Comprendre et produire l'émotion pour influencer le consommateur
Depuis les années 80, la recherche en comportement du consommateur et les pratiques marketing ont progressivement intégré l'importance de l'aspect affectif.
Depuis les années 80, la recherche en comportement du consommateur et les pratiques marketing ont progressivement intégré l'importance de l'aspect affectif. Ces évolutions ont été particulièrement influencées par les idées de Zajonc (1980), qui remettaient en question la nécessité de la réflexion pour créer des préférences chez les consommateurs. Les réactions affectives déclenchées par les annonces publicitaires, notées RADA (Réactiver, Acquérir, Développer, Accompagner, Retenir), ont ainsi été introduites graduellement dans les modèles cognitifs de persuasion publicitaire.
Parallèlement, les travaux de Holbrook et Hirschman (1982) ont souligné l'importance de l'aspect affectif, notamment à travers le concept d'expérience de consommation. Celle-ci est définie comme "un état subjectif de conscience accompagné d'une variété de significations symboliques, de réponses hédonistes et de critères esthétiques". Le consommateur est constamment confronté à des choix.
Dans ce contexte, il peut soit utiliser la raison, soit se baser sur des éléments affectifs pour prendre des décisions. Le consommateur est constamment confronté à des choix et peut, dans ce contexte, baser ses décisions soit sur la rationalité, soit sur ses réactions affectives. Pham et Andrade ont identifié diverses situations susceptibles d'inciter les consommateurs à privilégier l'aspect affectif. Cela se produit notamment lorsque leur motivation à traiter l'information est faible, lorsqu'ils sont distraits, cognitivement contraints, sous pression temporelle, en présence d'autres bases d'évaluation ambiguës, ou en cas de manque d'expertise dans le domaine.
Par ailleurs, les réactions affectives jouent un rôle prépondérant dans les décisions des consommateurs lorsque ces derniers ont des objectifs expérientiels, que ce soit dans le choix de produits hédoniques par opposition aux produits utilitaires, lorsqu'ils prennent des décisions pour eux-mêmes plutôt que pour autrui, et lorsque le consommateur a confiance dans ses réactions affectives. Bien qu'un affect trop intense puisse parfois entraver l'activité cognitive, les émotions sont souvent intégrées dans le processus décisionnel. Les émotions positives tendent à favoriser l'adoption de raccourcis mentaux simplificateurs, tandis que les émotions négatives incitent l'individu à opter pour une analyse plus approfondie.
La mesure des émotions et ses limites
L'objectif de la mesure des émotions est d'identifier leur contenu, et cela implique l'utilisation de plusieurs techniques. L'observation des expressions faciales à l'insu du sujet est une possibilité, à condition de bien comprendre le contexte, car des motifs sociaux peuvent parfois induire des expressions telles qu'un sourire de politesse. Il est important de souligner que tout élément qui rend le consommateur conscient de la prise de mesure représente un inconvénient, nécessitant une interprétation aussi objective que possible par le chercheur. Ainsi, il est préférable de minimiser les facteurs susceptibles d'influencer la perception du consommateur. Selon Derbaix et Pham (1989), il est recommandé d'utiliser trois techniques classiques de mesure des émotions : la composante neurophysiologique et biologique, la composante expressive, et la composante expérientielle.
La mesure en temps réel offre l'avantage d'éviter les problèmes de rétrospection. Dans le domaine de la consommation, les émotions ressenties sont souvent moins extrêmes que dans des contextes plus personnels, nécessitant ainsi des méthodes de mesure plus sensibles. Mathieu Lajante (2013) suggère que la combinaison de méthodes comportementales classiques avec des méthodes neurophysiologiques contribuerait à approfondir la compréhension de la psychologie du consommateur. L'un des défis consiste à reconnaître l'universalité des expressions faciales. Un système récent, le "Face reader", identifie six émotions de base avec une précision de 89%, mettant en avant la reconnaissance précoce de la joie, de la colère et de la tristesse par rapport à la peur, la surprise, le dégoût et le mépris.
L'électromyographie faciale (EMG), en enregistrant l'activité électrique des muscles et des nerfs via des électrodes, permet de détecter des changements subtils des muscles du visage, ce qui est compatible avec des émotions subconscientes de faible intensité, souvent déclenchées par des messages publicitaires. Les expériences montrent que des images positives entraînent une activité accrue du muscle zygomatique, tandis que des images négatives activent le corrugator, ou muscle sourcilier, une observation qui s'applique également aux annonces radiophoniques. Ces mesures offrent donc la possibilité d'enregistrer des réactions subtiles sans nécessiter un port inconfortable de matériel. Ces dernières années, les recherches dans le domaine du comportement du consommateur ont profondément évolué. Les modèles traditionnels des années 70/80, fortement influencés par la théorie micro-économique et la psychologie cognitive, font progressivement place à des théories intégrant les états affectifs, dont les émotions (Filser, 1996). Les états affectifs tels que les émotions, les sentiments, les besoins, les motivations, les valeurs et les attitudes sont considérés comme des facteurs clés dans le comportement du consommateur. Ils sont susceptibles d'influencer la perception, l'évaluation et la décision du consommateur, en complément des caractéristiques rationnelles telles que les attributs du produit, le prix, la qualité, la performance, etc. Ainsi, la prise en compte des émotions et des états affectifs peut aider à mieux comprendre les besoins du consommateur et ses attentes.
Il nous semble donc intéressant d’investiguer l'impact de la surprise positive et négative dans l’expérience du parcours cross canal et notamment sur le souvenir qu’il restera des étapes de ce parcours. Pour cela nous nous pencherons sur la place de la surprise au sein des émotions et réactions affectives à l'instar de Derbaix et Pham (1991) et nous considérerons que la surprise fait partie des émotions qui, elles-mêmes, font partie d’un ensemble plus vaste, les réactions affectives.
Dans leur typologie de l’affectif, Derbaix et Pham (1989, 1991) regroupent sous les réactions affectives, les émotions, les sentiments, les humeurs, les préférences, l’attitude et l'appréciation. Cette typologie semble particulièrement intéressante dans la mesure où elle reprend une description des éléments qui interviennent dans le déroulement des émotions, c’est-à-dire des composantes du processus émotionnel. En outre, elle met bien en lumière le degré affectif versus cognitif de chacune des réactions envisagées.
Le concept d’Ekman (2003) décrit la surprise comme brève, suivie d'une prise de conscience et se fondant ensuite dans d'autres émotions telles que la peur, l'amusement, le soulagement, la colère, le dégoût, etc.. Les modèles traditionnels des années 70/80, fortement influencés par la théorie micro-économique et la psychologie cognitive, cèdent progressivement la place à des théories intégrant les états affectifs, y compris les émotions (Filser, 1996).