La surprise, votre meilleure alliée dans le parcours client !
L'importance de la surprise et des émotions dans le parcours client dans la prise de décision. Des études en neurosciences montrent que la surprise active fortement les circuits du consommateur.
Dans son article, ‘La surprise, votre meilleure alliée en marketing’ Scott Redick met en avant les recherches de scientifiques des facultés de médecine Emory et Baylor qui ont mesuré, grâce à la technique de l’IRM, les modifications dans l’activité cérébrale de l’homme engendrées par une séquence de stimuli agréables, comme le fait de servir de l’eau et du jus de fruit. Ces stimuli étaient envoyés de façon soit prévisible, soit entièrement imprévisible. Contrairement aux attentes des scientifiques, les stimuli imprévisibles ont activé plus fortement les circuits de notre cerveau associés au plaisir et à la récompense. « Cette zone s’est illuminée comme un arbre de Noël à l’IRM, explique le Docteur Read Montague, professeur associé en neurosciences à Baylor, ce qui nous amène à penser que les individus sont programmés pour désirer l’imprévu »à l’image de la société Birchbox, un service d’abonnements qui envoie à ses clients un coffret remplis de produits de beauté mystères chaque mois.
La surprise semble exacerber les sentiments, quels qu’ils soient. Si on associe le bonheur à la surprise, on atteint alors le haut de l’échelle du bien-être. Ceci aide à comprendre pourquoi le groupe Zappos déploie tant d’efforts pour livrer les chaussures avant le moment prévu par ses acheteurs et pourquoi le mot « plaisir » est si souvent associé au terme surprendre. Les surprises peuvent prendre différentes formes et avoir différentes "raisons". Dans le cadre de notre recherche , nous nous intéressons aux situations où l'inattendu émerge par rapport aux attentes, aux anticipations ou aux situations familières, telles que définies par le cadre théorique de la cross canalité. Concernant la ‘Surprise’ certains linguistes adoptent une position psychologique traditionnelle et rangent les structures linguistiques de surprise dans les prédicats d’émotion (Johnson-Laird et Oatley, 1989, Goossens, 2005, Cosnier, 2006). Pour Ortony, Clore et Collins, la surprise «se caractérise a priori par une absence de valence, est plutôt un état cognitif […] et peut se transformer en surprise positive ou négative selon la qualité du stimulus».
Ekman (2003) propose une approche nuancée de la surprise qui pour lui est brève, suivie d’une prise de conscience et se fond dans des émotions comme peur, amusement, soulagement, colère, dégoût, etc., qui dépendent de la nature de l’événement déclencheur. Il introduit aussi l’idée que la surprise puisse ne déboucher sur aucune émotion si l’événement surprenant est déterminé par le sujet comme étant sans importance. Plantin (2011) perçoit la surprise comme composante de toute émotion. Pour Pierre Livet, philosophe, la surprise peut être en substance noyée par la force de l’émotion, comme immergée dans la colère, le dégoût et la peur. Ces divers points de vue témoignent de la difficulté à démêler les deux composantes de la surprise. La théorie psycho-évolutive du psychologue Robert Plutchik sur les émotions classe nos sentiments selon plusieurs catégories : les émotions primaires, comme la colère ou la peur, ou secondaires, plus nuancées, associant plusieurs d’entre elles, comme les sentiments doux-amers (bonheur + tristesse) ou la culpabilité (bonheur + peur). Le point intéressant en ce qui concerne la surprise est, semble-t-il, qu’elle exacerbe les sentiments, quels qu’ils soient. Quand on est surpris et en colère, on est alors scandalisé. Quand Netflix a augmenté ses tarifs d’abonnement sans prévenir ses clients cela a suscité beaucoup d’agacement voir énervement chez ses clients. Si on associe le bonheur à la surprise, on atteint alors le haut de l’échelle du bien-être. Ceci aide à comprendre pourquoi le groupe Zappos déploie tant d’efforts pour livrer les chaussures avant le moment prévu par ses acheteurs et pourquoi le mot « plaisir » est si souvent associé au terme surprendre.
