes d'arbres décisionnels et installé l'IA conversationnelle en avant-vente. Une petite révolution dans l'e-commerce où le chat était boudé par les consommateurs.

Avec l'IA générative, la promesse d'imiter le service d'un vendeur en magasin en renseignant le client sur les caractéristiques du produit est devenue atteignable. Mais quel ROI attendre des chatbots dopés à l'IA générative ? Pour le savoir, le JDN a interrogé Intersport, Fnac Darty, Cdiscount, Zalando et Clarins. Tous ont mis en place un chatbot en avant-vente sur leur site e-commerce au cours des 18 derniers mois.

Satisfaction client : une hausse de 8 à 40 points  

Le cas d'usage le plus concluant selon Kilian Hauray, directeur client chez iAdvize, est le chatbot depuis une fiche produit : "L'effort pour obtenir l'information est bien moindre pour le visiteur. Plutôt que de cliquer sur plus d'infos, caractéristiques, etc., le bot lui fournit toutes les réponses". Un avis partagé par Mélanie Denis, directrice client et marketing chez Cdiscount : "Alors que notre ancien chatbot était uniquement proposé sur quelques marques premium, aujourd'hui il est étendu à toutes les fiches produit parce que nous voyons réellement le service apporté aux clients." Depuis le lancement de son chatbot d'IA générative, Cdiscount a augmenté la satisfaction client de 10 points, atteignant 80%, par rapport au chatbot traditionnel.

"La satisfaction client a augmenté de 8 points depuis la mise en place du chatbot en mars 2023"

Même constat chez Intersport qui utilise aussi la solution iAdvize. "Notre nouveau chatbot répond à des questions plus précises et apprend en continu, explique Philippe Muhr, directeur digital et e-commerce d'Intersport. La satisfaction client a augmenté de 8 points depuis la mise en place du chatbot en mars 2023". Une hausse qui atteint jusqu'à 40 points à en croire Clarins dont le chatbot "Clara" est disponible aux Etats-Unis depuis mai 2024. Une prouesse, bien que le spécialiste reconnaisse partir d'un niveau relativement bas avec les chatbots traditionnels. De son côté Zalando observe en moyenne des interactions de 4 échanges avec son assistant mode, "ce qui confirme qu'une conversation s'établit".

Le site américain de Clarins a ainsi enregistré une baisse de 30 points des demandes de conseil après interaction avec le bot. " Autrement dit, après une discussion avec Clara, seulement un client sur dix souhaite encore interagir avec un conseiller". Chez Intersport 70% des conversations sont entièrement automatisées par l'IA générative, et pour Cdiscount la part s'élève à 50%. Le chatbot nouvelle génération semble correctement interagir avec le client, soit. Mais permet-il de mieux vendre ?

Un taux de conversion jusqu'à 7 fois supérieur

"La première dynamique derrière le retour sur investissement des chatbots est l'augmentation des ventes, affirme Kilian Hauray de iAdvize. Amener une information plus facilement aux visiteurs, le réassurer et le conforter dans son achat permet d'augmenter le taux de conversion". Si seulement 2 à 5% des visiteurs entrent en contact avec un chatbot sur un site, selon iAdvize, le chiffre d'affaires qui en découle peut-être important. "Nous observons des taux de conversion sur la population globale qui peuvent être multipliés par 4 ou 10 avec la présence d'un assistant IA", poursuit le directeur de la relation client qui constate un effet équivalent en pourcentage sur le panier moyen. En résumé, le chatbot boosté à l'IA générative permettrait de mieux vendre des articles chers.

