Le BIM : l'innovation au service de la ville

La modélisation des données des bâtiments est un outil peu connu du grand public, mais aujourd'hui indispensable des villes modernes et durables. Voici quelques aspects à ne pas négliger.

BIM ! Un acronyme qui claque et qui révolutionne le monde de la construction et de la gestion des villes. BIM pour Building Information Modeling, ou modélisation des informations du bâtiment en français. Trois lettres qui se traduisent concrètement par une maquette numérique 3D intégrant toutes les données sur le bâtiment. Plus qu’un simple outil, une technologie ou un logiciel, le BIM est un processus intelligent qui permet aux professionnels de la construction, mais aussi aux services techniques des collectivités, d’accéder aux informations nécessaires pour concevoir, construire et gérer plus efficacement les bâtiments et les infrastructures. Un ensemble de méthodes de travail et de collaboration entre tous les acteurs d’un projet.

Le BIM, avenir de la construction

La maquette numérique 3D est une fidèle représentation digitale des caractéristiques physiques et fonctionnelles du bâtiment et contient un ensemble de données intelligentes et structurées. Le BIM facilite ainsi le partage d’informations fiables tout au long de la durée de vie du bâtiment, de la conception à la démolition, en passant par la construction et l’exploitation. Ce modèle virtuel permet en outre de réaliser des visualisations, pour avoir une idée plus concrète du bâtiment avant sa construction ou pour explorer différentes options. Il permet également d’effectuer des analyses et des simulations – notamment des performances énergétiques – ainsi que des contrôles de respect des normes et du budget.

Avec le BIM, la conception est de meilleure qualité grâce à la détection précoce des problèmes. Les coûts de construction sont mieux maîtrisés. La qualité des bâtiments est améliorée grâce aux différentes analyses et simulations réalisées tout au long du projet. La gestion et la maintenance sont également optimisées. Le BIM s’est ainsi naturellement imposé comme l’une des meilleures solutions pour améliorer la manière de travailler de l’industrie de la construction, son efficacité et la qualité de ses réalisations, mais également de réduire les émissions de carbone et de préserver les ressources naturelles. L’utilisation du BIM tend ainsi à devenir obligatoire dans le monde entier, notamment dans les marchés publics.

Une solution pour les smart cities 

Le BIM ou le CIM (City Information Modeling), application du BIM à l’échelle de la ville, est devenu un processus indispensable au développement des villes intelligentes. Il était d’ailleurs au cœur des stands, des conférences et des événements de l’édition 2019 du Smart City World Expo Congress (SCEWC) de Barcelone, qui a accueilli en novembre dernier quelque 24 000 visiteurs et plus de 1 000 exposants venus de 146 pays. Ce salon a été l’occasion pour tous les acteurs de la smart city d’exposer leurs solutions innovantes pour les villes intelligentes : fournisseurs de technologies tels que Cisco, Microsoft ou Oracle, grands opérateurs de services urbains comme Engie, Suez ou Citelum, et éditeurs de logiciels spécialisés tels que ESRI, OpenDatasoft ou Intent-Technologies...

Systèmes d’information géographiques (SIG) qui permettent aux territoires de situer et de gérer les infrastructures publiques, plateformes d’open data qui visent à ouvrir l’accès aux données publiques, "hyperviseurs urbains" qui assurent le pilotage de la ville et la gestion de ses grandes fonctions (trafic, éclairage, sécurité, énergie, etc.). Les différentes solutions présentées illustrent les grandes tendances du BIM appliquée à la ville. Car le BIM – ou le CIM – va assurément jouer un rôle majeur dans la fabrique de la ville dans le futur. En utilisant une maquette numérique partagée qui centralise toutes les informations, le maître d’ouvrage et ses partenaires détiennent un ensemble de données puissant pour optimiser la conception mais aussi l’exploitation et la maintenance d’un réseau, d’un quartier ou d’une ville.

Plateforme d’hypervision

C’est vers ce modèle de modélisation de la ville qu’évolue par exemple une ville comme Dijon, en partenariat avec Bouygues Energies & Services, Citelum, Suez et Cap Gemini. "Le projet OnDijon consiste à mettre en place une plateforme d’hypervision qui pilote l’espace urbain : feux de circulation, éclairage public, vidéoprotection, contrôle d’accès, etc.", explique Xavier Lenoir, directeur des systèmes d’information de Dijon Métropole.

Opérationnelle depuis avril 2019, cette plateforme assure trois fonctions : superviser l’espace urbain en temps réel, contrôler et suivre les opérations, aider à la décision. L’ensemble des informations collectées sur les maquettes numériques du bâti urbain et des signaux émis par les différents capteurs et objets connectés de la ville sont enregistrés dans une base de données open source Apache Cassandra. Elles peuvent être visualisées sur un tableau de bord cartographique basé sur le SIG Arc-GIS. En fonction des événements signalés, les informations pertinentes sur les équipements sont extraites et les actions d’interventions lancées. A terme, comme dans le CIM, cet hyperviseur doit permettre de définir un réseau VRD, un plan de circulation ou d’éclairage public.

Citelum, entreprise spécialisée dans l’éclairage public et la smart city EDF, a été l’un des principaux artisans de la création de ce poste de pilotage connecté des équipements urbains des 23 communes de Dijon Métropole. Celui-ci s’appuie en effet en grande partie sur la plateforme digitale pour le pilotage et la gestion de l’espace urbain "Muse", développée par Citégestion, filiale de Citelum. Lors du Smart City World Expo de Barcelone, Citelum a d’ailleurs annoncé un accord avec Microsoft pour promouvoir Muse comme "solution de référence en matière de plateforme smart city". Une solution déjà retenue par des villes comme Copenhague ou Barcelone.

En rassemblant l’ensemble des données du terrain, ce cockpit de supervision, véritable tour de contrôle de la smart city, pilote l’ensemble des équipements de la ville et assure la coordination entre les services. Par exemple, dans le cas d’une fuite de gaz dans un quartier populaire, un événement où chaque seconde compte, l’hyperviseur permet d’accéder aux caméras de surveillance sur site, d’agir sur les feux de circulation des carrefours, de dégager une voie de circulation pour les services d’urgence, et de faciliter la gestion des interventions sur le terrain.

Incendie, inondation, canicule, attentat terroriste, cyberattaque, épidémie… L’actualité nous rappelle la vulnérabilité de nos villes et soulève la question de la résilience urbaine, c’est-à-dire de la capacité d’une ville à maintenir la continuité de ses services essentiels, même en mode dégradé. Le développement de cette résilience passe assurément par la modélisation et la supervision des équipements urbains, issue de la démarche BIM.