D’importants progrès ont été accomplis dans les domaines de la biologie et de la neurologie. Les avancées de l'imagerie cérébrale ont considérablement amélioré la compréhension du fonctionnement du cerveau grâce aux neurosciences, confirmant divers mécanismes. Déjà au milieu du XIXe siècle, le médecin John Harlow rapportait le cas de Phinéas Gage, un ouvrier qui, après un accident entraînant la destruction d'une partie de son cerveau, avait retrouvé toutes ses capacités tout en subissant des changements significatifs de personnalité. Ses prises de décision n'étaient plus influencées par ses valeurs morales et sociales. Les travaux en neurosciences, notamment ceux d'Antonio Damasio, ont mis en lumière le rôle positif des émotions dans notre processus de raisonnement. Damasio s'est basé initialement sur le cas similaire d'un patient nommé Elliot, qui, après une opération d'une tumeur dans la région orbito-frontale, avait perdu la capacité de faire des choix judicieux. En outre, des expériences en laboratoire sur des patients présentant des lésions spécifiques du cerveau ont montré qu'ils semblaient ne plus ressentir d'émotions ni être capables de les détecter chez les autres. Leurs prises de décision "de sang-froid" ne leur permettaient plus d'attribuer des poids respectifs aux différentes solutions, les privant ainsi de la capacité de prendre de bonnes décisions. Antonio Damasio a formulé une théorie selon laquelle nos expériences nous conduisent à établir des liens entre des catégories d'objets ou d'événements et des états corporels agréables ou désagréables, qu'il nomme les "marqueurs somatiques". Ces marqueurs agiraient de manière inconsciente, favorisant certains éléments plutôt que d'autres grâce aux mécanismes de l'attention, et exerceraient une influence sur la prise de décision. Damasio soutient ainsi le rôle des émotions en tant que "guides de la raison" dans ses ouvrages tels que "L’erreur de Descartes : la raison des émotions" et plus récemment "Spinoza avait raison". Selon lui, les émotions ne doivent plus être perçues comme perturbant la raison, mais plutôt comme un processus orientant nos décisions et influençant nos jugements dans la vie quotidienne.
Les émotions jouent un rôle crucial dans les mécanismes de prise de décision humaine. Elles ont la capacité d'affecter notre perception de la valeur d'un produit ou d'une marque, orientant ainsi nos choix vers une option plutôt qu'une autre. Les recherches en neuroéconomie, telles que celles conduites par Antonio Damasio dans son ouvrage "L'erreur de Descartes", mettent en évidence la forte interconnexion entre les régions cérébrales responsables de la prise de décision et notre système émotionnel.
Par conséquent, les émotions exercent une influence significative sur nos comportements d'achat, nous incitant à privilégier l'acquisition de produits associés à des émotions positives. C'est pourquoi de nombreuses entreprises cherchent à exploiter les émotions dans leur stratégie marketing pour renforcer la fidélité et la loyauté des consommateurs envers leur marque. Malgré leur expression souvent discrète, les émotions jouent un rôle prépondérant dans l'ensemble du processus de prise de décision. En réalité, les décisions sont davantage motivées par les émotions que par la logique. Selon les neuroscientifiques, les émotions exercent une influence significative, voire déterminante, sur nos choix d'achat. Les réactions émotionnelles se produisent à une vitesse trois mille fois supérieure à celle de la pensée rationnelle, et les régions émotionnelles du cerveau traitent les stimuli sensoriels cinq fois plus rapidement que la pensée rationnelle.
Bien que les progrès aient été réalisés dans la mesure des émotions, cette tâche reste aujourd'hui un défi pour les chercheurs et, surtout, pour les praticiens. Divers outils de mesure sont utilisés pour évaluer les émotions des consommateurs. En plus des méthodes déclaratives traditionnelles, des mesures objectives des différentes composantes de l'émotion ont émergé, allant jusqu'à l'observation directe de l'activité émotionnelle dans le cerveau. Mesurer l'émotion implique de déterminer son intensité, sa polarité et son contenu, mais les techniques développées ne couvrent pas toujours ces trois aspects simultanément. De plus, reconnaître que certaines circonstances peuvent rendre un individu inconscient de ses émotions rend les outils déclaratifs inappropriés. La possibilité pour certains consommateurs de dissimuler leurs émotions peut également rendre inefficaces certains outils objectifs de mesure. En réalité, la plupart des outils développés présentent des limites d'ordre méthodologique, voire éthique, et seule l'utilisation combinée de plusieurs méthodes peut permettre une mesure précise des émotions. Une classification des principales modalités de mesure des réactions affectives a été proposée par Derbaix et Filser, qui distingue le moment de la mesure (après ou pendant l'exposition au stimulus déclencheur), le caractère verbal ou non, la participation explicite ou non du consommateur, et la prise unique ou répétée de la mesure.
Depuis les années 80, la recherche en comportement du consommateur et les pratiques marketing ont progressivement intégré l'importance de l'aspect affectif. Ces évolutions ont été particulièrement influencées par les idées de Zajonc (1980), qui remettaient en question la nécessité de la réflexion pour créer des préférences chez les consommateurs. Les réactions affectives déclenchées par les annonces publicitaires, notées RADA, ont ainsi été introduites graduellement dans les modèles cognitifs de persuasion publicitaire. Parallèlement, les travaux de Holbrook et Hirschman (1982) ont souligné l'importance de l'aspect affectif, notamment à travers le concept d'expérience de consommation. Celle-ci est définie comme "un état subjectif de conscience accompagné d'une variété de significations symboliques, de réponses hédonistes et de critères esthétiques". Le consommateur est constamment confronté à des choix. Dans ce contexte, il peut soit utiliser la raison, soit se baser sur des éléments affectifs pour prendre des décisions. Le consommateur est constamment confronté à des choix et peut, dans ce contexte, baser ses décisions soit sur la rationalité, soit sur ses réactions affectives. Pham et Andrade ont identifié diverses situations susceptibles d'inciter les consommateurs à privilégier l'aspect affectif.