Intersport chiffre en millions d'euros le CA annuel généré par la vente assistée sur son site. Le terme comprend le chatbot et les experts ibbü proposés par iAdvize. Avec quelques 300 000 conversations par an, "le taux de conversion avec le chatbot IA générative est sept fois supérieur à celui une navigation classique, partage Philippe Muhr. Il est même parfois supérieur avec le chatbot qu'avec des experts, mais le panier moyen avec un humain est aussi un petit peu plus élevé". Même constat chez Fnac Darty qui assure que le chatbot déployé sur son site belge Vanden Borre atteint une transformation similaire à un chat avec un humain. Pour Mélanie Denis de Cdiscount, il n'y a pas de doute, le ROI du chatbot est positif. "Nous observons un gain de transformation. Une fois sur quatre, quand un client interagit avec le chatbot, il passe commande dans la foulée". En revanche, la directrice client et marketing précise que ce ratio reste encore inférieur au taux de transformation après un échange avec un conseiller humain.

Des économies d'échelle

"Le deuxième impact significatif d'un chatbot à l'IA générative est l'économie de coût, avance Kilian Hauray. Les conversations automatisées permettent de libérer le service client sur des tâches à valeur ajoutée". La stratégie est en effet celle de Cdiscount : "Nous concentrons les conseillers sur des situations complexes", témoigne Mélanie Denis. Une réalité qui a permis à Clarins d'optimiser ses équipes de relation client. "Le premier ROI de ce cas d'usage est l'aspect business : avoir des clients plus satisfaits avec un staffing de service client plus optimisé, résume Laurent Malaveille. Cela permet de rendre les agents beaucoup plus disponibles pour traiter les appels téléphoniques et les emails". Si elle ne partage pas de chiffres, la marque assure avoir réduit le temps d'attente pour avoir un conseiller au téléphone. Pour illustrer les gains de productivité sur les équipes du service client, le directeur digital de Clarins confie qu'avec "une croissance e-commerce aux Etats-Unis à deux chiffres en 2024, le staffing de notre équipe service client est resté stable".

"Là où un coût de traitement service client habituel en Europe va osciller entre 4 et 6 euros, le coût technologique est compris entre 1 et 1,50 euro"

 

En parallèle, le chatbot, même dopé à l'IA générative, coûte moins cher qu'un traitement humain. "Là où un coût de traitement service client habituel en Europe va osciller entre 4 et 6 euros, le coût technologique est compris entre 1 et 1,50 euro", explique le responsable de la relation client chez iAdvize. Et par rapport à un chatbot classique, "les performances sont meilleures pour un prix identique", confirme Philippe Muhr d'Intersport.

Les marchands reconnaissent un dernier retour positif du chatbot IA générative, surtout quand celui-ci a été construit en interne : la valeur d'apprentissage. "Le chatbot était notre premier use case à une grande échelle d'IA générative, rappelle le directeur digital de Clarins. Avoir une équipe qui apprend ces technologies, qui a traité les problématiques d'infrastructure, de juridique, de cybersécurité, de maîtrise du prompting, etc. Ça a aussi une très grande valeur".

Une base de travail

Après le succès éprouvé de ces chatbots dopés à l'IA générative, les retailers préparent déjà leur évolution. Laurent Malaveille annonce le déploiement de Clara en France dans la première moitié de l'année 2025. "Nous voulons également créer des agents IA pour passer d'une Clara très robuste et généraliste, à des agents spécialisés une fois la problématique du client identifiée", ajoute le directeur digital.

Le chatbot d'IA générative ouvre aussi la voie à d'autres cas d'usage. Intersport travaille de son côté à l'intégration d'un bloc dans les fiches produits qui, grâce à l'IA générative et prédictive, fournira les réponses aux questions les plus probables du consommateur selon sa navigation et ses interactions avec le chatbot. "Dans un futur plus lointain, mon job sera aussi de faire le pont entre notre moteur de recherche Algolia et le chatbot, ajoute Philippe Muhr. Concrètement, cela permettrait d'affiner les réponses et l'autocomplétion qu'on peut avoir sur notre moteur de recherche grâce à un flux qui relierait les deux bases de données". Les enjeux de search sont aussi ceux de Cdiscount qui teste déjà à travers son chatbot le rôle de l'IA générative dans la recherche de produits.