Cela se produit notamment lorsque leur motivation à traiter l'information est faible, lorsqu'ils sont distraits, cognitivement contraints, sous pression temporelle, en présence d'autres bases d'évaluation ambiguës, ou en cas de manque d'expertise dans le domaine. Par ailleurs, les réactions affectives jouent un rôle prépondérant dans les décisions des consommateurs lorsque ces derniers ont des objectifs expérientiels, que ce soit dans le choix de produits hédoniques par opposition aux produits utilitaires, lorsqu'ils prennent des décisions pour eux-mêmes plutôt que pour autrui, et lorsque le consommateur a confiance dans ses réactions affectives. Bien qu'un affect trop intense puisse parfois entraver l'activité cognitive, les émotions sont souvent intégrées dans le processus décisionnel. Les émotions positives tendent à favoriser l'adoption de raccourcis mentaux simplificateurs, tandis que les émotions négatives incitent l'individu à opter pour une analyse plus approfondie.
L'objectif de la mesure des émotions est d'identifier leur contenu, et cela implique l'utilisation de plusieurs techniques. L'observation des expressions faciales à l'insu du sujet est une possibilité, à condition de bien comprendre le contexte, car des motifs sociaux peuvent parfois induire des expressions telles qu'un sourire de politesse. Il est important de souligner que tout élément qui rend le consommateur conscient de la prise de mesure représente un inconvénient, nécessitant une interprétation aussi objective que possible par le chercheur. Ainsi, il est préférable de minimiser les facteurs susceptibles d'influencer la perception du consommateur. Selon Derbaix et Pham, il est recommandé d'utiliser trois techniques classiques de mesure des émotions : la composante neurophysiologique et biologique, la composante expressive, et la composante expérientielle. La mesure en temps réel offre l'avantage d'éviter les problèmes de rétrospection. Dans le domaine de la consommation, les émotions ressenties sont souvent moins extrêmes que dans des contextes plus personnels, nécessitant ainsi des méthodes de mesure plus sensibles.
Mathieu Lajante suggère que la combinaison de méthodes comportementales classiques avec des méthodes neurophysiologiques contribuerait à approfondir la compréhension de la psychologie du consommateur. L'un des défis consiste à reconnaître l'universalité des expressions faciales. Un système récent, le "Face reader", identifie six émotions de base avec une précision de 89%, mettant en avant la reconnaissance précoce de la joie, de la colère et de la tristesse par rapport à la peur, la surprise, le dégoût et le mépris. L'électromyographie faciale (EMG), en enregistrant l'activité électrique des muscles et des nerfs via des électrodes, permet de détecter des changements subtils des muscles du visage, ce qui est compatible avec des émotions subconscientes de faible intensité, souvent déclenchées par des messages publicitaires. Les expériences montrent que des images positives entraînent une activité accrue du muscle zygomatique, tandis que des images négatives activent le corrugator, ou muscle sourcilier, une observation qui s'applique également aux annonces radiophoniques. Ces mesures offrent donc la possibilité d'enregistrer des réactions subtiles sans nécessiter un port inconfortable de matériel. Ces dernières années, les recherches dans le domaine du comportement du consommateur ont profondément évolué. Les modèles traditionnels des années 70/80, fortement influencés par la théorie micro-économique et la psychologie cognitive, font progressivement place à des théories intégrant les états affectifs, dont les émotions (Filser, 1996). Les états affectifs tels que les émotions, les sentiments, les besoins, les motivations, les valeurs et les attitudes sont considérés comme des facteurs clés dans le comportement du consommateur. Ils sont susceptibles d'influencer la perception, l'évaluation et la décision du consommateur, en complément des caractéristiques rationnelles telles que les attributs du produit, le prix, la qualité, la performance, etc. Ainsi, la prise en compte des émotions et des états affectifs peut aider à mieux comprendre les besoins du consommateur et ses attentes.
Il nous semble donc intéressant d’investiguer l'impact de la surprise positive et négative dans l’expérience du parcours cross canal et notamment sur le souvenir qu’il restera des étapes de ce parcours. Pour cela nous nous pencherons sur la place de la surprise au sein d”es émotions et réactions affectives à l'instar de Derbaix et Pham (1991) et nous considérerons que la surprise fait partie des émotions qui, elles-mêmes, font partie d’un ensemble plus vaste, les réactions affectives. Dans leur typologie de l’affectif, Derbaix et Pham (1989, 1991) regroupent sous les réactions affectives, les émotions, les sentiments, les humeurs, les préférences, l’attitude et l'appréciation. Cette typologie nous semble particulièrement intéressante dans la mesure où elle reprend une description des éléments qui interviennent dans le déroulement des émotions, c’est-à-dire des composantes du processus émotionnel. En outre, elle met bien en lumière le degré affectif versus cognitif de chacune des réactions envisagées.